Intervention
Infrastructures et vies
détruites sont les exploits
de la Coalition contre Daech
Bachar al-Jaafari
Jeudi 19 avril 2018
Pour mémoire, voici
l’intervention du délégué permanent de
la Syrie auprès des Nations Unies devant
le Conseil de sécurité réuni le 17 avril
2018 [*], à la demande de la Fédération
de Russie, afin d’examiner la situation
humanitaire à Raqqa et au Camp d’Al-Fourkane
occupés par les États-Unis. Mais, il
semble que la Ghouta orientale, libérée
des terroristes par l’Armée arabe
syrienne et ses alliés, n’a pas fini de
nourrir les rancœurs de ladite Coalition
internationale de lutte contre Daech [NdT].
Monsieur le
Président,
Aristote
aurait dit : « Vouloir prouver des
choses qui sont claires d’elles-mêmes,
c’est éclairer le jour avec une lampe »…
Une pensée
qui me ramène à certains de mes
collègues présents dans cette salle,
lesquels se comportent comme si, le
microscope à la main, ils recherchaient
sous leurs objectifs quelques poussières
de vérité par-ci par-là, faisant mine
d’ignorer l’énorme éléphant [fait de
mensonges et de tromperies] qui devrait
symboliser cette session ainsi que les
précédentes.
Un énorme
éléphant correspondant, évidemment, à la
triple agression de mon pays par des
États Membres permanents de ce Conseil
et à l’occupation du tiers de son
territoire par ces trois États
agresseurs et par d’autres ; occupations
sur lesquelles je reviendrai
ultérieurement.
Ma collègue
représentant la déléguée permanente des
États-Unis a fièrement déclaré que les
forces de son pays avaient retiré 3000
engins explosifs à Raqqa. N’aurait-il
pas mieux valu que les forces de son
pays -lesquelles occupaient et occupent
toujours cette ville- exigent la remise
de la carte indiquant l’emplacement de
plus de 10000 de ces engins lorsqu’elles
ont protégé la sortie de 4000 éléments
terroristes de Daech avant de les
déployer sur toute une région s’étendant
du nord de Deir ez-Zor jusque Al-Chaddadi ?
N’aurait-il pas mieux valu que les
forces de son pays exigent cela au lieu
de se vanter, un an et demi après avoir
sorti Daech de Raqqa, d’avoir réussi à
se débarrasser de 3000 engins
explosifs ?
J’aimerais
aussi commencer par m’adresser
succinctement au collègue représentant
le délégué permanent de la Suède, lequel
a cité mon pays 16 fois en sommant le
gouvernement syrien de répondre à telle
ou telle question, sans jamais exiger
que les États-Unis mettent fin à leur
occupation d’une partie de notre
territoire ; sans jamais exiger que la
Turquie et Israël en fassent autant ;
sans jamais demander la condamnation de
la triple agression sur mon pays ce 14
avril ; sans jamais prononcer un seul
mot à propos du terrorisme qui sévit sur
notre sol sous les auspices des États,
que je viens de citer, et des
conciergeries du gaz et du pétrole en
notre région. Autant de points retenus
de vos propos, mon cher collègue !
Quant à notre
collègue français, il a donné beaucoup
d’informations apparemment puisées
auprès de l’organisation d’invention
française, « Médecins sans frontières »,
laquelle est comparable à celle des
« Casques blancs », sauf qu’elle est une
invention des Services de renseignement
britanniques.
En fait,
l’organisation « Médecins sans
frontières » est présente à Raqqa sans
autorisation du gouvernement syrien,
tout comme l’organisation Daech. Des
médecins sans frontières qui sont entrés
en Syrie, à la manière des trafiquants
sans frontières, des criminels sans
frontières, des opposants sans
frontières à la mode d’aujourd’hui, des
agents sans frontières, d’une agression
sans frontières, du terrorisme sans
frontières; l’important étant que
l’ingérence dans les affaires syriennes
soit « sans frontières » pour la pleine
satisfaction du délégué français et des
autres.
Monsieur le
Président,
En réponse
aux diffamations, aux mensonges et à
l’hypocrisie des communiqués de certains
délégués à propos de la mission
d'enquête à Douma, j’aimerais partager
avec vous certaines informations.
Naturellement, elles pourraient étancher
la soif de la déléguée britannique qui
vous a pressés de lui fournir le rapport
de cette mission dans les 24 heures. Je
me dévoue, inutile de la faire
attendre :
-
Je vous avais
précédemment informés que le
gouvernement syrien a facilité toutes
les procédures nécessaires à l'arrivée
de la mission d'enquête en Syrie.
Aujourd’hui même, le groupe onusien est
entré dans Douma à 15 heures pour Damas,
et donc à 8 heures pour New York, afin
d’évaluer la situation sécuritaire sur
place et de commencer son travail dès
demain s’il la juge satisfaisante. En
d’autres termes, la décision d’enquêter
à Douma dépend uniquement de l’équipe
onusienne et de l’OIAC, le gouvernement
syrien ayant fait le nécessaire pour
leur faciliter la tâche.
-
De plus, dès
hier, c'est-à-dire dès son arrivée à
Damas, l'équipe a pu entendre quelques
témoins de la présumée attaque [chimique
à Douma] ; ce qui signifie qu’elle a
déjà commencé à travailler et que toutes
les rumeurs et tous les mensonges que
vous avez entendus ne visent qu’à
défigurer sa mission et à couvrir
l’agression sur la Syrie.
Monsieur le
Président,
Cette réunion
se tient le jour de la Fête nationale
syrienne, la Fête de l’Indépendance
suite à l'expulsion du colonialisme
français le 17 avril 1946 et, nous
regrettons d’avoir à dire que certains
États -dont la France et ceux qui ont
lancé leur lâche agression sur la Syrie
le 14 avril courant- n'ont pas encore
compris que la volonté de liberté et
d’indépendance est désormais solidement
ancrée chez tous les peuples et que les
époques de leur domination hégémonique
font partie d’un passé lointain.
Les
tentatives d’un retour en arrière ne
réussiront pas, quelle que soit la
taille de leurs navires de guerre, de
leurs avions et de leurs missiles
« beaux, nouveaux et intelligents »,
quelle que soit la sévérité de leurs
menaces ou l’étendue de leur soutien au
terrorisme et aux groupes armés, sous
n’importe quel prétexte. Les peuples de
toute la planète en ont assez de leur
mépris des principes de la Charte des
Nations et de leurs violations du Droit
international sans jamais avoir à en
rendre compte à quiconque.
La délégation de mon pays remercie
la délégation de la Fédération de Russie
pour avoir convoqué cette réunion afin
de discuter de la situation à Raqqa,
cette ville martyre complètement
détruite par les forces américaines et
leur prétendue coalition de lutte contre
le terrorisme.
Ici, je ne compte pas informer les
membres de ce Conseil sur la situation
catastrophique de cette ville à partir
d’une évaluation de la République arabe
syrienne, mais des conclusions de la
mission d'évaluation des Nations Unies
dont le Ministère syrien des Affaires
étrangères et des Émigrés a reçu la
copie officielle, le 4 avril courant,
via le Coordonnateur des Nations Unies
résidant à Damas. Je cite : « La ville
de Raqqa est face à une situation
critique nécessitant sa reconstruction
totale ainsi que la restructuration de
l'administration et de l'ensemble des
services publics à partir de zéro ». Fin
de citation.
Telle est
l’évaluation des Nations Unies, non
celle de « Médecins sans frontières » ou
de clowns sans frontières !
Quant à
l’ampleur des destructions, je me réfère
ici à quelques conclusions de l’équipe
onusienne rendue à Raqqa :
-
Tous les
bâtiments sont totalement ou
partiellement détruits ; autrement dit,
Raqqa n’est pas détruite à 70 ou 80 %,
mais à 100 %.
-
La population
estimée à environ 300 000 habitants
avant la crise n’en compte plus que 7000
depuis la fin des attaques de ladite
Coalition ; ce qui signifie qu’ils ont
dégagé 4000 daechistes mais ont aussi
fait sortir ses 300 000 résidants.
-
Il n’y a plus
aucun service public ou de premières
nécessités : pas d’eau, pas
d'électricité, pas de couverture de
téléphonie mobile.
-
Tous les hôpitaux
et dispensaires sont détruits. Il n'y a
actuellement aucun hôpital opérationnel
dans la ville, abstraction faite desdits
« Médecins sans frontières » !
Ce qui s'est
passé à Raqqa est un exemple de crimes
parmi d’autres crimes commis par la
prétendue Coalition internationale menée
par les États-Unis contre Daech.
Une coalition
qui n’a jamais eu pour but la lutte
contre le terrorisme, mais le but de
saper la souveraineté, l'unité et
l'intégrité territoriale de mon pays, de
tenter d'affaiblir les Forces de l'Armée
arabe syrienne et de ses alliés face aux
groupes terroristes.
Une coalition
dont les seuls vrais exploits ont
consisté à ôter la vie à des milliers de
civils innocents par les plus terribles
des armes, dont des armes incendiaires,
et à détruire les infrastructures
syriennes, dont des barrages, des ponts,
des hôpitaux, des écoles, des
institutions et des installations visant
le développement du peuple syrien et ses
ressources indispensables à la
reconstruction du pays, à commencer par
les puits et les installations
pétro-gazières, ainsi que le personnel
chargé de leur entretien.
Ici, je me
contenterai de rappeler quelques
exemples de massacres de civils, tels
ceux commis à Al-Mayadeen et
Al-Boukamal, mi-mai 2017 ; à Al-Sour
ainsi que dans les deux villages
d’Al-Dablane et de Zibane près de
Deir-Zor, fin juin 2017 ; dans la région
de Tal al-Chayer, le 19 juin 2017 ; dans
le village d’Al-Zayanate, le 4 juillet
2017 ; dans le village d’Al-Kachkach au
sud de Hassaké, le 12 juillet 2017 ;
dans les villages d'Al-Chaf’a et de
Zahret Alouni, le 25 février 2018 ; et
dans le village d'Al-Bahra, le 20
février 2018.
Toujours pour
exemple, la meilleure preuve que le but
de cette coalition illégitime n'a jamais
été de combattre le terrorisme, mais de
faire obstacle à l'Armée arabe syrienne
et à ses alliés dans leur guerre
ininterrompue contre l'organisation
terroriste Daech, est l’attaque aérienne
menée contre l'Armée arabe syrienne sur
le Mont al-Tharda à Deir ez-Zor, le 17
septembre 2016. Vous devez tous vous
souvenir de ce qui s’est passé ce jour
là.
Ce qui s’est
passé est que les avions américains de
ladite coalition tentaient d’assurer un
passage sécurisé aux éléments de Daech
entre les territoires syrien et
irakien ; tout comme ce fût le cas lors
de l’attaque du 8 Février 2018 ayant tué
des dizaines de combattants parmi les
Forces populaires supplétives de l’Armée
syrienne, en pleine bataille contre
Daech sur la rive Est de l'Euphrate.
Ladite
coalition a non seulement attaqué les
Forces de l'armée arabe syrienne, mais
elle a aussi soutenu et protégé les
reliquats de l’organisation terroriste
Daech en leur permettant de sortir, en
toute sécurité, de Raqqa et de Deir
ez-Zor, la plupart étant des terroristes
venus de l’étranger. Ce faisant, elle
leur a permis de revenir attaquer
l’Armée syrienne et ses alliés à Deir
ez-Zor.
C’est ainsi
que les États-Unis ont sauvé les
reliquats de Daech de leur destin
inévitable face à l’Armée syrienne et à
ses alliés, afin qu’ils puissent
continuer à semer la terreur tout le
long de la bande frontalière
syro-irakienne. Et, les États-Unis, la
France et la Grande-Bretagne ont
couronné le tout par leur triple
agression à l'aube de ce samedi 14
avril, avec la participation de l'Arabie
Saoudite, du Qatar et d’Israël pour se
venger de l'Armée syrienne, suite à la
défaite des bras armés terroristes de
leurs gouvernements respectifs dans la
Ghouta orientale.
Monsieur le
Président,
Discuter des
conditions humanitaires tragiques
provoquées par cette coalition
illégitime à Raqqa, amène à discuter de
ce qui se passe dans le « camp d’Al-Roukbane ».
Ici, j’affirme que le gouvernement
syrien avait accepté d’y acheminer
l’aide humanitaire en coopération avec
la Croix-Rouge internationale et le
Croissant rouge arabe syrien ; mais les
forces américaines présentes dans ce
camp l’en ont empêché et lui ont posé
des conditions impossibles à satisfaire.
Les
États-Unis sont responsables de la
situation catastrophique dans ce camp et
nous affirmons que la principale raison
de leur positionnement est de
l’exploiter militairement, pour
entraîner les reliquats de Daech et
d’autres organisations terroristes en
vue de leurs futures batailles contre la
Syrie, l'Irak, la Libye et d'autres pays
de la région et du monde.
Pour terminer
Monsieur le Président,
Je reparle de
l’éléphant du début de mon
intervention : la scène politique
syrienne est claire et ne nécessite ni
projets de résolutions, ni nouveaux
mécanismes, ni réunions
quasi-quotidiennes sous divers titres,
mais nécessite plutôt que le Conseil de
sécurité remplisse son mandat
conformément aux dispositions de sa
Charte en s’opposant aux occupations
américaine, turque et israélienne de
notre territoire, ainsi qu’aux États qui
soutiennent le terrorisme et imposent
des mesures coercitives unilatérales au
peuple syrien, afin que des millions de
Syriens ne deviennent pas des réfugiés
et des déplacés, comme l'ont dit
certains collègues.
En effet, ce
conseil ne peut se résoudre à dépendre
de l’envie des gouvernements des
États-Unis, de la Grande-Bretagne et de
la France de faire de cette organisation
une organisation des Nations Désunies ou
des seules Nations unies par la
violation des dispositions de sa Charte,
l’invasion des pays, l’ingérence dans
leurs affaires intérieures, les
tentatives de changement de leurs
régimes par la force, les agressions
répétées, la destruction des peuples et
de leurs civilisations.
Veuillez
m’excuser si j’ai été long, Monsieur le
Président.
Je vous
remercie.
Dr Bachar
al-Jaafari
Délégué
permanent de la Syrie auprès des Nations
Unies
17/04/2018
Transcription et traduction par Mouna
Alno-Nakhal
Source :
The Syrian Mission to the United Nations
https://www.youtube.com/watch?v=9eW0CgODD1E
[*] Nouvelle
passe d’armes au Conseil de sécurité
entre la Fédération de Russie
et les pays occidentaux à propos de la
situation humanitaire en Syrie
https://www.un.org/press/fr/2018/cs13302.doc.htm
Le sommaire de Mouna Alno-Nakhal
Le
dossier Syrie
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