Sputnik
N’est pas de Gaulle qui veut
Alexandre Latsa
© AFP
2015. Jean-Sebastien Evrard
Lundi 2 novembre 2015
Source:
Sputnik
Le moins que l’on
puisse dire est que Nicolas Sarkozy ne
laisse pas indifférent.
L'ancien président
de la république s'est rendu en Russie
la semaine dernière pour y rencontrer
son "ami" Vladimir Poutine et au passage
rappeler aux Français de Russie, dont
une très grande majorité l'a soutenu à
l'élection
présidentielle de 2012, que 2017 ne
sera pas une élection comme les autres.
Reçu par Vladimir
Poutine, Nicolas Sarkozy s'est présenté
lors de sa tournée russe
comme un "ami de la Russie (…) Ce
pays ni européen, ni asiatique (…)
devenu une puissance mondiale".
Diantre! Il faut
vraiment que Vladimir Poutine ait de la
patience, car il fut un temps ou Sarkozy
était vraisemblablement moins bien
disposé à son égard, envisageant
l'avenir de notre pays au sein de la
trajectoire transatlantique et dans le
giron américain. Et, bien entendu, sans
Vladimir Poutine à l'horizon.
Nicolas Sarkozy
avait, il est vrai, lancé sa carrière
politique française à Washington,
annonçant sa candidature aux
Américains le 1er août 2005, soit plus
d'un an avant qu'il ne l'annonce au
peuple français durant l'automne 2006. A
Washington, à cette époque, on s'est
amusé de la candidature de Nicolas
Sarkozy: c'est
Wikileaks qui nous a permis de
savoir ce que nos partenaires américains
appréciaient chez cet Américain
synthétique: L'homme est acquis au
"libéralisme, à l'atlantisme et au
communautarisme (…) Il est pro-américain
et acquis aux principes du libre-marché.
(…) Il est aussi l'homme politique
français qui soutient le plus le rôle
des Etats-Unis dans le monde".
De son côté,
Nicolas Sarkozy confirmait, lui, sa
grande admiration pour Georges Bush
(sic) et affirmait clairement: "Certains
en France m'appellent Sarkozy
l'Américain. J'en suis fier"!
Où encore,
s'en prenant à Jacques Chirac qui
lui reprochait ses positions trop
pro-américaines: "Quand je pense que
ceux qui me reprochent de rencontrer
Bush sont ceux qui serrent la poigne de
Poutine, ça me fait doucement rigoler".
Elu président en
suscitant une certaine vague
d'enthousiasme à droite et à
l'extrême-droite, Nicolas Sarkozy
n'allait pas tarder à faire déchanter
une grande partie de ses électeurs qui
avaient naïvement cru l'homme capable
d'initier une politique nouvelle en
France et de réveiller le cadavre de la
droite française authentique,
souverainiste et patriotique.
La réintégration au
sein du commandement de l'Otan puis la
guerre en Libye, dont nous constatons
ces dernières semaines à quel point elle
était inutile et combien elle sera
coûteuse à l'Europe sur le plan
migratoire, ont poursuivi mais aussi
accentué la transformation de la France
en province de Washington. Sur le plan
intérieur, alors qu'était attendu un
Nicolas Sarkotoritaire tendant vers
l'union des droites, ce sont des
ministres de gauche qui feront leur
entrée au gouvernement, notamment le
très atlantiste Kouchner au ministère
des Affaires étrangères, tandis que
Nicolas l'Américain ne soutiendra pas
l'incroyable mouvement populaire et
national du Mariage pour tous,
traduisant ainsi parfaitement ses
aspirations libertaires pour la société
française du futur.
Presque dans le
même temps, la CIA mettait cependant et
par prudence le président français
sur écoute, démontrant ainsi la
forme que prend la relation de confiance
entre l'administration américaine et ses
soi-disant "alliés" européens, mêmes
ceux supposés les plus fidèles.
"Il n'y a que les
imbéciles qui ne changent pas d'avis"
dit le proverbe, et en ce mois d'octobre
2015, en visite à Moscou, Nicolas
Sarkozy est donc allé finalement "serrer
la poigne" de Poutine en tentant de
valoriser son statut de chef du
principal parti d'opposition, mais aussi
de candidat présidentiable.
La visite de
Sarkozy l'américain nous renvoie, nous
Français, face à la réalité du vide
sidéral qui est celui de la scène
politique nationale et face à l'absence
d'Elite politique digne de ce nom. Un
vide permettant aux hommes politiques de
n'exister que par des gesticulations.
Nicolas Sarkozy, qui vient de rebaptiser
son parti en "Les républicains", a sans
doute tenté de faire illusion en faisant
croire qu'il était prêt à s'engager vers
une voie russe et continentale, visant à
rééquilibrer la politique internationale
de la France, écrasée entre Washington
et Berlin. Mais n'est-ce pas précisément
lui qui nous a enfermés dans ce carcan,
après avoir activement joué la carte
américaine, puis la carte
euro-allemande?
Le russisme supposé
de Nicolas Sarkozy l'est
vraisemblablement pour de mauvaises
raisons, c'est-à-dire pour des raisons
d'opportunisme électoral, sans que cela
ne traduise la moindre conviction
politique, ni la moindre amorce de
stratégie sur la durée. Pourtant les
Français et particulièrement les
Français de Russie savent, comme le
prouve l'expérience de la Russie ces 15
dernières années, que c'est précisément
d'une stratégie sur la longue durée dont
le pays a besoin pour lui éviter de
sortir de l'histoire au cours des
prochaines décennies.
Mais il est vrai
que n'est pas de Gaulle qui veut.
© 2015 Sputnik Tous droits réservés.
Publié le 3 novembre 2015 avec l'aimable autorisation de
l'auteur
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