Le Saker
L’immense nouvel accord commercial dont
les médias occidentaux ne veulent pas
entendre parler
Moon of Alabama
Lundi 16 novembre 2020 Par Moon of Alabama
− Le 14 novembre 2020
Demain, un
nouvel accord commercial entre quinze
États asiatiques sera signé. Il sera
bientôt considérée comme un jalon dans
l’histoire économique mondiale. Mais
très peu de médias «occidentaux» ont
pris note de l’accord, et des énormes
conséquences qu’il aura.
L’accord est
également une énorme
victoire pour la Chine face à
l’hégémonie américaine en Asie :
Quinze pays
d’Asie-Pacifique, dont la Chine et le
Japon, prévoient de signer ce week-end
le plus grand accord de libre-échange au
monde. L'accord réduira les tarifs,
renforcera les chaînes
d'approvisionnement avec des règles
d'origine communes et codifiera de
nouvelles règles sur le commerce
électronique.Le Partenariat
économique régional global (RCEP)
devrait être annoncé lors du sommet de
l'Association des nations de l'Asie du
Sud-Est (ASEAN), que le Vietnam
accueille virtuellement. Il
impliquera les dix États membres du bloc
ASEAN - Brunei, Cambodge, Indonésie,
Laos, Malaisie, Myanmar, Philippines,
Singapour, Thaïlande et Vietnam - ainsi
que leurs partenaires commerciaux
Australie, Chine, Japon,
Nouvelle-Zélande et Corée du Sud.
Le nouveau bloc
économique représentera ainsi environ un
tiers du produit intérieur brut et de la
population mondiale.
Il deviendra le
tout premier accord de libre-échange à
inclure la Chine, le Japon et la Corée
du Sud - les première, deuxième et
quatrième économies d’Asie.
Les économies des
membres du RCEP croissent plus
rapidement que celles du reste du monde.
L’accord devrait accélérer leur
croissance.
L’Inde est le seul
pays qui a été invité mais qui manque à
l’accord. Son régime hindou-fasciste
dirigé par Modi avait parié sur
l’initiative anti-chinoise
QUAD menée par les États-Unis et
réclamée par Trump et Pompeo et a ainsi
perdu en termes commerciaux :
Les
remarques du Premier ministre
Narendra Modi lors du 17e
sommet ASEAN-Inde, le 12 novembre, sont
tristes à lire. Elles s'inscrivent dans
le contexte spécifique de la signature
du Partenariat économique régional
global [RCEP] dimanche - le méga accord
de libre-échange centré sur l'ASEAN plus
la Chine, le Japon et la Corée du Sud.Modi a évité de
mentionner le RCEP, bien que cela
représente une occasion réjouissante
dans la vie de l’ASEAN autant que
Diwali l’est pour un Indien. Il a
plutôt pris des détours - «Make in India»,
«Act East Policy», «Indo-Pacific Oceans
Initiative», «ASEAN centrality». ...
Certes, le RCEP
annonce l'aube d'une nouvelle chaîne
d'approvisionnement régionale post-Covid.
Alors qu'une nouvelle chaîne
d'approvisionnement du RCEP prend forme,
l'Inde s'est non seulement exclue, mais
elle aide involontairement son «ennemi
juré» à devenir le principal moteur de
la croissance en Asie-Pacifique.
En revanche, les
liens économiques extra-régionaux
cessent d'être une priorité pour
l'ASEAN, en importance relative. Il
n’y aura pas de preneurs dans la région
Asie-Pacifique, même pour un
«découplage» partiel entre les
États-Unis et la Chine. Le RCEP est
en réalité une initiative dirigée par
l’ASEAN, qui repose sur les six membres
de l'ASEAN + 1 et qui assure la position
de l’ASEAN au cœur des institutions
économiques régionales.
Le pivot américain
vers l’Asie, lancé sous l’administration
Obama, ainsi que les initiatives de
« découplage » anti-chinoises de
l’administration Trump ont ainsi échoué.
On aurait pu
s’attendre à ce qu’un accord commercial
aussi gigantesque avec ses vastes
conséquences géopolitiques trouve un
écho dans les médias américains. Mais
une recherche du terme ‘RCEP’ sur le
site du New York Times ne
trouve qu’une seule mention en 2017.
Il s’agit d’une lettre que cinq
ambassadeurs américains avaient envoyée
pour mettre en garde contre la
disparition de l’accord commercial trans-pacifique,
une initiative d’Obama qui excluait la
Chine :
Le partenariat,
appelé le PTP, était une caractéristique
de l'administration Obama. Il aurait été
l’un des accords commerciaux les plus
importants de l’histoire, couvrant
environ 40% de l’économie mondiale et
établissant de nouvelles conditions et
normes commerciales pour les États-Unis
et 11 autres pays riverains du
Pacifique. La Chine n'était pas incluse
mais aurait pu y adhérer. ...Dans leur lettre,
les ambassadeurs préviennent que
«l'abandon du PTP peut être perçu par
les générations futures comme le moment
où l'Amérique a choisi de céder le
leadership à d'autres dans cette partie
du monde et d'accepter un rôle réduit».
«Un tel résultat
serait un motif de réjouissance pour
ceux qui sont en faveur de 'l’Asie pour
les Asiatiques' et du capitalisme
d’État», est-il ajouté.
Les ambassadeurs
avaient raison. Mais les politiques
nationales américaines – et la
résistance à la « libéralisation » des
pays asiatiques – n’ont pas permis qu’un
tel accord se produise :
La course
présidentielle de 2016 a été façonnée
par les tendances anti-mondialisation.
Donald J. Trump avait promis de détruire
le pacte s'il devenait président.
Hillary Clinton l'a également dénoncé,
même si elle en a soutenu une forme en
tant que secrétaire d'État.Le sénateur Mitch
McConnell, républicain du Kentucky et
chef de la majorité, a déclaré après les
élections de novembre que le Congrès ne
le reprendrait pas. Cela signifiait
qu'il était mort.
Le RCEP est moins
controversé en Asie que le PTP,
centré sur les États-Unis, ne l’aurait
été :
Contrairement au
PTP, ou Partenariat trans-pacifique, et
à d'autres accords commerciaux dirigés
par les États-Unis, le RCEP n'oblige pas
ses membres à prendre des mesures pour
libéraliser leurs économies et protéger
le droit du travail, les normes
environnementales et la propriété
intellectuelle. Le secrétaire américain
au Commerce, Wilbur Ross, l'a qualifié
de «traité de très bas niveau» qui n'a
pas la portée du PTP. Mais la mise en
œuvre imminente du RCEP illustre la
diminution de l'influence des États-Unis
et pourrait rendre plus difficile la
concurrence pour les entreprises
américaines dans cette vaste région.
Bien qu’il ait
moins de réglementations et d’exigences
de « libéralisation » que ce que les
États-Unis voulaient refiler dans
l’accord PTP, le RCEP est encore
suffisamment
complet pour avoir des effets
énormes :
Le ministre
malaisien du Commerce, Azmin Ali, qui a
déclaré aux journalistes que l'accord
serait signé dimanche, l'a qualifié
d'aboutissement de «huit années de
négociations dans le sang, la sueur et
les larmes».Proposé pour la
première fois en 2011, le RCEP
éliminera jusqu'à 90% des droits de
douane sur les importations entre ses
signataires d'ici 20 ans, et l'accord
entrera en vigueur au début de l'année
prochaine. Il établira également des
règles communes pour le commerce
électronique, les échanges et la
propriété intellectuelle.
"La Chine a réussi
un coup d'État diplomatique en poussant
le RCEP sur la ligne d'arrivée", a
déclaré à Bloomberg Shaun Roache,
économiste en chef pour l'Asie-Pacifique
chez S&P Global Ratings. «Bien que le
RCEP soit peu profond, du moins par
rapport au PTP, il est très étendu,
couvrant de nombreuses économies et
biens, et c'est une rareté en ces temps
plutôt protectionnistes.»
Les pays asiatiques
feront désormais de préférence des
échanges avec d’autres pays asiatiques
et tous les pays non asiatiques devront
commercer avec eux uniquement à des
conditions secondaires.
Pourtant, une
nouvelle recherche révèle que la
prochaine signature du RCEP n’a reçu
qu’une
brève mention sur CNBC, un
explicatif de Bloomberg et un court
article de Reuters.
Il semble que les
médias américains soient mécontents de
rapporter une victoire aussi importante
pour la Chine et la disparition de la
position américaine dans le monde.
Moon of Alabama
Note du Saker
Francophone
Pour le monde
francophone, seul le quotidien
La Croix en parle et de manière
factuelle reprenant presque l'analyse de
Moa. Les autres "médias" préfèrent sans
doute nous mésinformer à défaut de nous
désinformer.
Traduit par jj,
relu par Wayan pour le Saker Francophone
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