RussEurope
Grèce: des élections pour rien?
Jacques Sapir
© Jacques
Sapir
Mardi 22 septembre 2015
Les élections de dimanche 20
septembre en Grèce ont vu un nouveau
succès de SYRISA et d’Alexis Tsipras.
Mais ce succès laisse un arrière-goût
amer. Certes, en pourcentage des voix,
Tsipras semble avoir remporté son pari.
La gauche de SYRIZA, qui avait quitté le
parti à la suite de la capitulation du
13 juillet 2015 ne sera pas présente au
Parlement. Pourtant, les résultats sont
inquiétants à plus d’un égard. Ainsi,
l’abstention a progressé de 7% par
rapport aux élections de janvier 2015.
La fuite des électeurs hors des partis
ayant accepté les conditions iniques de
Bruxelles est impressionnante. Syriza
perd 14% de ses électeurs, la Nouvelle
Démocratie en perd 11% et To Potami près
de 50%[1].
Seul la parti d’extrême-droite « Aube
Dorée » maintien à peu de choses près
son nombre de voix (et donc progresse
par rapport à l’élection du 25 janvier).
Les votes « blancs » et « nuls »
augmentent aussi de manière
considérable. Tout indique que la
méfiance de l’électorat envers ses
institutions a fait un bond considérable
entre janvier et septembre ?
Régions ou SYRIZA et Nouvelle
Démocratie sont arrivées en tête.
Rouge: SYRIZA
Bleu: Nouvelle Démocratie
L’analyse que l’on peut faire de ce
scrutin montre que les électeurs de
gauche ont considéré qu’il valait mieux
donner leur voix (pour ceux qui l’ont
fait) à SYRIZA et ainsi éviter le retour
aux affaires du parti de droite
oligarchique « Nouvelle Démocratie ». Le
népotisme de ce parti (comme d’ailleurs
celui du PASOK) a laissé de très mauvais
souvenirs.
Mais, cela ne peut constituer qu’un
moindre mal. Il est évident que le 3ème
mémorandum sera appliqué dans toute sa
dureté et que Tsipras, ayant accepté les
conditions qui lui ont été imposées,
n’aura guère de marge de manœuvre.
L’idée d’une résistance passive, si elle
peut avoir un certain crédit dans
l’opinion, ne tient pas devant les faits[2].
La gauche de refus n’a pu ni su
concrétiser la désaffection sensible
pour Syriza tant en raison de ses
divisions (trois partis se disputaient
les votes des déçus de SYRIZA) qu’en
raison de son sectarisme (pour le KKE).
C’est du côté de la situation
économique que les événements vont se
précipiter dans les prochaines semaines.
La situation de la Grèce ne saurait
s’améliorer de par l’application du 3ème
mémorandum, qui d’ailleurs n’a pas été
fait pour cela, et elle est d’ores et
déjà considérée comme étant désespérée[3].
Les premières indications sur le 3ème
trimestre laissent à penser que la
contraction de l’activité économique en
juillet et août 2015 a été très
violente. La production industrielle
pourrait baisser de -8% à -10% et le PIB
de -3% à -5%. Bien entendu, de telles
baisses de production vont entraîner un
recul des recettes fiscales et dès la
fin octobre le gouvernement grec devra
demander de nouvelles sommes à ses
créditeurs.
Il est clair aujourd’hui qu’il n’y a
pas d’avenir pour la Grèce tant qu’elle
reste dans la zone Euro et tant qu’elle
ne fait pas défaut sur une part
importante de sa dette. Ceci commence à
se dire tant aux FMI que dans les
couloirs de l’Union européenne. Le
dossier grec est donc toujours sur la
table. Même si, aujourd’hui, d’autres
problèmes sont en train de focaliser
l’attention, comme la crise des
réfugiés, il sera de retour dans les
problèmes politiques d’ici la fin du
mois d’octobre.
[1]
http://www.initiative-communiste.fr/articles/europe-capital/resultats-des-elections-en-grece-les-chiffres/
[2] Godin R., « La Grèce entre en
résistance », La Tribune, 21 septembre
2015,
http://www.latribune.fr/economie/union-europeenne/la-grece-entre-en-resistance-506776.html
[3] Bootle R., Greece’s new
government and the Troika have to face
the awful truth, The Independant,
20 septembre 2015,
http://www.telegraph.co.uk/finance/comment/11878690/Greeces-new-government-and-the-Troika-have-to-face-the-awful-truth.html
Le sommaire de Jacques Sapir
Le
dossier Grèce
Les dernières mises à jour
|