ISM
Jérusalem Occupée
:
Qui a vendu les appartements de Silwan
aux colons ?
Mujahed Bani Mofleh

Samedi 11 octobre 2014
Cet article publié le 7 octobre 2014
sur le site Al-Akhbar en anglais, est
une traduction de l'édition en arabe.
Israël a recours à toutes sortes
de stratégies, allant des revendications
de préoccupations sécuritaires à des
prétextes juridiques, telle la loi sur
les biens des absents, pour confisquer
des appartements appartenant à des
résidents de Jérusalem et les donner aux
colons. La dernière méthode utilisée
pour s'emparer de dizaines
d'appartements dans le quartier Silwan
consiste en contrats de vente par
l'entremise d'intermédiaires. En une
nuit, ces appartements sont devenus la
propriété de colons israéliens.
Le 30
septembre, la banlieue de Silwan, située
au sud de la Mosquée Al-Aqsa, à
Jérusalem occupée, a été témoin
d'une attaque des colons sous un
prétexte légal. Le ministre israélien de
l'Economie Naftali Bennett a qualifiée
de "succès historique" la
saisie de 26 appartements résidentiels
dans 8 immeubles de la ville.
Bien que les colons israéliens soient
entrés dans ces appartements vacants
comme s'ils en étaient propriétaires, la
police israélienne les a escortés à
travers de nombreux quartiers de Silwan,
ce qui a provoqué des confrontations
avec les jeunes de
Jérusalem.
C'est la première fois qu'une saisie
d'appartements a lieu à une échelle
aussi spectaculaire, ce qui a incité le
porte-parole de la présidence Nabil Abu
Rudeina à la décrire comme "une
agression israélienne flagrante."
Mais "le président de l'Autorité
palestinienne, Mahmoud Abbas" n'a
pas eu d'autre option que de "recourir
aux organisations internationales."
Les Jérusalémites de Silwan demandent,
qui a vendu et qui a acheté ? Quand
est-ce arrivé et comment les
appartements se sont-ils retrouvés entre
les mains des colons ? Dans la réponse à
ces questions, des accusations de vente
de maisons ont été portées contre des
gens de Silwan et d'autres de Palestine
occupée en 1948. Le nom qui est revenu à
plusieurs reprises est celui de Farid
al-Hajj Yehia, de la ville de Tayibe.
Des témoins qui ont vu ce qui s'est
passé disent qu'ils ont eu la surprise
de voir les colons encercler la zone et
pénétrer dans les appartements. Parmi
eux Elias al-Karaki, 62 ans, qui dit
avoir les documents qui prouvent que son
fils Nabil a vendu il y a sept mois une
maison du quartier Baydoun à un
Palestinien de 48 nommé Farid al-Hajj
Yehia. Il a précisé que la vente a été
finalisée il y a trois mois et le
paiement a été réglé. Karaki a peur que
la vie de sa famille ne devienne un
enfer maintenant que des colons ont
déménagé dans des maisons près de chez
lui.
Ashraf Serhan, dont la famille possède
un immeuble de cinq étages, a dit que
son père a vendu une maison, il y a deux
ans, à une personne de la famille Sbeih
"à condition que la première partie
ait la priorité pour acheter d'abord si
la seconde partie veut vendre plus tard."
Cependant, il a été surpris que les
acheteurs soient des colons. D'après un
rapport cité par un centre d'information
à Jérusalem, un homme
du nom de Hani al-Abbasi a vendu sa
maison à une personne appelée Yousef
Zawahra, qui l'a agrandie et l'a quittée
quelques heures seulement avant
l'arrivée des colons.
Al-Akhbar a appelé le directeur du
Centre d'Information Wadi Hilweh, Jawad
Siam, qui a déclaré qu'il n'y a pas eu
de "vente directe aux colons." Il
pense que les appartements ont été
achetés par l'intermédiaire d'une
société états-unienne fictive appelée
Kendall Finance, ou par l'intermédiaire
de "personnalités qui se cachent
derrière des projets caritatifs."
Toutefois, Khalil al-Tafakji, expert sur
les colonies à
Jérusalem, a dit que les maisons ont été
effectivement vendues "et que celui
qui dit autre chose apporte de quoi
réfuter les documents que j'ai qui
prouvent que les résidents ont vendu
leurs appartements."
Conjointement au battage médiatique qui
a accompagné cet incident, on a accusé
un membre du Mouvement islamique en
Palestine 1948 d'avoir servi
d'intermédiaire pour la vente des
appartements aux colons. Le Mouvement
islamique (branche nord) a cependant
publié une déclaration disant qu'il a la
responsabilité de
Jérusalem et que Farid al-Hajj Yehia n'a
jamais été membre du mouvement et n'a
jamais eu de poste en son sein.
Le Mouvement islamique (branche sud) a
lui aussi publié une déclaration qui
décrit la vente des maisons de Silwan
comme "un crime odieux et une
trahison de Dieu et du pays." La
déclaration laisse entendre que
l'Association Al-Aqsa a congédié al-Haj
Yehia en 2010 et que "les
associations caritatives en ont été
informées par courrier officiel à
l'époque."
Al-Hajj Yehia lui-même a donné des
interviews dans lesquels il a réfuté les
informations qui lui étaient imputées.
Il a dit que l'affaire "a été
exagérée d'une manière insupportable",
et il a souligné qu'il était prêt à
aller à Ramallah pour y être exécuté
pour trahison s'il était prouvé qu'il a
"vendu un pouce de terre
palestinienne à un Israélien." Il a
dit qu'il a acheté une partie d'une
propriété à Silwan "pour éviter
l'effusion de sang (une question de
vengeance) entre les familles Sbeih, al-Yamani
et al-Karaki." Il a cependant admis
que le document de vente dont parle al-Karaki
au sujet de la vente de l'appartement de
son fils Nabil est authentique "mais
j'ai vendu la maison à une personne de
confiance de Umm al-Fahm." Il
continue : "Disons que j'ai vendu
cette maison aux colons, qui a vendu les
autres maisons ?"
Tafakji pense qu'Israël concentre son
attaque sur Silwan pour tenter
d'inverser l'équilibre démographique et
pour régler le problème du "Bassin
sacré" une fois pour toutes "parce
que la ville est située au sud de la
Mosquée al-Aqsa." Israël prétend que
l'histoire juive a commencé il y a 3000
ans dans ce qu'il appelle la Cité de
David, à Silwan.
Selon les informations disponibles, le
nombre de blocs de colonie à Silwan est
jusqu'à maintenant de 27. Ils
comprennent environ 88 unités de
logement qui ont été prises par des
associations de colons, soit en
prétendant qu'elles sont des biens juifs
ou sous le prétexte que c'est une
propriété d'absents ou par vente comme
cela s'est produit récemment ou en
falsifiant des documents. Des excuses
sécuritaires peuvent aussi être avancées
dans le même but.
Siam estime que la plupart des contrats
qui ont été signés par "ceux qui ont
été trompés peuvent être annulé par les
tribunaux." Ceci a été confirmé par
l'avocat Mohammed Dahlah, qui a dit
qu'un certain nombre d'achats réalisés
par l'association de colons Elad ont été
annulés auparavant. Dahlah explique que
la marge de manœuvre juridique est que
les contrats eux-mêmes ne sont pas
valides, "quelqu'un qui n'a pas le
droit de vendre vend, ou le bien est de
propriété publique ou les parts vendues
n'ont pas été divisées entre les
propriétaires." En outre, il existe
parfois un droit de préemption, en
particulier pour ceux qui ont le droit
d'acheter le bien, comme les voisins ou
pour des questions de vie privée.
Siam a dit qu'ils ont proposé plusieurs
projets pour que des institutions et des
partis palestiniens officiels coopèrent
avec des hommes d'affaires pour les
encourager à acheter et à investir dans
l'immobilier à Jérusalem,
ajoutant : "Nous avons demandé au
célèbre homme d'affaires Mounib al-Masri,
il y a plus de 15 ans, qu'il achète de
l'immobilier à Silwan avant qu'il ne
soit acheté en douce par des colons. Son
bureau a répondu que le projet n'avait
pas de faisabilité économique."
Gardez à l'esprit que le budget du
gouvernement palestinien pour 2013
alloué au ministère de Jérusalem
n'est pas supérieur à 50 millions de
shekels (11 millions d'euros).
100€ par jour pour ceux qui
vivent dans les maisons de Silwan
Des colons ont posté sur des réseaux
sociaux une annonce disant que
l'association de colons Elad paierait
500 shekels (100€) par jour à tout colon
qui acceptera de vivre dans les maisons
qui ont été prises à Silwan, à condition
qu'il "sache se servir d'une arme et
tirer." Le quotidien israélien
Ha'aretz a publié un article
révélant que le pourcentage de colons à
Silwan est actuellement de 3,5 pour cent
mais pourrait atteindre 18 pour cent du
nombre total de résidents après la
saisie des derniers appartements
résidentiels.
Mohammad Abu Allan, observateur des
affaires israéliennes, a noté dans un
entretien avec Al-Akhbar la
hausse du budget du service des colonies
au cours des deux derniers mois, de 54
millions de shekels (11 millions 500
d'euros) à 440 millions (93 millions
d'euros). Il a supposé que cette
augmentation est liée au dernier
incident. Et il a souligné l'importance
de ce que le Premier ministre israélien
Benjamin Netanyahou a dit sur Silwan,
que c'est une terre israélienne, et
qu'il n'empêchera aucun Israélien
d'acheter des unités résidentielles
partout où il veut.
Source :
Al Akhbar
Traduction : MR pour
ISM
Publié le 12 octobre
2014 avec l'aimable autorisation d'ISM
Le dossier colonisation
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