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Après le 17 mars
Jacques Sapir

© Jacques
Sapir
Vendredi 18 mars 2016
Les manifestations
du 17 mars, qui ont été essentiellement
celles de la jeunesse en lutte, lycéenne
et étudiante, ont confirmé la montée
d’une immense mobilisation, que les
quelques concessions faites par le
gouvernement dans la nouvelle mouture de
la « Loi Travail » n’ont pas satisfaite.
Il est clair aujourd’hui que l’essentiel
de la loi est pour l’instant maintenu.
J’invite mes lecteurs à écouter ce que
disent deux avocats venant d’horizon
différents, M. Van der Vlist (gauche du
P « S ») et M. Lempereur (DLF), dans mon
émission, les « Chroniques de Jacques
Sapir » sur Radio-Sputnik. Ajoutons que
l’article 6, qui introduit la nécessité
pour l’employeur de reconnaître les
« cultes », conduit à une dangereuse
rupture du principe de laïcité. C’est
une raison supplémentaire de vouloir
rejeter cette loi. Mais, aujourd’hui, et
avant la grande manifestation du 31
mars, on s’oriente vers un blocage de la
situation. Ce blocage, et il faut le
savoir, joue dans le sens du
gouvernement dans la mesure ou les
syndicats se révèlent incapables (ou peu
désireux) de passer à la vitesse
supérieure, c’est-à-dire d’envisager la
possibilité d’une grève générale.
Ce blocage, on peut
le comprendre. Une grève générale est un
affrontement majeur avec le pouvoir
politique. Le risque d’une défaite doit
être méticuleusement pesé. Mais, dans le
même temps, il faut pouvoir lutter
contre ce gouvernement car il a une
stratégie qui se développe dans cette
situation de blocage. Le sens des appels
à l’unité que l’on entend, ici ou là, et
même au sein des adversaires de la loi
« Travail », est le suivant : soit vous
voterez pour nous (en 2017), quoi que
vous puissiez penser de nous, soit ce
qui se profile à l’horizon sera bien
pire… C’est cette stratégie qui le
conforte dans une attitude où l’on ne
peut plus exclure un passage en force
sur la loi « Travail » remaniée. Or,
aujourd’hui, il est clair que, que ce
soit M. Juppé ou M. Hollande, l’un et
l’autre ne sont plus que les fondés de
pouvoir de l’Union européenne, qui
pousse un texte organisant la
destruction du droit du travail.
Il importe donc,
aujourd’hui encore plus que hier, de
structurer le mouvement, de lui donner
des institutions provisoires. Comme je
l’avais écrit à la suite des
manifestations du 9 mars dernier, il
convient de s’organiser à la base autour
d’un noyau de propositions dont le refus
de prise en compte entraînerait
l’abstention. C’est une arme puissante
pour déstabiliser le Deuxième Parti
Du Patronat (ou DPMP) soit le P
« S » dont c’est devenu le nom réel.
Car, rappelons-le, s’il est une chose
qui terrifie ces apparatchiki
c’est bien la perte des postes, des
prébendes, des sinécures que leur
rapporte le scrutin majoritaire à deux
tours.
Comme je l’ai
écrit, c’est dans des comités unissant
tous ceux, sans distinction et sans
références à un quelconque parti, qui
déclareraient que tout candidat qui ne
rejetterait pas la loi « Travail »,
quelque soit sa forme définitive, mais
aussi la réforme du collège et d’autres
mesures lamentables prises depuis 2012,
ne pourrait compter sur leurs voix en
2017, que pourra s’enraciner cette
mobilisation. Ces comités permettraient
de réaliser une véritable unité à la
base entre militants de différents
partis (et pas tous nécessairement de
gauche), de différents syndicats, mais
aussi militants inorganisés et méfiants
quant aux divers partis aujourd’hui en
présence, en dégageant un minimum de
points d’accord.
Si nos gouvernants
persistent dans la voie qui est dictée
tout à plein par l’Euro et par la
réglementation de l’Union européenne,
alors ces comités feront campagne pour
une abstention active au second tour de
l’élection présidentielle et des
élections législatives qui suivront.
C’est cette menace qu’il faut désormais
brandir pour être entendus. Nous en
sommes là !
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