Syrie
Syrie. Voyage au cœur du pays de Bachar
(6) :
de Lattaquié au monastère de Qara
Rédaction de Breizh-info
Lattaquié,
principale porte de la Syrie sur la
méditerranée. Photo Sana
Lundi 19 avril 2016
Depuis 5 ans le
conflit syrien est au cœur de
l’actualité. Pour en parler, la plupart
des médias se contentent de reprendre
les dépêches de l’Agence France presse,
qui s’appuient sur les communiqués de
l’Observatoire syrien des droits de
l’homme (OSDH), une officine très
controversée.
Alors pour
tenter de comprendre la réalité, trois
membres de la rédaction de Breizh-info
ont séjourné en Syrie, où ils se sont
rendus avec le concours de l’association
de solidarité France-Syrie (contact
: syrianafrance@gmail.com). Ce voyage
d’une semaine s’est entièrement déroulé
dans la partie du pays sous contrôle du
gouvernement légal. De Damas à
Lattaquié, notre équipe est allée à la
rencontre de la population :
combattants, victimes de guerre,
déplacés, chrétiens, musulmans,
religieux, mères de famille,
enfants, universitaires, industriels,
artisans, commerçants, agriculteurs…
Sans préjugés ni tabous, récit d’un
voyage dans un pays en guerre.
De Lattaquié au
monastère de Qara
Dans les ruines
d’Ougarit, désertées par les touristes
Arrivés à Lattaquié
après voir traversé la montagne où est
installée la communauté alaouite, nous
nous installons dans notre hôtel situé
au bord de la mer, au nord de la ville.
Si les touristes sont absents, on
remarque vite la présence de Russes.
Après le déjeuner, nous visitons le site
d’Ougarit à Ras Shamra dans une ville
moderne au nord de Lattaquié. Ce sont
des archéologues français qui le
découvrirent et entreprirent les
fouilles de 1930 à 1970. Ils en
ont dégagé les principaux
monuments, le palais royal qui
comportait des dizaines de salles de
réception, la cour d’honneur , des
entrepôts et aussi des quartiers
d’habitation. L’architecture de la cité
était essentiellement faite en pierre,
ce qui a assuré une bonne conservation
de tout le bâti, et donne à ce site un
attrait non négligeable. La technique de
construction est assez semblable à celle
des villes mycéniennes. Les fouilles de
ce site ont permis de découvrir une
abondante documentation en tablettes
cunéiforme. Elles sont écrites
dans une langue dite « ougaritique »
considérée comme la plus ancienne
écriture alphabétique connue à ce jour.
Seul un sixième du site à été dégagé.
alors qu’elle connaissait une prospérité
sans précédent, Ougarit sera détruite
vers – 1200 avant notre ère sous
l’assaut des peuples de la mer.
Quoique protégé, le
site est fouillé de manière clandestine
depuis le début du conflit. Il a
fait l’objet par l’UNESCO d’une
inscription sur la liste du patrimoine
en péril en juin 2013. A la fin de la
visite nous faisons halte dans un café
boutique situé en face de l’entrée du
site. Son patron nous accueille en
français avec chaleur. Ougarit n’est
plus guère visité. Avec le conflit, les
touristes sont aux abonnés absents. « Quand
les archéologues français vont-ils
revenir ? » nous demande-t-il. Bonne
question.
A
Lattaquié, les alliés russes sont bien
présents
Premier port de
Syrie, Lattaquié est une ville moderne,
sans charme particulier, avec une
population en majorité chrétienne et
alaouite. Depuis le début du conflit,
celle-ci a doublé avec l’installation de
près d’un demi-million de déplacés
originaires d’Alep et de Homs. Nous
passerons devant l’université où, en
novembre 2015, deux missiles lancés par
les terroriste sont fait 20 morts et des
dizaines de blessés.
Depuis octobre
2015, l’aéroport de Lattaquié sert de
base à l’aviation russe qui effectue –
avec le succès que l’on sait – des
frappes aériennes contre les positions
de Daech et des djihadiste affiliés à
Al-Qaïda du Front al-Nosra.
La présence des
Russes est visible dans la ville. Nous
en croiserons plusieurs dans notre hôtel
situé dans le quartier de Chaati al-Azrak,
seule station balnéaire de Syrie.
Nous rencontrerons
le bureau d’une association féminine de
soutien aux combattants et aux martyrs.
Son objet est d’apporter une aide
matérielle en s’occupant en
particulier de l’intendance. Sa devise
est » Vivre ensemble » car leur
ambition est de retrouver l’harmonie qui
existait jusqu’en 2011 entre tous les
Syriens, quelle que soit leur
appartenance ethno-religieuse.
Étape à Tartous « La capitale
des martyrs »
Tartous.
L’ancienne cathédrale Notre-Dame abrite
aujourd’hui un musée
Tartous.
Un palais sur le front de mer
Après avoir quitté
Lattaquié en début de matinée, nous
faisons route vers Tartous en suivant
le littoral. La ville se situe à 30 km
an Nord de la frontière libanaise. Elle
est peuplée de 100 000 habitants en
majorité alaouite. Tartous est nommée
La capitale des martyrs. Elle a
donné un lourd tribut à la guerre,
comptant le plus fort ratio de victimes
dans l’armée et la milice depuis 2011.
Cité touristique et
balnéaire, Tartous est aussi un port
qui abrite une importante base russe.
C’est une installation permanente de la
flotte maritime militaire russe depuis
1971, la seule en Méditerranée.
Nous faisons halte
dans la vieille ville devant la
cathédrale Notre Dame qui date du
XIIIème siècle. Transformée en mosquée,
elle abrite aujourd’hui un musée
archéologique.
Rejoints par un
guide local,nous nous promenons dans le
centre ancien et sur le front de mer où
d’importants travaux de restauration ont
été entrepris avant le déjeuner.
Le
monastère de Qara
Ce monastère,
consacré à saint Jacques, date du
sixième siècle. Il a joué un rôle
important dans la région jusqu’en 1720
avant de décliner jusqu’à disparaître en
1930. En 1993, Mère Agnès Mariam de la
Croix en découvre les ruines et décide
de le reconstruire. Elle trouve des
financements en Europe et en Syrie et
réussit son pari de lui redonner vie.
Aujourd’hui, ce carmel compte huit sœurs
et 3 frères. Ils recueillent des
orphelins, les éduquent et leur donnent
une formation. Mère Agnès est connue
entre autre pour avoir intercédé auprès
du gouvernement afin d’obtenir des visas
pour les journalistes. Elle estime en
effet que ceux qui ne viennent pas sur
le terrain ne font pas leur travail et
qu’ils ne respectent pas la charte de
Munich…
La
communauté du monastère de Saint
Jacques, à Qara.
Un havre de paix au milieu du conflit
syrien
Pour arriver au
monastère, il nous faudra emprunter un
car local pour ne pas attirer
l’attention. Le coin demeure sensible.
Sœur Claire Marie, la religieuse qui
nous reçoit et nous fait visiter les
lieux, est originaire de Nort sur Erdre
en Loire Atlantique. Les djihadistes
ont occupé le village
voisin pendant deux ans. Ils ont tourné
à de multiples reprises autour du
monastère sans y pénétrer. Aussi, les
membres de la communauté, qui sont
toujours restés sur place, se
considèrent comme des miraculés.
(à suivre)
Précédemment :
Un pays en guerre
De Seydnaya à Maaloula, aux sources des
chrétiens d’Orient
Homs, ville martyre
A Hama, ville sunnite, le calme règne
Sur le front
(à
suivre)
Crédit
photos : Breizh-info.com ( mention
obligatoire)
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