Palestine
Israël tente d’empêcher Ahed Tamimi
de venir à la Fête de
l’Humanité
Pierre Barbancey
Lundi 10 septembre 2018
La jeune fille de
17 ans, qui a passé huit mois en prison,
ne peut sortir de Cisjordanie alors
qu’elle a obtenu son visa et doit
participer à la Fête de l'Humanité ce
week-end.
A près huit mois de
prison, pendant lesquels elle a
tristement fêté ses 17 ans, la jeune
Ahed Tamimi, dont le seul crime a été de
s’opposer à la présence de soldats
israéliens devant sa maison, devait
venir en Europe et, notamment,
participer, le week-end prochain, à la
Fête de l’Humanité. Avec ses parents,
visa Schengen obtenu, elle comptait
partir jeudi ou vendredi pour Bruxelles
puis se rendre à Paris, à l’invitation
de notre journal et du PCF, participer à
des débats organisés par l’Association
France Palestine Solidarité (AFPS),
avant de partir pour Madrid et être
reçue par le Parti communiste espagnol.
Pour l’heure, elle
ne peut honorer ses engagements. Les
autorités israéliennes ont fait savoir à
la famille Tamimi qu’elle ne quitterait
pas la Cisjordanie, où elle réside, pour
des raisons de sécurité (sic). S’ajoute
à cela la fermeture totale des
territoires palestiniens et des
frontières terrestres jusqu’à mardi en
raison de la fête juive de Roch Hachana.
Si la protestation ne s’amplifie pas, il
est à craindre que les participants à la
Fête de l’Humanité ne puissent pas
accueillir Ahed Tamimi, comme cela était
prévu. Pas plus qu’ils ne verront Salah
Hamouri, toujours emprisonné.
C’est toute la
politique de Netanyahou qui se dévoile
« Le gouvernement
français et le chef de l’État doivent
(…) intervenir pour que Ahed et ses
parents puissent voyager librement, et
se rendre à Paris, Madrid et Bruxelles,
comme prévu », a immédiatement réagi le
Parti communiste français dans un
communiqué. Rien, en effet, ne justifie
une telle mesure si ce n’est
l’arbitraire le plus total et la
volonté, de la part des forces
d’occupation, que ne soit pas entendue,
dans le monde et singulièrement en
France, la voix de celle qui symbolise
la révolte de la jeunesse palestinienne.
Quand on voit Ahed, quand on l’entend
parler, difficile évidemment de lui
accoler l’étiquette de « terroriste »,
sauf à tomber le masque. Pour Israël,
est terroriste toute personne opposée à
l’occupation et à la colonisation, qui
se prononce pour la création d’un État
palestinien. À travers l’interdiction
faite aux Tamimi de se déplacer, c’est
bien toute la politique de Netanyahou
qui se dévoile. Au cours du seul mois
d’août, 19 Palestinien(ne)s ont été
tué(e)s, pour la plupart des jeunes.
Même les personnels médicaux sont visés.
Manifester pacifiquement en Cisjordanie
ou dans la bande de Gaza, c’est
s’exposer à la mort. Ahmad Aboutoyour
n’avait que 17 ans. Il est mort samedi,
après avoir été touché par un sniper
israélien dans la bande de Gaza. La
veille, Bilal Moustafa Khafaja, 17 ans
également, était abattu de la même
manière.
Cette répression
sanglante n’est qu’une des facettes des
orientations du gouvernement d’extrême
droite israélien, qui vise non seulement
à tenter d’étouffer dans l’œuf toute
révolte, particulièrement celle de la
nouvelle génération palestinienne, celle
née au moment des accords d’Oslo et qui
en vit les forfaitures. Une répression
qui frappe également, en Israël même,
les associations de défense des droits
de l’homme, comme B’Tselem, ou encore
Breaking the Silence, composée d’anciens
soldats qui dénoncent les exactions de
l’armée dans les territoires occupés, et
même les députés, comme ceux de la Liste
unie, qui participent aux manifestations
contre la dérive d’Israël. Dans son
entreprise, Tel-Aviv est plus qu’épaulé
par Washington. Donald Trump vient
d’ordonner la suppression d’une aide de
25 millions de dollars aux hôpitaux
palestiniens à Jérusalem-Est.
C’est le cas de la
loi dite de l’État-nation, qui
représente un véritable tournant dans
l’histoire d’Israël, transformant le
pays en un apartheid de type nouveau,
dans laquelle est légitimée la
colonisation passée et à venir : toute
nouvelle installation, acceptée ou non
par le gouvernement, est désormais
légalisée et protégée par l’armée. Le
nettoyage ethnique en cours vise
également les Bédouins, dont un des
villages, celui de Khan al-Ahmar, doit
être détruit pour faire passer une route
réservée aux colons. L’arabe n’est plus
reconnu comme langue officielle. Cette
loi vise, de plus, à instrumentaliser
les juifs du monde entier, faisant
d’Israël leur représentant, leur déniant
ainsi leur rôle, leur place et leur
nationalité dans nos sociétés. On
comprend mieux pourquoi Benyamin
Netanyahou partage les vues du sinistre
premier ministre hongrois, Viktor Orban !
Les journalistes
harcelés
Le journaliste
palestinien Ali Dar Ali a été arrêté et
détenu depuis le 15 août pour avoir
posté une vidéo montrant l’armée en
opération dans un camp de réfugiés.
Mardi, cette même armée a tiré avec des
balles en caoutchouc sur les
journalistes venus le soutenir. La
Fédération internationale des
journalistes (FIJ) et le syndicat
palestinien (PJS) appellent Israël à
cesser « ces crimes qui ne
décourageront pas les journalistes ».
Pierre Barbancey
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