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Les analystes français face au mur des
réalités
Alexandre Latsa
© Youtube
Mardi 21 avril 2015
Le 27 janvier
dernier,
une table ronde
s'est tenue lors du
colloque risque pays de la Coface.
Ceux qui écouteront
les intervenants qui ont apporté leur
contribution pourront mesurer le fossé
qui existe entre deux familles de pensée
qui semblent de moins en moins se
comprendre. La première est celle des
chefs d'entreprises et des analystes non
alignés, la seconde celle des
journalistes et des analystes alignés.
Bien que cette
table ronde se soit tenue il y a presque
quatre mois, en janvier 2015, il est
intéressant de la revoir dans le
contexte actuel d'avril 2015.
Au cours des
derniers mois, le mainstream médiatique
nous a en effet expliqué et répété à de
nombreuses reprises que Vladimir Poutine
était de plus en plus
nerveux, avait
perdu la guerre économique, que les
mesures de rétorsion russes étaient «
comiques » ou encore que la Russie de
Poutine se situait entre
crise et débâcle économique.
Le Figaro a
affirmé, par la voix de son
irremplaçable « spécialiste » de la
Russie Pierre Avril, que le président
russe n'avait
aucune réponse à la crise pendant
que l'Etat russe en était réduit à
brûler «
en vain » ses réserves de changes.
Pour Benoit Rayski,
Vladimir Poutine était contraint de
montrer ses «
tout petits muscles » et sa
politique « basée sur le mensonge et la
contradiction » traduisait le fait qu'il
vivait dans un autre monde, tandis
que pour Thomas Gomart, le président
Poutine était simplement un leader en
train de «
vriller » (à 38':45 dans le
colloque) et en pleine
fuite en avant.
Nous sommes dans la
deuxième quinzaine du mois d'avril 2015,
et il est facile de constater que rien
ne s'est passé comme nos commentateurs
et spécialistes occidentaux et français
le prévoyaient en janvier.
Les experts
omniprésents tant dans la sphère
médiatique que dans divers instituts
n'ont finalement rien produit de
réaliste à propos de l'évolution de la
situation en Russie, et ils n'ont pas
beaucoup éclairé la lanterne des
décideurs politiques français, c'est le
moins qu'on puisse dire.
Non, l'économie
russe ne s'est pas effondrée et la
plausible récession de cette année sera
visiblement bien plus faible que prévue.
Non, le pétrole ne
s'est pas effondré à 20 dollars puisque
le baril frôle les 65 dollars.
Non, les réserves
de change russes ne se sont pas
effondrées et se montent à près de 380
milliards de dollars.
Non, le rouble ne
s'est pas effondré malgré la chute du
baril, puisqu'il est revenu à son niveau
de mi-octobre 2014. Le cours de la
devise russe n'est d'ailleurs plus
corrélé au cours du brut, puisque le
rouble s'est envolé alors que le baril
était lui à peu près stable.
La totale
incapacité de la majorité des analystes
et journalistes français à percevoir et
à comprendre les réalités russes ne
s'explique d'aucune façon rationnelle.
Souvent, ils nient les évidences, comme
aveuglés par une folie idéologique et
dogmatique.
A leur grand dam
sans doute, l'économie russe s'est
montrée plus solide et stable que tous
les pronostics ne pouvaient l'envisager,
et il leur est maintenant difficile de
dissimuler que le chômage en Russie est
tombé à son plus bas historique.
Quelques jours plus
tard, la
grande journée de questions-réponses
du président russe en direct avec la
population russe a constitué un énième
camouflet pour nos « experts et
commentateurs ».
De toute évidence,
Vladimir Poutine ne vit pas du tout dans
un « autre monde » et n'est aucunement
en train de « vriller ». Il ne semble
vraiment pas à bout d'arguments, et ne
devrait vraisemblablement pas quitter
son poste.
Au contraire, tout
indique qu'il continuera à mener la
politique qui est la sienne depuis mars
2000.
Comment auparavant,
l'objectif est de refaire de la Russie
une puissance souveraine en se servant
sans doute davantage, à l'avenir, des
relais de croissances asiatiques.
Au lieu de nous
inquiéter pour la gouvernance russe, il
conviendrait plutôt de nous demander
pourquoi nos élites journalistiques et
politiques, en France et en occident,
sabordent le navire commun sur lequel
nous nous trouvons.
Et l'on se prend à
rêver de l'arrivée d'une génération de
conseillers consciencieux et lucides,
des conseillers dont l'Etat français
manque cruellement en ce moment.
© 2015 Sputnik Tous droits réservés.
Publié le 23 avril 2015 avec l'aimable autorisation de
l'auteur
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