Opinion
La participation française dans le
génocide rwandais:
Les preuves sont accablantes!
Akil Cheikh Hussein
Photo:
D.R.
Mercredi 16 avril 2014
Une torche
a parcouru le Rwanda pendant trois mois
avant de servir à allumer, dans le plus
grand stade de la capitale Kigali, une
flamme qui, en signe de deuil, ne
s’éteindra qu’au bout de cent jours.
C’est ainsi qu’ont démarré les
commémorations des cents jours pendant
lesquels ont été assassinés au Rwanda,
du 6 avril au 19 juillet 1994, environ
un million de Rwandais appartenant à la
minorité Tutsie.
Ban Ki-moon, le secrétaire général de
l’Organisation internationale, présent
lors de la cérémonie d’ouverture, ainsi
que nombre de représentants de pays et
d’organisations venus du continent
africain et d’autres pays du monde (à
l’exception de la France), a qualifié ce
génocide de tache noire dans l’histoire
des Nations Unis. En effet, les 2500
Casques Bleus présents sur place n’ont
pas fait grand-chose pour stopper les
massacres.
Ces Casques Bleus étaient-ils les seuls
coupables? N’y avait-il pas des taches
plus noires que le noir dans l’histoire
d’autres parties actives dans
l’événement rwandais? Certains faits
semblent particulièrement louches:
Deux jours seulement après l’assassinat,
le 6 avril 1994, du président rwandais
Juvénal Habyarimana, et le début des
massacres, et alors que faisait rage au
Rwanda une campagne de haine contre les
Tutsis, les derniers soldats français
présents au Rwanda depuis 1990 procèdent
à l’évacuation des ressortissants
occidentaux et quittent eux-mêmes le
pays.
77 jours plus tard, 2550 militaires
français et 550 autres venus de sept
pays africains (y compris l’Egypte de
Moubarak) sont déployés au Rwanda dans
le cadre de l’Opération Turquoise
conformément à la résolution 929 du
Conseil de sécurité prise sous l’article
VII en vue de «faire cesser les
massacres et de protéger les
populations».
Trois semaines plus tard, les massacres
ont été effectivement stoppés et,
depuis, d’innombrables témoignages
émanant d’observateurs neutres mais
aussi d’associations humanitaires et
même d’officiers français, concordent
pour mettre à l’index une participation
active de l’armée française dans les
massacres qu’elle devait faire cesser.
Cette accusation ne peut qu’être
corroborée par des faits qui ont eu lieu
pendant les quelques années qui ont
précédé les massacres:
Un soutien français en matériel,
armements et munitions a été apporté
régulièrement, entre 1990 et 1994, aux
Hutus au pouvoir qui, depuis
l’indépendance du pays en 1962,
opprimaient les Tutsis qui fuyaient
massivement vers les pays voisins.
Comme si la répression exercée par
l’armée rwandaise à l’encontre des
Tutsis ne suffisait pas, des
responsables français comme Marcel
Debarge, ministre de la Coopération en
1992-1993, encouragent la constitution
d’un front «de race» hutu. «Mettez-vous
d’accord avec le président face aux
Tutsis», a dit M. Debarge, lors d’une
visite qu’il effectuait à Kigali, en
s’adressant à des opposants hutus.
L’Opération Turquoise comprenait
l’établissement d’une «Zone humanitaire
sûre» à la frontière du Zaïre pour
porter assistance aux civils rwandais
réfugiés par centaines de milliers. Les
massacres des Tutsis se poursuivent même
à l’intérieur de cette zone!
Pendant la période critique dans
laquelle les tensions et les haines
s’amplifiaient entre Tutsis et Hutus,
l’armée rwandaise dominée par ces
derniers passe de 3 500 soldats en 1990
à 35 000 en 1995, et ce grâce au soutien
de la France qui a fourni des armes
lourdes, des véhicules d’assauts et des
hélicoptères qui ont été utilisés dans
les massacres perpétrés contre les
Hutus. En même temps, l’armée française
entraînait des soldats et des miliciens
civils parmi les Hutus et participait
même aux contrôles de cartes d’identité
qui ont été l’occasion de l’élimination
de nombreux Tutsis.
Ces faits qui vont tous dans le sens de
l’incrimination de la France de la
Déclaration des Droits de l’Homme
présidée lors de la mission française au
Rwanda par le très socialiste, François
Mitterrand, ne sont pas pris en compte
par le Tribunal pénal international pour
le Rwanda, chargé par le Conseil de
sécurité de l’ONU de juger les présumés
organisateurs du génocide rwandais. «Il
n'a à aucun moment évoqué une possible
culpabilité (ou responsabilité) de la
France dans le génocide rwandais». C’est
plus que
normal pour un tribunal qui n’est qu’un
tentacule au service des puissances
impérialistes.
La France officielle, quant à elle, se
défend des accusations qui lui sont
adressées, mais d’une défense qui reste
très impuissante à l’innocenter. A titre
d’exemple, l’ex-socialiste Bernard
Kouchner, devenu ex-chef de la
diplomatie française sous Sarkozy, a nié
toute «participation directe» de la
France au génocide de 1994 au Rwanda. Il
a donc reconnu une participation
«indirecte» qui ne peut d’aucune façon
être honorifique pour la France.
Et puisqu’on parle d’honneur, on ne peut
que s’arrêter devant les déclarations
parues sur son blog d’Alain Juppé,
l'ancien ministre français des affaires
étrangères à l'époque du génocide
rwandais. Il y appelle le président et
le gouvernement français à défendre
sans ambigüité l’honneur de la France…
Pourtant il tombe lui-même dans
l’ambiguïté en se révoltant contre les
accusations qui désignent les Français
comme les «principaux» coupables,
reconnaissant du coup, comme son
collègue Kouchner, une culpabilité
«secondaire» de la France.
En conclusion et jusqu’à preuve du
contraire, Il est difficile pour la
France -qui traine derrière elle tous
les méfaits de son histoire d’Etat
colonialiste, qui est responsable
«directement» des génocides qui ont fait
deux millions de morts en Algérie, qui
gère actuellement le génocide organisé
contre les Musulmans en Centrafrique- de
prouver son innocence en ce qui concerne
le génocide rwandais.
Source: french.alahednews
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