France
Procès LDJ:
des peines allant de 6 mois avec sursis
à 12 mois ferme
Nadir Dendoune
Houria Bouteldja (G) et Olivia Zémor au
tribunal correctionnel de Paris, le 31
mai 2016.
Crédit photo : Nadir Dendoune
Mardi 31 mai 2016
Le procès de
quatre membres de la Ligue de défense
juive (LDJ) poursuivis pour violences en
réunion avec circonstances aggravantes
et arme par destination s’est tenu ce
mardi 31 mai devant la 14ème
chambre correctionnelle de Paris. Les
juges ont condamné les prévenus à des
peines allant de 6 mois avec sursis à 12
mois ferme assorties de condamnations
pécuniaires solidaires.
En
2012, la LDJ, cette milice interdite aux
Etats-Unis mais tolérée en France,
s’était fait une spécialité d’asperger
de peinture rouge ceux qu’elle
considérait alors comme ses ennemis. De
Juin à octobre 2012, trois
agressions vont être commises à
l’encontre d’Olivia Zémor, présidente
d’EuroPalestine, d’Houria Bouteldja, la
porte-parole du Parti des indigènes de
la République (PIR) et de Jacob Cohen,
« un juif anti-sioniste », comme il
aime se définir.
Présents ce mardi à la barre trois des
inculpés, Steve Bismuth, Daniel
Benassaya et Laurent Cashauda. Joseph
Ayache, le cerveau de la bande, a
pris la fuite en Israël au lendemain des
faits, « parce qu’il craignait pour sa
vie », il n’a donc pas répondu présent à
la convocation. Il était tout de même
représenté par un avocat.
Olivia
Zémor est la première à s’avancer à la
barre. Le 28 juin 2012, elle prend un
verre du côté de Bastille avec un
individu qui se présente sous le nom
d’Amine Saraoui. « Il m’avait appelé en
me disant qu’il était intéressé par nos
actions et qu’il avait pour projet de se
rendre en Palestine », déclare à la
barre la militante.
A
peine installés, Mme Zémor reçoit sur la
tête une énorme quantité de peinture
rouge. « C’était de la peinture à
l’huile, celle qu’on utilise pour
peindre les murs, une substance très
toxique. Je ne voyais plus rien,
heureusement que des touristes
américains sont venus à mon secours ».
Elle file alors au commissariat du 4ème
qui l’emmène très vite à l’hôtel Dieu.
Pendant une heure, elle essaie avec les
infirmières d’enlever la peinture. En
vain. Résultat : 5 jours d’ITT.
Le cas
de Jacob Cohen est très vite évacué,
compte tenu de son absence au tribunal
et du fait qu’il n’ait pas pris la peine
d’aller chez le médecin après
l’agression. Le 5 juillet 2012, une
semaine après celle commise contre
Olivia Zémor, Jacob Cohen était lui
aussi aspergé de peinture rouge et de
farine dans le quartier du Marais à
Paris.
Houria
Bouteldja est la dernière des victimes à
être interrogée. « J’ai été contactée
via Facebook par quelqu’un qui se
présentait sous un patronyme maghrébin.
Il disait qu’il était journaliste pour
Saphir News. Je ne me suis donc pas
méfiée. C’est un site internet que
je connais très bien », détaille à la
barre la figure du PIR.
Rendez-vous est donné ce 24 octobre 2012
dans le 5 ème arrondissement de Paris.
« J’entends quelqu’un crier mon nom
et j’ai à peine le temps de me retourner
qu’on m’asperge de peinture ». Elle
file à l’hôtel-Dieu pour des soins. 6
jours d’ITT.
C’est
au tour des prévenus de répondre. Les
trois s’avancent ensemble. Le juge
demande à Daniel Benassaya d’enlever la
kippa qu’il porte sur sa tête, « pas de
signe religieux ici », précise le juge. Le
tribunal veut d’abord savoir quel rôle
jouait Joseph Ayache au sein de la LDJ.
Tous le décrivent comme le chef de la
LDJ.
Les
trois affirment avoir rejoint la Ligue
de défense juive « à cause de la montée
de l’antisémitisme » et « parce que
certains discours peuvent alimenter la
haine ». Laurent Cashauda, toujours :
« j’en avais marre de synagogues qui
brûlent ».
Les
trois prévenus fuient tour à tour leurs
responsabilités. « Je pensais plutôt à
une interview d’Olivia Zémor », explique
Laurent Cashauda, bien qu’il reconnaîtra
lors de ses gardes à vue « recevoir des
instructions d’Ayache en vue des
agressions ». Une vidéo de l’agression
d’Houria Bouteldja est mise en ligne
chez Steve Bismuth où Joseph Ayache est
venu dîner. « J’ai su ce qu’il y avait
dans la vidéo qu’une fois que celle-ci
fut mise en ligne », jure Steve Bismuth.
« Il a juste profité de mon réseau Wifi
pour la mettre en ligne », plaide-t-il.
Daniel Benassaya, le web master de la
LDJ, reconnaît avoir posté sur You tube
les vidéos des agressions d’Olivia Zemor
et de Jacob Cohen, mais jure qu’il
n’était pas présent sur les lieux.
« M.
Cashauda prétend le contraire. Il dit
que c’est vous qui avez filmé l’attaque
contre Madame Zemor », lui rappelle le
juge, qui précise également que les
policiers ont constaté qu’il s’était
entretenu plusieurs fois avant
l’agression de la militante avec Joseph
Ayache. Des appels qui ont été repérés à
proximité de l’endroit où la militante a
été aspergée de peinture rouge et peu de
temps avant. « C’est normal, j’habite
dans le secteur », se défend Benassaya.
Les
trois prévenus jurent désormais s’être
rangés et affirment avoir quitté la
Ligue de défense juive. Steve
Bismuth va se marier dans un mois,
Benayassa enseigne dans une école
religieuse juive.
Après
quatre heures de procès, le jugement est
rendu. Les juges ont suivi les
réquisitions du procureur général.
Joseph
Ayache est reconnu coupable des
infractions comme co-auteur et écope,
sans surprise, de la plus lourde peine :
1 an ferme. S’il reste en Israël, il
ne devrait pas être inquiété par la
justice française.
Steve
Bismuth obtient la relaxe pour les faits
reprochés à l’encontre de Jacob Cohen,
où sa culpabilité n’a pu être établie.
Il est néanmoins reconnu coupable de
diffusion d’image violente et écope
d’une amende de 1000 euros.
Daniel
Benassaya est reconnu coupable de
violence à l’encontre d’Houria Bouteldja.
« Il y a trop d’éléments qui vous
mettent en cause », ont justifié les
juges. En ce qui concerne les faits de
violences à l’encontre de Jacob Cohen,
il est seulement condamné pour diffusion
d’images violentes. Pour ses
deux faits, il est condamné à une peine
de 6 mois avec sursis.
Laurent Cashauda est déclaré également
coupable pour complicité de violence à
une peine de 6 mois avec sursis.
Ces
peines de prison sont assorties de
condamnations pécuniaires solidaires :
11800 euros pour Olivia Zemor et 8500
euros pour Houria Bouteldja.
Publié le 1er juin 2016
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