Corse
Sporting Bastia
Les incidents de Reims
François Alfonsi
© François
Alfonsi
Lundi 15 février 2016
Le match était gagné un à zéro, première
victoire à l’extérieur pour les
Bastiais, et, pour les 200 supporters
corses qui avaient fait le déplacement
avec leur équipe, le programme était de
rentrer par bus à Paris pour pouvoir
s’envoler vers la Corse le lendemain
matin. Mais soudain, dans les rues de
Reims, la situation a dégénéré.
Bien sûr, la version officielle, reprise
par la presse locale, est que ce sont
les supporters corses qui ont tous les
torts. Ainsi, à les en croire, les
supporters bastiais, qui en étaient à
leur énième voyage chez les clubs
adverses où leur équipe avait, jusqu’à
dimanche, toujours perdu, y compris la
dernière fois à Guingamp suite à une
flagrante erreur d’arbitrage, auraient
attendu le jour tant espéré de leur
première victoire à l’extérieur, qui
plus est obtenue, cette fois, grâce à un
incontestable coup de pouce arbitral,
pour entrer en ébullition et se
comporter en véritables hooligans !
S’il n’y avait un jeune de 23 ans qui a
perdu un œil lors des charges
policières, une telle mauvaise foi
serait risible. Vu la gravité de la
blessure de ce jeune, elle est devenue
révoltante.
Neuf supporters ont ainsi été placés en
garde à vue, et ils sont promis à une
justice expédiée en comparution
immédiate, sur la fois des dépositions
de policiers qui manifestement, par leur
comportement, ont transformé la liesse
de supporters vainqueurs d’un soir en
tension soudaine, puis, par l’usage des
moyens répressifs les plus brutaux, fait
dégénérer un face à face somme toute
banal en un violent affrontement qui a
entraîné la perte d’un œil pour un jeune
supporter.
L’engrenage violence policière/mauvaise
foi officielle est ensuite monté en
puissance devant le commissariat de
Bastia où les proches du blessé et des
personnes retenues à Reims se sont
rendues dimanche soir. Aucune réponse à
leurs demandes, aucun début de
commencement d’excuse pour ce qui
s’était passé à Reims, aucune nouvelle
de leurs proches retenus en garde à vue,
la rue s’est enflammée. Le Ministre de
l’Intérieur Bernard Cazeneuve s’est cru
fondé à y voir « la dérive de supporters
ultras » comme pour mieux valider à
l’avance les dépositions à venir des CRS
responsables de la blessure infligée
sans raison à un jeune de 23 ans.
Face à cette injustice, Gilles Simeoni a
réagi : « Des témoignages concordants
font état de comportements provocateurs
et brutaux des forces de l’ordre :
allusions directes à la situation
politique en Corse, insultes racistes,
passage à tabac de plusieurs jeunes. De
même, la nature et la gravité de la
blessure subie par le jeune bastiais
ainsi que sa localisation à la face
caractérisent d’ores et déjà un usage
anormal et disproportionné de la force
publique. Dans ces conditions, les
poursuites pénales engagées à l’encontre
des supporters du SC Bastia interpellés
à l’issue de la rencontre ne présentent
aucune garantie d’impartialité, puisque
les enquêteurs et policiers sont juges
et parties dans les incidents, et sont
donc susceptibles de voir leur
responsabilité pénale et civile engagée.
Je demande donc des explications
officielles soient, au plus haut niveau
de l’Etat, données sur les comportements
imputés aux forces de l’ordre par de
nombreux tiers, et qu’une enquête
indépendante et impartiale soit ordonnée
».
Les incidents de Reims sont révélateurs
d’un état d’esprit qui règne sur le
continent à l’égard de la Corse, dans la
presse, dans la police, et plus
généralement dans l’ensemble de
l’appareil d’Etat. Celui-ci fait bloc
autour de ses policiers, même pour
couvrir leurs bavures. Ce n’est pas vrai
qu’en Corse, mais c’est sûrement encore
plus vrai pour les supporters bastiais !
François ALFONSI
Le
dossier Corse
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