Tunisie -
Tribune
La guerre du Qatar et de l'Arabie en
Tunisie
Seif Ben Kheder
Mercredi 22 janvier 2014
L'assaut général a été donné. Tous les
signes avant-coureurs sont réunis. La
guerre du Qatar contre l'Arabie saoudite
aura son troisième round sur la terre de
Tunisie, après les deux rings de la
Syrie et de l'Egypte.
Par
Seif Ben
Kheder*
Le mot d'ordre décrété par le congrès
de la confrérie est celui de la prise du
pouvoir par tous les moyens imaginables,
lors des prochaines échéances. Se
remettre donc dans l'habit de la
légitimité électorale et se préparer à
un scénario semblable à celui de
l'Egypte. Le statut de victime, en cas
de destitution par les forces armées,
est capital pour la nébuleuse islamiste,
afin de mener à bien les combats de rue
auxquels elle s'y prépare activement.
Pour ce faire, trois principaux fronts
ont été prévus dans le plan.
Le front
politique :
D'abord, une alliance avec toutes les
sensibilités politiques opportunistes ou
proches des réseaux mafieux des
islamistes, est en train de se mettre en
place, afin de tabler sur un taux qui
frôlerait les 50% et, par conséquent,
incontestable au niveau des résultats.
La liste est connue et facile à deviner.
Il s'agit des partis suivants : Ennahdha,
Wafa, le Front de la réforme (Al-Islah),
Hizb Ettahrir, l'Alliance démocratique,
le Parti républicain (Al-Jomhouri), le
Congrès pour la république (Al-Moatamar)
et le Courant de l'amour. Le projet
occidental de cohabitation entre Nida
Tounes (Appel de la Tunisie) et Ennahdha
a été remis à l'après 2014, selon la
réalité du paysage politique qui se
dessinera à ce moment là.
Le front des
milices :
Il faut savoir que le député
Abderraouf Ayadi, leader du parti Wafa,
a repris le contrôle des Ansar Charia et
que Moncef Marzouki, président
provisoire de la république, a plus
d'influence sur les Ligue de protection
de la révolution (LPR, milices au
service d'Ennahdha, NDLR) que sur
Ennahdha.
De ce fait, les intégristes au
pouvoir ont misé sur le marché des
jeunes criminels de la rue sans
appartenance idéologique. Des
mercenaires à bas prix et non
identifiables, par lesquels, les
militants soldats d'Ennahdha ne seraient
pas aux premières lignes des combats.
Tel fut le cas pendant les derniers
incidents nocturnes qui ont accueilli ce
premier moi du nouvel an.
C'était une répétition générale.
Par ailleurs, Ennahdha s'est gardé un
joker de grande envergure, celui des
terroristes professionnels, qui feraient
leur apparition au moment crucial des
altercations. Une partie d'entre eux est
encore installée dans les hauteurs du
Nord-Ouest, une deuxième qui constitue
les cellules dormantes dans les zones
urbaines et une troisième qui serait
dépêchée depuis les frontières libyennes
en cas de besoin.
Le front des
officiers :
L'argent des Al-Khalifa coule à flots
dans nos contrées. Ce qui fait dire à
certains que Rached Ghannouchi,
président d'Ennahdha, a investi une
bonne partie des fonds octroyés par le
Qatar et les banquiers de la confrérie
mondiale dans l'achat des services de
certains cadres de la nation. Les deux
ministères de l'Intérieur et de la
Défense vivent actuellement des tensions
internes inédites. La campagne menée en
sous-main par Ghannouchi pour la
reconduction de Lotfi Ben Jeddou à la
tête du ministère de l'Intérieur dans le
futur gouvernement Mehdi Jomaâ est pour
le moins spectaculaire. Les médias
étaient les moins chers à acheter dans
ce géant marché des corrompus.
En dehors des articles publiés en
faveur de ce ministre et des plateaux de
télé dédiés à l'entretien de sa
notoriété, on peut facilement remarquer
que plus aucun moyen de communication ne
cite les milices par leurs noms ni les
terroristes par leurs identités.
Dernier sketche en date, la
couverture par Ettounsia TV d'une
importante marche de l'organisation
terroriste Ansar Charia à Kairouan
baptisée «Marche des opposés à la
constitution». Il ne faut pas rire:
Moez Ben Gharbia et Sami Fehri,
respectivement animateur et patron d'Ettounsia
sont très sérieux :).
Ceci-dit, le rôle de Ben Jeddou dans
la manipulation des prochaines
échéances, éventuellement le référendum,
serait celui de facilitateur mais pas
décisif. On imagine bien que Ghannouchi
possède plus qu'un plan B dans sa poche.
Il en possède autant que l'alphabet.
Le seul
scénario possible :
Il y a d'abord l'étape de la
Constitution qui précède toutes les
éventualités possibles pour l'avenir du
pouvoir en Tunisie. Sur ce chapitre, les
intégristes ont excellé dans les
manipulations des négociations et la
multiplication de pièges dans les
textes. Tout a été truffé de termes
porteurs de plusieurs interprétations
qui prendront nos institutions en otage
pour l'éternité. Inutile de revenir à
l'analyse de ce texte dans cet article,
moi qui crie sur tout les toits depuis
deux années qu'il serait nul et non
avenu puisque émanant d'une assemblée
illégitime et hors-la-loi. L'essentiel,
donc, pour le bloc des moyenâgeux, dans
cette étape, est d'arriver à forcer son
passage par un référendum qui leur
permettra de tester tout leur dispositif
avant l'assaut final des élections
législatives.
Dans le cas échéant, l'opposition
complice aurait accepté leur texte,
espérant naïvement qu'elle serait
capable de gagner les élections finales,
avec le soutien faussement promis par
Jacob et ses amis.
Une fois le texte est adopté, par
référendum ou non, la ligne d'arrivée ne
sera qu'une question de quelques
semaines où les scores seraient plus
catastrophiques que ceux de 2011, où les
forces armées seraient plus affaiblies
et divisées, et où la société civile
s'afficherait clairement en tant que
société anonyme à but lucratif.
Contester les résultats ferait rire
toute la communauté internationale,
accélérerait l'extraction du gaz de
schiste et renommerait notre désert en
Desertec.
L'Arabie Saoudite, dans ce schéma,
n'a pas beaucoup d'influence comme
beaucoup le croient. Son premier
représentant, Béchir Ben Hassen,
l'équivalent du parti égyptien Ennour a
été très vite neutralisé par Ghannouchi
en faisant appel à ses «frères»
du PJD marocain. Elle vient de désigner
son successeur, assez tardivement, en
version costard, le dénommé Ayachi
Ajroudi. Et on vous dispense de
commentaires sur sa personne et son
parcours. Les jeux sont faits, sauf dans
le cas d'un sursaut populaire en
surprise, qui mènerait à la dissolution
du quartier des maffieux et prendrait de
court tout ce monde pollué.
* Coach en techniques de
communication verbale et gestuelle.
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Publié le 22 janvier 2014 avec l'aimable
autorisation de Kapitalis
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