Amnesty International
Bahreïn. Nouveaux éléments attestant la brutalité des
forces de sécurité
Jeudi 17 mars 2011
Amnesty International a révélé, jeudi 17 mars, des
informations confirmant le recours systématique des forces de
sécurité bahreïnites à une force excessive dans le cadre des
opérations de répression visant les manifestants, tandis que de
nouvelles violences ont fait pas moins de huit morts.
Dans un nouveau rapport diffusé le 17 mars, intitulé
Maculés de sang mais toujours résolus. Les manifestants
bahreïnites victimes de violences injustifiées de la part de
l’État, l’organisation décrit la manière dont, en février,
les forces de sécurité ont utilisé sans sommation des balles
réelles et une force extrême contre les manifestants, puis gêné
et agressé les équipes médicales essayant d’aider les blessés.
Ce rapport, qui s’appuie sur des témoignages de première main
recueillis par une équipe d’établissement des faits envoyée par
Amnesty International à Bahreïn, paraît alors que le pays sombre
un peu plus profondément dans la violence, après le déploiement
de soldats saoudiens et des Émirats arabes unis dans le petit
État du Golfe le 14 mars et l’instauration de l'état d'urgence
dans le pays par le roi de Bahreïn.
« Il est alarmant de constater que les autorités bahreïnites
recourent une nouvelle fois aux tactiques qu’elles avaient
employées contre les manifestants en février mais en leur
donnant encore plus d’ampleur, a déclaré Malcolm Smart,
directeur du programme Moyen-Orient et Afrique du Nord d'Amnesty
International.
« Il semble que le gouvernement a décidé qu’il convient de
répondre aux actions de protestation par une répression
violente, position absolument intenable qui donne en outre un
exemple inquiétant dans une région où d'autres gouvernements
sont également confrontés aux appels de leur peuple en faveur
d’un changement.
« Il faut que les autorités contrôlent soigneusement les
forces de sécurité, et protègent et fassent respecter les droits
à la liberté d’expression, d’association et de réunion, et
notamment le droit de manifester pacifiquement. »
Hani Mowafi, médecin américain qui faisait partie de l’équipe
d’Amnesty International, a conclu, au vu des nombreuses lésions
graves, voire mortelles qu’il a constatées en février, que les
forces de sécurité ont utilisé des munitions réelles à faible
distance, en cherchant semble-t-il à atteindre les manifestants
à la tête, à la poitrine et au ventre. Elles ont également tiré
des balles de moyen à gros calibre à l’aide de fusils puissants
le 18 février.
Les pires violences avant ces derniers jours ont eu lieu tôt
le matin du 17 février, lorsque cinq personnes ont été tuées.
Des témoins ont expliqué à Amnesty International que des tanks
bloquaient l’accès au rond-point de la Perle, tandis que des
policiers utilisaient des munitions réelles et des fusils, ainsi
que du gaz lacrymogène, des matraques et des balles en
caoutchouc pour disperser les manifestants, dont beaucoup
campaient sur place, scènes qui se sont répétées le 16 mars.
Un témoin a dit à Amnesty International que le 17 février la
police antiémeute avait fait feu depuis plusieurs endroits,
notamment d’un pont surplombant le rond-point, tandis que les
manifestants, affolés, couraient se mettre à l'abri.
Parmi les blessés figuraient des personnes clairement
identifiables comme étant des professionnels de la santé, pris
pour cible par des policiers alors qu’ils essayaient d’aider des
manifestants blessés sur le rond-point ou à proximité.
Le 3 mars, le ministre bahreïnite du Développement social, en
visite à Londres, a déclaré à Amnesty International que son
gouvernement menait une enquête sur ces homicides, dont les
conclusions seraient directement transmises au roi, et que deux
membres des forces de sécurité avaient été placés en détention.
Amnesty International demande l’ouverture d’une enquête
indépendante qui soit menée dans la rigueur et la transparence.
« L’ensemble des agissements des forces de sécurité contre
les manifestants depuis février doivent donner lieu à des
enquêtes exhaustives et indépendantes. Ceux qui ont ordonné et
déchaîné cette force meurtrière contre des manifestants
pacifiques doivent être identifiés et tenus de rendre des
comptes.
« Les homicides illégaux, les agressions et les autres abus
dont des manifestants et des professionnels de la santé ont été
victimes ne doivent pas rester impunis. »
Amnesty International a identifié certaines des munitions
retrouvées à la suite du raid mené au rond-point de la Perle le
17 février.
Elles incluent des cartouches de gaz lacrymogène et des
cartouches multi-coups de balles en caoutchouc de 37 mm
fabriquées aux États-Unis, ainsi que des grenades de fabrication
française libérant 18 fragments de caoutchouc lorsqu’elles
explosent et émettant un bruit assourdissant.
Amnesty International a demandé aux gouvernements fournissant
des armes à Bahreïn de suspendre immédiatement les transferts
d’armes, de munitions et d’équipements connexes susceptibles
d’être utilisés pour commettre de nouvelles violations des
droits humains, et de passer en revue toutes les livraisons
d'armes et formations prodiguées dans ce domaine aux forces
militaires, de sécurité et de police de Bahreïn.
À la suite du recours par les forces de sécurité bahreïnites
à une force injustifiée contre les manifestants, le gouvernement
britannique a révoqué plusieurs licences d'exportation d'armes
vers Bahreïn, et les autorités françaises ont suspendu
l'exportation d'équipements de sécurité vers ce pays.
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