Communiqué
Pour un mur qui tombe,
combien d'autres se construisent ?
Amnesty International
Lundi 10 novembre 2014
Il y a 25 ans le
Mur de Berlin tombait. Depuis cette
ouverture historique, des murs n’ont
cessé d’être érigés partout dans le
monde pour séparer et diviser. Censés
protéger, ces murs font surtout peser de
lourdes menaces sur des vies humaines et
sur le respect du droit international.
Aussi historique que symbolique, la
chute du Mur de Berlin a pourtant été
suivie de la construction d’autres murs,
partout dans le monde : entre les
États-Unis et le Mexique, entre Israël
et la Palestine, entre le Bangladesh et
l’Inde etc . Se souvenir du Mur de
Berlin c’est aussi s’intéresser aux murs
d’aujourd’hui.
LE MUR ENTRE ISRAËL
ET LA PALESTINE : L’EXEMPLE EMBLÉMATIQUE
Les impérieuses
considérations de sécurité prévues par
le droit international humanitaire
invoquées par Israël ne peuvent
continuer à justifier ce mur/barrière,
qui aux dépens de la population
palestinienne occupée, bénéficie aux
colons. Les implantations civiles
israéliennes, illégales au regard du
droit international, ne cessent pourtant
de se développer.
Les conséquences
économiques et humanitaires sont
dramatiques pour les Palestiniens, qui
se voient privés de leur droit à la
libre circulation, de l’accès à leurs
terres, à leurs lieux de travail, à
leurs lieux d’enseignement, aux soins et
autres services de base.
En savoir plus :
Israël et les Territoires occupés :
Regards sur le Mur
Nous n’avons de
cesse de dénoncer ces violations
continues entretenues par la politique
délibérée des autorités israéliennes, et
demande que le mur, empiétant sur des
terres palestiniennes et donc en
contradiction avec le droit
international, soit démantelé.
AU BANGLADESH : CE
MUR DONT PERSONNE NE PARLE
Érigé en territoire
indien à 150 mètres d’une frontière qui
était auparavant un lieu d’échanges
quotidiens, ce mur a de graves
répercussions économiques, sociales et
humaines, non seulement pour les
migrants, mais aussi pour les
populations des deux pays. C’est toute
la région frontalière – tant du côté
indien que bangladais – qui se trouve en
effet affectée par ce mur qui restreint
la liberté de circulation et les
échanges économiques. S’ajoute le
problème des enclaves indiennes au
Bangladesh et des enclaves bangladaises
en Inde. Le tracé de la frontière,
dessiné en 1947 à la chute de l’Empire
britannique des Indes, a en effet créé
près de 200 enclaves situées de part et
d’autre de la frontière. Les villages
enclavés sont privés d’accès à l’eau, à
l’électricité, aux soins et à
l’éducation ce qui constitue une
violation de droits fondamentaux.
Comme tant d’autres
dans le monde, ce mur-barrière censé
protéger et sécuriser est une source
infinie de violences.
La violence
quotidienne, c’est celle que fait régner
la police indienne des frontières. La
BSF (Border Security Force), agence
paramilitaire dépendant du ministère de
l’Intérieur, compte près de 220 000
hommes dont un grand contingent est
affecté à la surveillance du mur.
Chargés de surveiller frontières et
mouvements migratoires, ces hommes sont
dans leur très grande majorité issus de
provinces éloignés - certains sont des
ex-soldats du Cachemire- et ne parlent
pas le bengali. Ils y sont envoyés pour
des missions de courte durée (moins d’un
an). Ils ont très peu de liens et de
considération pour les populations
qu’ils surveillent. Les témoignages
dénonçant leurs violences, leurs abus et
leurs extorsions sont nombreux. Il n’est
pas rare que ces agents tirent à vue,
invoquant la légitime défense. Pourtant,
la police bangladaise n’enregistre que
très rarement les plaintes de ceux qui
osent témoigner. L’impunité est donc
totale et sonne comme un encouragement à
perpétuer de nouvelles violences.
CES MURS,
SYMBOLE DE VIOLENCE MORALE ET PHYSIQUE
Le droit d’un État
de protéger et garantir ses frontières
comme la sécurité de ses ressortissants
est incontestable. Il est d’ailleurs
prévu et encadré par les normes
internationales. Mais le faire sans
violer d’autres droits est aussi une
obligation faite aux Etats.
L’Inde n’est pas un
exemple isolé. Alors que les échanges ne
cessent de se développer, la
mondialisation et les peurs qu’elle
engendre semble avoir pour corollaire
l’édification de nombreux murs. Pourtant
ces derniers sont source d’autres peurs
comme le laisse sous-entendre
l’expression familière : « S’il y a un
mur, c’est bien qu’il y a danger… » Et
s’impose le constat qu’une réponse à un
problème par la violence est une
impasse. Ces murs, dont la construction
est censée répondre à des violences,
font peser de lourds dangers sur le
respect du droit international et des
droits humains. Des menaces et des abus
que nous dénonçons régulièrement.
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