La direction de la
société Egis Rail a pris en charge l'assistance à la réalisation
de 3 lignes du futur tramway de Jérusalem, un projet illégal au
regard du droit international puisqu'il relie Jérusalem ouest
aux colonies établies en Cisjordanie. En tant que citoyens
d’Etats dits de droit, nous sommes prêts à mettre devant leurs
responsabilités les dirigeants d'entreprises qui voudraient que
leurs crimes à l'étranger restent impunis.
Egis Rail a décroché en 2008 un contrat
de 11,9 millions d'euros avec la Jerusalem
Transportation Master Plan récupérant ainsi, via
la Caisse des Dépôts et Consignation, un projet initialement
obtenu par Véolia. Celle-ci appartient au consortium City Pass
(composé de 4 entreprises israéliennes et les entreprises
françaises Alstom et Connex - filiale transport de
Véolia) qui a obtenu le contrat pour la construction du tramway.
Véolia détient en plus la concession de 30 ans pour son
exploitation. La CDC, en tant qu' actionnaire de Véolia et d'Alstom,
est donc impliquée dans ce projet depuis 2005.
Or aprés une procédure judiciaire
et une campagne de pression de la société civile, Véolia
tente de s'en défaire.
En 2007, le TGI de Nanterre a été saisi
par l'Association France Palestine Solidarité, soutenue par
l'Organisation de Libération de la Palestine pour l’annulation
du dit contrat. Malgré les recours d’Alstom et Véolia, la Cour
d'Appel de Versailles a confirmé le 17 Décembre dernier,
la compétence du TGI pour juger cette affaire. Car non seulement
l'Autorité Palestinienne n'a pas donné son accord pour un projet
qui traverse son territoire, mais de plus, celui-ci contrevient
aux textes de la IVème Convention de Genève, qui interdit la
colonisation d'un territoire. Ces lois ont été réaffirmées par
la Cour Internationale de Justice en 2004 qui condamnait le mur
construit par Israël: toute infrastructure ou autre projet
servant ces colonies ou agissant pour perpétuer leur existence
est par extension illégale.
D’autre part, une campagne qui a mobilisé
de nombreuses associations en Suède, au Royaume-Uni, en Norvège,
en France... a fait perdre à Véolia plusieurs milliards d'euros
de contrats avec les autorités locales, tout en poussant des
fonds d'investissements à retirer la société de leur
portefeuille d’action..
Elle aurait déjà revendue la moitié de ses
parts à la société de transport israélienne Dan Bus. Si elle ne
réussit pas à s'en débarrasser elle pourrait poursuivre son
implication dans le projet à travers la nouvelle entité née de
la fusion de Transdev, filliale de la CDC et Véolia
transport.
Ce précédent montre que la direction d'Egis
Rail a fait le choix conscient et calculé d'un comportement
voyou puisqu'elle a accepté ce projet en toute connaissance de
cause, qu'elle en connaît les risques, qu'elle les a pris et
qu'elle y engage ses employés ainsi que les pouvoirs publics.
Urbanisation et politique : un
tramway fondamentalement colonial.
La ville de Jérusalem, dont la partie
Est est reconnue par le droit international comme capitale du
futur Etat palestinien, a été annexée illégalement par Israël en
1967. En répondant à
l'appel d'offre de la JTMP, la direction d'EgisRail reconnaît
l'autorité de cette institution sur l'espace de Jérusalem-est.
Mais avant tout, ce que nous condamnons, c'est sa
collaboration à un projet d'urbanisme dans un territoire occupé
militairement et qui participe d'une politique coloniale.
Dans une colonisation menée autant par des
soldats, des chars, des bulldozers et des colons (200 000 rien
qu’à Jérusalem-est) que par la construction de bâtiments et de
murs, le tramway de Jérusalem n'est pas une réalisation
technique neutre. L'architecture et l'urbanisme sont partie
intégrante de l'ensemble des politiques publiques. Il s'agit
d'organiser matériellement et spatialement le cadre de la vie
commune. Mais dans la mise en oeuvre d'une politique coloniale,
cette vie commune se transforme en ségrégation.
Dans les Territoires Occupés Palestiniens,
les routes construites par les Israéliens sont déjà réservées
aux seuls colons. Mais il suffit de regarder le plan actuel du
réseau du tramway pour s’apercevoir qu’à une exception près,
aucun arrêt n'est prévu dans les zones palestiniennes. De plus,
le porte-parole de la société Dan Bus a expliqué pourquoi les
Israéliens et les Palestiniens ne devaient pas se rencontrer
dans ce tramway, rappelant ainsi la tristement célèbre
ségrégation raciste aux USA ou encore l'Apartheid en Afrique du
Sud.
Au regard donc de la politique de terrain,
la communication d'EgisRail ne peut prétendre à satisfaire
l'intérêt général et à rassembler les peuples par le biais de
cette infrastructure.
Pour
comprendre les enjeux politiques que représente ce tramway, il
faut savoir que les gouvernants israéliens ont réaffirmé leur
désir de voir Jérusalem devenir "la capitale unifiée et
indivisible d’Israël". Cette option s’exprime à travers
l’ensemble des mesures répressives prises à l’encontre des
Palestiniens afin de contenir leur croissance démographique et
atteindre la judaïsation complète de la partie orientale de la
ville. Ainsi, les Palestiniens n'ont pas le droit de se déplacer
librement dans leur propre pays et l'entrée dans leur capitale
leur est INTERDITE. Les Jérusalemites originels, quant à
eux, vivent sous un statut d’étranger permanent dans leur propre
ville et peuvent se voir révoquer leurs papiers d’identité à
tout moment. Pire, une politique de nettoyage ethnique
est déjà à l'oeuvre par l'expulsion des familles palestiniennes
les unes après les autres, soit en les remplaçant par des colons
juifs venus de l’étranger, soit en détruisant sommairement leur
maisons.
En somme, en reliant Jérusalem Ouest aux
proches colonies établies en Cisjordanie, ce tramway s'inscrit
dans la volonté politique israélienne de rendre irréversible
l’annexion de Jérusalem-est, qui, entourée de colonies et de
murs et colonisée en son sein même, est maintenant coupée du
reste de la Cisjordanie. Egis rail a sciemment choisi une
stratégie commerciale qui viole le Droit Européen (l'article 2
de l'accord d'association UE-Israël prévoit la suspension des
relations économiques avec Israël en cas de non respect des
droits de l'Homme) et le Droit International.
En tant
qu'associations de soutien au peuple palestinien et à sa
résistance, alors que la campagne Boycott, Désinvestissements et
Sanctions contre l'apartheid israélien se développe
internationalement, la participation d'EgisRail à la mise en
oeuvre de ce projet ne pouvait que nous mobiliser. Nous tenions
à en informer les employé(e)s qui, à leur insu, sont
impliqué(e)s dans un projet qui sert une politique coloniale et
raciste.