LUC MICHEL’S
GEOPOLITICAL DAILY
Vers un séisme géopolitique dans l'Union
européenne (III) : l'influence de la
Catalogne sur les referenda de Lombardie
et Vénétie en Italie
Luc Michel
Mardi 31 octobre 2017
LUC MICHEL (ЛЮК
МИШЕЛЬ) & EODE/
Luc MICHEL pour
EODE/
Flash géopolitique
– Geopolitical Daily/
2017 10 31/ J’ai écrit dans une
précédente analyse (21 oct. 2017) que la
crise catalane avait lancé un processus
irréversible. Et peu importe que
Barcelone obtienne ou pas son
indépendance cette fois. J’ai parlé de «
bombe géopolitique à retardement ». Les
médias de l’UE (qui sont ceux de l’OTAN)
nous disent inlassablement que « le
gouvernement catalan est isolé ».
Ce n’est pas vrai
en Belgique, où les nationalistes
flamands dominent la majorité et le
gouvernement fédéral (voir mes nombreux
éditos à ce sujet). Mais ce n’est pas
vrai non plus ailleurs où des forces
indépendantistes puissantes existent :
Italie du Nord, Ecosse ou encore la
Corse en France …
ITALIE: LE DESIR
D’INDEPENDANCE CATALANE EST-IL
CONTAGIEUX ?
La Lombarie et la
Vénitie organisaient un référendum le 22
octobre 2017 pour réclamer davantage
d'autonomie à Rome :
« Souhaitez-vous que votre région
dispose de « formes supplémentaires et
conditions particulières d’autonomie » ?
» C’est à cette question que les
électeurs étaient appelés à répondre.
Les médias de
l’OTAN nous répétaient inlassablement
que « rien n’était moins sur » qu’une
victoire autonomiste, qu’il s’agissait «
d’un référendum pour rien » (Le Monde ou
Le Point) ou que le référendum catalan
n’aurait pas d’influence. Les sondages
donnaient pourtant une nette avance au
oui, mais la vraie inconnue restait la
participation. Alors que l’Espagne est
dans toutes les têtes, Nicola Lupo,
professeur de droit constitutionnel à
l’université Luiss de Rome,
inlassablement cité dans les dits
médias, jugeait que « les similarités
avec la Catalogne sont minimes, le
sentiment indépendantiste n’étant pas
très diffusé » dans les deux régions.
La Lombardie et la
Vénitie représentent 30 % du pays PIB du
pays.
Ces deux régions
parmi les plus riches d’Italie
représentent 30 % du PIB du pays. Elles
figurent aussi parmi les plus «
vertueuses » en termes d’endettement, de
dépenses publiques par habitant et du
fonctionnement du système de santé.
Porté par la Ligue
du Nord, le scrutin est soutenu par
Forza Italia de Silvio Berlusconi
(centre-droit), le Mouvement Cinq
étoiles (populiste) et plusieurs
syndicats et organisations patronales.
Le Parti démocrate (centre-gauche, au
pouvoir) n’a pas donné de consigne, mais
plusieurs de ses ténors, comme le maire
de Milan, voteront oui. Contrairement à
la Catalogne, ce référendum consultatif
est prévu par la Constitution italienne.
"Je pense que le monde entrepreneurial
votera en nombre, et pour le oui",
estimait le président régional de
l'association des artisans
(Confartigiato), Agostino Bonomo. Il
espérait que « l'autonomie profitera aux
entreprises, en permettant de récupérer
des ressources et en créant des juges de
paix locaux plus rapides ».
En Vénétie, la
participation devait dépasser les 50 %
pour que le scrutin soit valide. Les
habitants de cette région, où l’identité
est forte et le tissu économique composé
de multiples petites entreprises,
semblent mobilisés. En Lombardie, en
revanche, le scrutin passionne moins,
même si Milan est couverte d’affiches.
Aucun quorum n’était prévu : Roberto
Maroni assure qu’une participation
supérieure à 34 % serait un succès, mais
ses adversaires du PD jugent qu’en
dessous de 50 %, le scrutin sera un «
flop ».
AUTONOMIE: APRES
L'ESPAGNE, L'ITALIE !
MALGRE LES
(FAUSSES) PREVISIONS ORIENTEES, LES
AUTONOMISTES L'EMPORTENT LARGEMENT AU
REFERENDUM EN VENETIE ET EN LOMBARDIE
Longtemps passé
inaperçu, ces deux referenda ont pris
une teinte particulière après le vote
d'autodétermination de la Catalogne.
Les vrais indépendantistes,
minoritaires, soutenaient le référendum,
qu'ils voient, avec raison (et c’est
aussi mon analyse) « comme un galop
d'essai, même si l'autonomie est pour
eux vouée à l'échec, car l'Etat,
assurent-ils, ne cèdera pas aux
revendications notamment fiscales ».
Les riches régions
italiennes de la Vénétie et de la
Lombardie ont pourtant voté ce 22
octobre à une écrasante majorité en
faveur d’une plus grande autonomie, avec
une participation suffisamment
importante pour leur donner un pouvoir
de négociation face à Rome. Malgré
toutes les déclarations
anti-autonomistes, ce scrutin
consultatif a pris une teinte
particulière après le vote
d’autodétermination de la Catalogne,
même si ses organisateurs ont répété
dimanche soir que « leur démarche
restait pleinement dans le cadre de
l’unité italienne ». Selon les chiffres
quasi définitifs, les électeurs ont voté
à 95% en faveur du oui en Lombardie et à
98% en Vénétie, une région à l’identité
forte, autour de Venise, qui a été
indépendante pendant un millénaire. La
participation était elle estimée à
respectivement quelque 40% et 57%. Le
président de la Lombardie, Roberto
Maroni, avait indiqué qu’une
participation supérieure à 34 % serait
un succès. Luca Zaia, le président de la
Vénétie, où le scrutin n’était valide
que si un quorum de 50 % était dépassé,
a évoqué un « beau résultat », avec «
plus de deux millions » d’habitants qui
se sont rendus aux urnes. Roberto Maroni
a pour sa part insisté sur les « 3
millions de Lombards » qui sont allés
voter.
A noter que la
transmission des résultats a été
affectée par une attaque informatique en
Vénétie qui a retardé la publication des
chiffres définitifs. « Nous avons trois
niveaux de sécurité, les hackers en ont
atteint deux. Pour le moment, nous
sommes un peu bloqués, nous téléphonons
à chaque commune… », a déclaré Luca
Zaia. En Lombardie en revanche, où l’on
votait pour la première fois sur des
tablettes, Roberto Maroni a assuré que
le système avait fonctionné.
Les électeurs
devaient dire s’ils souhaitaient que
leur région dispose de « formes
supplémentaires et conditions
particulières d’autonomie », selon la
formule inscrite dans la Constitution.
La nature et l’ampleur de cette
autonomie doivent désormais être
négociées avec Rome et validée par le
Parlement.
« Je suis heureux
que des (…) millions, d’électeurs de
Vénétie et de Lombardie demandent une
politique plus proche, plus concrète et
efficace, moins de bureaucratie et de
gâchis », a déclaré pour sa part Matteo
Salvini, le leader de la Ligue du Nord,
parti au pouvoir dans les deux régions
et promoteur du référendum.
L’AUTONOMIE : UNE
MEILLEURE GESTION DES FONDS PUBLICS DONC
, MAIS PAS (ENCORE ?) D’INDEPENDANCE
Lombardie et
Vénétie présentent à elles deux un solde
fiscal -différence entre ce que les
habitants versent comme taxes et impôts
et reçoivent comme dépenses publiques-
de quelque 70 milliards d’euros.
Une somme colossale dont les
présidents des régions Lombardie,
Roberto Maroni, et Vénétie, Luca Zaia,
membres de la Ligue du Nord (droite
autonomiste, qui réclamait à ses débuts
« une République de Padanie »),
entendent réclamer la moitié à Rome si
les électeurs sont assez nombreux à
voter oui. Ils estiment en effet que cet
argent est mal utilisé par Rome et
pourrait l’être de manière beaucoup plus
efficace, y compris via des partenariats
entre régions. Ils comptent aussi
obtenir des compétences supplémentaires
dans les infrastructures, la santé ou
encore l’éducation, et même des pouvoirs
réservés à l’État en matière de sécurité
et d’immigration, thèmes chers à la
Ligue mais qui nécessiteraient une
modification de la Constitution.
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