Opinion
Ukraine : l'économie brouille les
calculs économiques
Ahmed Halfaoui
© Ahmed
Halfaoui
Vendredi 3 octobre 2014
La dernière plus grande statue de Lénine
en Ukraine, qui a survécu au
déboulonnage, a fini par être abattue,
le 28 septembre à Kharkiv, principale
ville russophone dans l’est du pays. Les
auteurs de cet acte de bravoure :
quelques centaines de supporteurs de
football et de « pro-européens » ou
plutôt d’ « euro-révolutionnaires »,
comme on les appelle. Ce qu’ignorent les
« déboulonneurs » c’est que l’immense
penseur communiste est un iconoclaste.
Ils ignorent qu’il aurait applaudi leur
travail. Heureusement pour eux
d’ailleurs, ils n’auraient pas eu la
jouissance que leur a procurée le
sentiment de lui faire outrage. Durant
l’opération, l’un des activistes a reçu
de plein fouet un câble dans un œil et a
été éborgné, un autre est tombé du
monument et a des dommages à la colonne
vertébrale, enfin, un troisième s'est
fracturé un bras. Il y en a qui ont
versé des larmes, parmi la population
dont 50% considèrent que Lénine est un
symbole de la ville. Eux, aussi,
ignorent ce qu’en aurait pensé le grand
homme. En toile de fond, un pays qui
s’effondre après qu’une partie de sa
population a cru aux sirènes de
putschistes patentés par les Etats-Unis
et l’Union européenne. Au bout de
l’aventure, se déroulerait un tapis
rouge vers le supposé paradis de
l’Europe néolibérale, versus l’austère
Russie. Une Europe, elle-même,
supplétive de la géostratégie
étatsunienne dans la région, incapable
de garantir, au moins, un appui
politique unifié aux putschistes, qui
sont déjà en pleine déroute dans le
Donbass et qui risquent de ne pas
résister à la fronde annoncée de leur
propre base sociale, dont la désillusion
ne tardera pas à se produire. Une
échéance probable, les législatives du
26 octobre. Car le putsch n’a pas aboli
la « démocratie » et promettait de la
renforcer. Alors, beaucoup prévoient une
révolte en retour, contre le
pouvoir actuel. Une révolte qui sera
caractérisée par le sentiment des
insurgés d’avoir été trompés, sinon
trahis. Les analystes et autres
propagandistes de l’OTAN pourront
cogiter à satiété sur la stratégie de
Vladimir Poutine, ils ne pourront avoir
aucune influence sur la réalité d’un
peuple qui vit dans sa chair les
conséquences de la manipulation
occidentale. Concernant les sanctions
antirusses, le 25 septembre, la Hongrie,
membre de l’U.E, a interrompu
unilatéralement et ses livraisons de gaz
à l’Ukraine, sur la base d’explications
douteuses. Son Premier ministre a même
déclaré que l’Union européenne s’était « tiré
une balle dans son propre pied ».
Les agriculteurs européens et nombre
d’opérateurs, de même, ne veulent rien
entendre, quant à la perte
quasi-mortelle du marché russe. De quoi
révéler la facticité d’une Union où les
intérêts nationaux et privés se
préoccupent fort peu des décisions
dictées par Washington à Bruxelles.
Surtout que l’U.E a prouvé qu’elle est
plutôt source de délabrement économique,
si l’on prend en compte le sort fait aux
pays qui ont adopté les directives du
Traité de Lisbonne, tels la Grèce, le
Portugal, l’Espagne, Chypre (du sud)…
sans préjudice de la dégradation
drastique des conditions de vie de
dizaines de millions de personnes, en
France, en Italie, en Grande-Bretagne et
dans les ex-démocraties populaires.
Devant cela, comble du cynisme le
gouvernement de Kiev compte déposer une
demande d’adhésion à l’U.E, en 2020.
Compte-t-il durer jusque là ? Rien n’est
moins sûr.
Ahmed Halfaoui
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