L'art de la guerre
Bannière USA sur l’Europe
Manlio Dinucci
Mardi 9 février 2016
Participant (comme il est désormais de
mise) à la rencontre des ministres de la
défense Ue le 5 février à Amsterdam, le
secrétaire général de l’Otan Jens
Stoltenberg a fait l’éloge du « plan des
Etats-Unis d’accroître substantiellement
leur présence militaire en Europe, en
quadruplant les financements à cet
effet ». Les USA peuvent ainsi
« conserver plus de troupes dans la
partie orientale de l’Alliance, y
pré-positionner des armements lourds, y
effectuer plus d’exercices et y
construire plus d’infrastructures ». De
cette façon, selon Stoltenberg, « se
renforce la coopération Ue-Otan ».
Tout autre objectif. Immédiatement après la fin de la guerre froide, en
1992, Washington soulignait la
« fondamentale importance de préserver
l’Otan comme canal de l’influence et
participation étasuniennes dans les
affaires européennes, en empêchant la
création de dispositifs uniquement
européens qui mineraient la structure de
commandement de l’Alliance », à savoir
le commandement USA.
Mission accomplie : 22 des 28 pays de l’Ue, avec plus de 90% de la
population de l’Union, font aujourd’hui
partie de l’Otan toujours sous
commandement USA, reconnue par l’Ue
comme « fondement de la défense
collective ». Faisant pression sur les
gouvernements de l’Est, liés davantage
aux USA qu’à l’Ue, Washington a rouvert
le front oriental avec une nouvelle
guerre froide, brisant les liens
économiques croissants Russie-Ue
dangereux pour les intérêts étasuniens.
Dans toute l’Europe orientale flotte, sur le plus haut pennon, la
bannière étoilée avec celle de l’Otan.
En Pologne, la nouvelle premier ministre
Beata Szydlo a, dans ses conférences de
presse, amené le drapeau de l’Ue,
souvent brûlé sur les places par les
« patriotes » qui soutiennent le
gouvernement dans son refus d’accueillir
les réfugiés (fruit des guerres
USA/Otan), qualifiés d’« envahisseurs
non-blancs ». Dans l’attente du Sommet
Otan, qui se tiendra à Varsovie en
juillet, la Pologne crée une brigade
conjointe de 4mille hommes avec la
Lituanie et l’Ukraine (de fait déjà dans
l’Otan), entraînée par les USA. En
Estonie le gouvernement annonce « une
aire Schengen militaire », qui permet
aux forces USA/Otan d’entrer librement
dans le pays. Sur le front méridional,
relié à celui oriental, les Etats-Unis
sont sur le point de lancer depuis
l’Europe une nouvelle guerre en Libye
pour occuper, sous prétexte de les
libérer de l’Isis, les zones côtières
économiquement et stratégiquement les
plus importantes.
Un coup pour regagner du terrain, après qu’en Syrie l’intervention russe
en soutien des forces gouvernementales a
bloqué le plan USA/Otan de démolir cet
Etat en utilisant, comme en Libye en
2011, des groupes islamistes armés et
entraînés par la Cia, financés par
l’Arabie Saoudite, soutenus par la
Turquie et d’autres.
L’opération en Libye « sous conduite italienne » -qui, prévient le
Pentagone, requiert des « boots on the
ground », c’est-à-dire des forces
terrestres- a été faite dans un accord
des Etats-Unis avec non pas
l’Union européenne, inexistante sur ce
plan en tant que sujet unitaire, mais
individuellement avec les puissances
européennes dominantes, surtout France,
Grande-Bretagne et Allemagne. Puissances
qui, en concurrence entre elles et avec
les Etats-Unis, s’unissent quand entrent
en jeu des intérêts fondamentaux.
Emblématique ce qui a émergé des emails de Hilary Clinton, secrétaire
d’Etat en 2011 : Usa et France
attaquèrent la Libye avant tout pour
bloquer « le plan de Kadhafi d’utiliser
les énormes réserves libyennes d’or et
d’argent pour créer une monnaie
africaine alternative au franc CFA »,
devise imposée par la France à ses 14 ex
colonies.
Le plan libyen (démontrions-nous sur il manifesto en avril 2011)
visait au-delà, à libérer l’Afrique de
la domination du FMI et de la Banque
mondiale. C’est pour cela que fut
démolie la Libye, où les mêmes
puissances se préparent maintenant à
débarquer pour rapporter « la paix ».
Edition de mardi 9 février 2015 de il
manifesto
http://ilmanifesto.info/bandiera-usa-sulleuropa/
Traduit de l’italien par Marie-Ange
Patrizio
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