Les enjeux de la vie internationale
Sur le boycott
d'Israël..
Charles Enderlin
© Charles
Enderlin
Samedi 21 décembre 2013
Ben Dror Yemini, l’éditorialiste, très à
droite, du quotidien
israélien, Maariv, vient de découvrir ce
que tous les négociateurs israéliens
savaient déjà : Mahmoud Abbas n’est pas
en faveur du boycott d’Israël. Pendant
sa visite en Afrique du Sud, à
l’occasion des obsèques de Mandela, le
président palestinien a répété : « Les
Israéliens doivent cesser de construire
dans les colonies, nous ne demandons pas
un boycott d’Israël ! Nous avons des
relations et une reconnaissance mutuelle
avec Israël ! ». Yemini relève que
l’Afrique du Sud est le berceau
l’organisation Boycott Désinvestissement
Sanctions. La mise au
point d’Abbas lui a donc valu des
commentaires peu flatteurs… Il a été
traité de « collabo d’Israël » . En
fait, l’Autorité autonome ne réclame que
le boycott des produits issus des
colonies. En juin, 2010, Salam Fayyad,
alors Premier ministre, avait lancé une
campagne en ce sens, des volontaires
faisant la tournée des magasins de
Ramallah pour en faire retirer, eau
minérale, pâtes, conserves etc. Ce n’est
qu’en décembre 2012 que Fayyad a lancé
un appel au boycott de l’ensemble des
produits israéliens, mais seulement
pendant la période durant laquelle le le
gouvernement Netanyahu avait suspendu le
transfert du produit des taxes qu’il
prélève pour le compte de l’Autorité
autonome.
Pour ou contre le BDS
Récemment, BDS a marqué plusieurs
points. Aux Etats Unis,
l’American Study Association, un
syndicat de chercheurs et d’enseignants
s’est prononcé en faveur du boycott des
universités israéliennes. (http://www.france24.com/fr/20131216-universite-boycott-israel-polemique-asa-academique-usa-palestine/)
Une décision qualifiée d’antisémite par
Alan Dershowitz dans un article publié
par le quotidien Haaretz et illustré par
une image montrant la dégradation du
capitaine Dreyfus… Ce célèbre juriste
d’Harvard, relève que l’ASA n’entend pas
boycotter la Chine l’Iran ou l’Arabie
Saoudite mais uniquement l’Etat d’Israël
où on n’emprisonne pas les
universitaires en raison de leurs
opinions. Il rappelle que des
négociations sont en cours pour faire
cesser l’occupation des territoires
palestiniens. (http://www.haaretz.com/opinion/.premium-1.563920)
Henry Siegman, du Council on Foreign
Relations, lui a répondu « Si je me pose
des questions sur la sagesse de
boycotter les universités israéliennes
où certaines facultés sont parmi les
plus dures critiques de la politique de
leur gouvernement envers les
Palestinien, l’accusation
d’antisémitisme lancée envers le BDS est
sans fondement. » Et d’expliquer, de
même que si des Sionistes peuvent être
racistes, cela ne signifie pas que le
sionisme est raciste, le BDS n’est donc
pas antisémite parce que certains de ses
militants le sont. (http://www.haaretz.com/opinion/.premium-1.564527)
Le boycott, la loi et l’Europe
En France, le 20 décembre dernier, sept
militants du BDS, ont été relaxés
par le tribunal correctionnel de
Pontoise. Ils étaient accusés d’avoir
appelé au boycott des produits
israéliens dans un supermarché Carrefour
de Montigny les Cormeilles dans le Val
d’Oise en juin 2010. Les juges ont
estimé que leur action s’inscrivait dans
le cadre de la liberté d’expression
garantie par la Convention européenne
des droits de l’homme.
http://www.leparisien.fr/informations/val-d-oise-relaxes-apres-leur-appel-a-boycotter-les-produits-d-israel-20-12-2013-0.php
Il faut rappeler qu’en Israël, la
Knesset a adopté, le 11 juillet 2011,
une loi érigeant en infraction
civile le fait d'appeler au boycott
économique, culturel ou intellectuel de
personnes ou d'institutions en Israël ou
dans les territoires palestiniens. Toute
personne appelant ainsi au boycott
risque d’être poursuivie et condamnée à
une amende. Kadima et la gauche avaient
voté contre. Réouven Rivlin, le
président du parlement, - il appartient
au Likoud- avait, à l’époque, pris
position contre ce texte de loi, au nom
de la liberté d’expression.
Pour l’Union Européenne, les choses sont
claires : le 16 juillet dernier, elle a
adopté une directive stipulant qu’à
partir du 1 janvier 2014: « tous
les accords entre l'Etat d'Israël et
l'UE doivent indiquer sans ambiguïté et
explicitement qu'ils ne s'appliquent pas
aux territoires occupés par Israël en
1967 » Le gouvernement
Netanyahu, pour permettre
l’indispensable participation des
centres de recherche israéliens au grand
projet européen Horizon 2020 a du céder
et accepter un compromis. Les fonds
européens n’iront pas dans les colonies.
Le BDS plus proche du Hamas
Mais,
revenons à un des objectifs du BDS. Le
mouvement prône le droit au retour des
réfugiés palestiniens en Israël. Un
objectif qui va à l’encontre du
processus de paix. Depuis le tout début
des pourparlers, les négociateurs
palestiniens savent qu’il ne
parviendront pas à un accord avec Israël
à ce sujet. Lors de toutes les
rencontres entre les parties, et
notamment à Camp David en juillet 2000,
il a été question de reconnaissance
symbolique (ou directe) de la
responsabilité israélienne dans la
Nakba, de compensations financières pour
les réfugiés et leurs familles, de leur
intégration dans l’état de Palestine
lorsqu’il verra le jour, dans les pays
où ils vivent ou ailleurs. Les
israéliens n’ont accepté de discuter que
de « réunification de familles »
limitées, surtout de réfugiés au Liban.
Les chiffres variant de quelques
milliers à quelques dizaines de milliers
de palestiniens autorisés à venir en
Israël. Voir, mon livre : « Le rêve
brisé » sur l’échec du processus d’Oslo.
A l’époque, l’entourage d’Arafat me
disait – en me demandant de ne pas le
publier- que son rêve était de proclamer
l’Etat palestinien depuis la mosquée Al
Aqsa en déclarant que les Palestiniens
de l’étranger devaient venir participer
à la construction de leur pays et pas
aller s’installer en Israël »
Publiquement le chef de l’OLP a répété à
plusieurs reprises qu’Israël n’aurait
pas de problème démographique.
La
position de Mahmoud Abbas est encore
plus claire. Le Président palestinien
soutient l’initiative de paix de
la Ligue arabe qui stipule « un
règlement équitable et agréé de la
question des réfugiés palestiniens sur
la base de la résolution 194 de
l'Assemblée générale de l'ONU. » Donc,
un accord négocié entre Israël et les
Palestiniens.
http://www.france24.com/fr/20130430-ligue-arabe-processus-paix-israelo-palestinien-israel-frontieres-1967-refugies/
Là aussi, BDS
va à l’encontre de la politique de
l’Autorité palestinienne et adopte des
positions plus proches de celles du
Hamas qui a rejeté le plan de paix de
la Ligue arabe.
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