Au lieu d’appels au calme, un
euphémisme pour la soumission
palestinienne, il faudrait
plutôt redonner un véritable
espoir de liberté aux
Palestiniens par des mesures de
justice crédibles et efficaces.
Le gouvernement israélien ne
veut pas leur laisser le moindre
espoir et l’Autorité
palestinienne n’en a pas les
moyens.
Le Premier ministre
israélien, Benjamin Netanyahu, a
promis lors de sa campagne de
réélection qu’il n’y aurait
jamais d’Etat palestinien
indépendant pendant son mandat,
tandis que le président
palestinien Mahmoud Abbas, après
avoir promis qu’il allait
larguer une « bombe » lors de
son discours à l’Assemblée
générale de l’ONU le mois
dernier, a, au contraire, lâché
un pétard mouillé. Ceux qui ont
vécu toute leur la vie sous
l’égide d’un « processus de
paix » destiné à maintenir le
statu quo qui se traduit par un
projet de colonisation
métastasant qui dévore leurs
terres, et une infinité
d’humiliations quotidiennes, ont
bien des raisons de désespérer.
On peut énumérer de nombreux
obstacles à la « paix »
israélo-palestinien, mais
l’obstacle le plus important à
la fin de l’occupation qui est
maintenant dans sa 49e année,
est tout simplement la nature
humaine. Les gens acceptent
rarement de voir leur vie
changer de manière
significative, sauf s’ils
croient que ce changement va
améliorer grandement la qualité
de leur vie.
Comment les Israéliens juifs
peuvent-ils être amenés à penser
que la fin de l’occupation
améliorera leur qualité de vie ?
Ces dernières années, les
Israéliens juifs ont, tout
naturellement et avec raison,
considéré le statut quo comme le
meilleur des mondes possibles.
Ils ont joui de la paix, de la
prospérité, du soutien
économique et militaire
indéfectible de l’Occident et de
la protection diplomatique
américaine inconditionnelle,
alors que les Palestiniens, hors
de vue et loin des pensées,
enduraient l’occupation,
l’oppression, l’appauvrissement
et la violence fréquente, et
souvent mortelle, de l’armée
israélienne et des colons
israéliens.
La situation confortable dont
jouissaient les Israéliens
juifs, du fait que l’occupation
ne leur coûtait pratiquement
rien et ne leur causait aucun
souci, doit changer. Elle peut
changer de deux manières, soit
grâce à la pression économique
et politique non violente du
monde occidental, soit du fait
de l’insécurité violente générée
par le peuple palestinien
occupé.
Les Etats européens
pourraient imposer de fortes
sanctions économiques à Israël
jusqu’à ce qu’il respecte le
droit international et les
résolutions de l’ONU et se
retire complètement de la
Palestine occupée. Les Etats
européens pourraient aussi
appliquer des règles strictes de
visa à tous les Israéliens qui
veulent venir en Europe, les
obligeant à fournir la preuve
claire et documentée qu’ils ne
vivent, ni ne travaillent, en
Palestine occupée.
Si l’on en juge par les
années que l’Union européenne a
passé à s’angoisser sur
l’étiquetage correct des
produits des colonies illégales
vendus en Europe, on ne peut
guère espérer que les
politiciens européens trouvent
bientôt intérêt à jouer un tel
rôle principiel non-violent et
constructif.
Malheureusement, cela nous
laisse seulement avec l’option
de l’insécurité violente. Il est
hors de question d’encourager la
violence contre les civils, et
on ne peut qu’espérer que les
violences soient limitées et
qu’elles aient des résultats
constructifs. La violence
« couteaux-et-tournevis » de
basse technologie actuelle, qui
engendre beaucoup de peur et
d’anxiété mais fait relativement
peu de victimes israéliennes
juives, est peut-être, de toutes
les violences capables de
produire le changement
nécessaire dans la perception
des Juifs israéliens de leurs
propre intérêt, celle qui est la
plus efficace et la moins
dangereuse.
Si ces attaques, apparemment
aléatoires et imprévisibles,
contre les Israéliens juifs
devaient se poursuivre sur une
longue période de temps, elles
pourraient bien pousser un
nombre significatif de Juifs
israéliens à en conclure que
l’occupation et l’oppression
perpétuelle ne sont pas le
meilleur des mondes possibles
pour eux non plus et que leur
qualité de vie serait meilleure
s’ils mettaient fin à
l’occupation et permettaient au
peuple palestinien de jouir de
la même liberté et de la même
dignité humaine - que ce soit
dans deux états ou dans un seul
- que les Israéliens juifs
exigent pour eux-mêmes.
Il est bien triste d’être
obligé de se rendre à l’évidence
que tant que des vies juives ne
sont pas menacées, les
Israéliens juifs et le monde
occidental ont tendance à penser
que l’occupation n’est pas un
problème. Maintenant que des
Juifs - et bien plus encore de
Palestiniens - ont perdu la vie,
et que tout laisse à penser que
d’autres la perdront dans les
semaines qui viennent, il faut
absolument profiter de
l’attention du monde entier pour
promouvoir une nouvelle
perception du futur, afin que
toutes ces vies n’aient pas été
perdues pour rien.
Si la violence actuelle se
poursuit assez longtemps pour
être considérée comme une
« Intifada », il faudra lui
donner le nom de « Intifada des
enfants ». Désespérant de jamais
jouir d’une vie qui ait un sens,
les jeunes et même les enfants
choisissent, de leur propre
initiative, de rechercher ce
qu’ils perçoivent comme une mort
qui a un sens. Ce désespoir
tragique ne peut être dissipé
que par l’espoir.
Quand la violence se
terminera, cela ne doit pas être
parce que le peuple palestinien
a été forcé de retourner dans sa
cage et de se rabattre sur un
« processus de paix » frauduleux
qui ne mène nulle part. Cela
doit être parce que les jeunes
Palestiniens ont enfin des
raisons, crédibles et
authentiques, d’espérer qu’ils
seront bientôt libres et traités
avec justice.
John V. Whitbeck
est un homme de loi d’envergure
internationale qui a conseillé
l’équipe de négociation
palestinienne dans les
négociations avec Israël.
Traduction : Dominique
Muselet