Religion
L'islam, la
Palestine et les musulmans vivant dans
l'hexagone
Youssef
Girard
Jeudi 16 août 2012
Pour
toutes ces raisons, les musulmans vivant
dans l’hexagone doivent s’engager
pleinement pour soutenir le peuple
palestinien et sa résistance car les
musulmans ont un devoir impératif de
solidarité avec ce peuple mais aussi
parce qu’au travers de ce soutien les
musulmans participent directement à leur
auto-émancipation en tant que «
communauté paria », pour reprendre un
concept de Max Weber. Paraphrasant le
slogan que le Fatah clamait à la fin des
années 1960 –
« L’unité arabe passe
par la libération de la Palestine »[-
nous pouvons affirmer que l’émancipation
de la communauté musulmane vivant dans
l’hexagone empruntera nécessairement le
chemin du soutien à la Palestine, à son
peuple et à sa noble résistance.
Youssef Girard:16-08-2012
« Je suis l’Islam
fort, je ne sors pas d’une terre dans
laquelle je suis rentré, je ne sors pas
des cœurs que j’ai remplis ».
Cheikh Abdelhamid Ben
Badis (1889-1940)
Toute personne attestant de l’unicité
divine, tout musulman et toute musulmane
porteur du message de l’unicité divine (at-Tawhid)
devient dépositaire d’une responsabilité
l’engageant envers Allah et envers les
Hommes. Le musulman et la musulmane ont
le devoir impératif d’accomplir un
certain nombre d’actes de dévotion
qu’Allah leur a prescrit. Ces actes
quotidiens ont pour objectif premier de
rappeler au croyant et à la croyante la
présence de leur Créateur. A propos de
la prière, Allah nous dit dans le Coran
: « Point de divinité en dehors de
Moi. Adore-moi et accomplis la Salat
pour te souvenir de Moi »[1].
De la même manière que la prière, le
jeûne du mois de Ramadan ou le
pèlerinage à la Mecque sont des rappels
de la présence divine qui jalonnent
toute la vie du croyant et de la
croyante. Dans le Saint Coran, Allah dit
: « Il vous est prescrit de jeûner à
l’instar de ceux qui vous ont précédés,
afin que vous manifestiez votre piété »[2].Dans
le but de se souvenir d’Allah, le Coran,
dont l’un des autres noms est « le
rappel » (al-dhikr), insiste
sur l’importance de la remémoration de
la présence divine : « Et rappelle
;car le rappel profite aux croyants »[3].
Perspective
immanente de l’islam
Toutefois, en islam, le rappel de la
présence divine ne se limite pas
uniquement au culte que l’on rend à
Allah. La remémoration de la présence
divine doit orienter l’ensemble de
l’existence et de l’action du musulman
et de la musulmane. Dans le Coran, Allah
dit au Prophète (BSDL) : « Dis : Ma
prière et mes actes de dévotion, ma vie
et ma mort sont pour Allah, le Maître
des mondes qui n’a point d’égal. Tel est
l’ordre que j’ai reçu et auquel je suis
le premier à me soumettre »[4].
Dans un autre verset, Allah dit :
« Certes Allah a acheté aux croyants
leur personne et leurs biens pour leur
donner le paradis »[5].
Si l’on se réfère à ces versets
coraniques, nous pouvons conclure que
l’islam n’a pas uniquement pour fonction
de s’occuper de l’existence de l’Homme
après sa mort. L’islam n’est pas une
religion qui s’intéresse exclusivement
au bien être des âmes ou aux questions
métaphysiques. En islam, la foi
transcendante qui relie l’Homme à son
créateur, doit avoir un impact immanent
sur le monde d’ici-bas. La foi du
croyant ou de la croyante ne doit pas
rester enfermée dans l’intimité de son
cœur ou au sein de la « sphère de sa vie
privée » mais elle doit nécessairement
irradier son environnement social. Cette
foi doit avoir une efficacité sociale
permettant au croyant de participer à la
transformation du monde afin d’œuvrer à
la promotion d’un idéal de justice.
Allah dit : « Allah vous commande la
justice »[6].
Dans un autre verset, Allah
interpelle les croyants et les croyantes
en disant : «Ô vous les porteurs de
la foi ! Tenez vous fermes comme
témoins, devant Allah, en pratiquant la
justice »[7].
Mettant en garde contre le fait de
s’associer à ceux qui sont adeptes de
l’iniquité et de l’injustice, Allah dit
: « Ne vous rangez pas du côté de
ceux qui commettent des injustices, de
peur que le Feu ne vous atteigne »[8].
Plaçant au cœur de son projet social
l’idéal de justice, l’islam s’intéresse
à la vie de l’au-delà comme à la vie
d’ici-bas, à l’individu comme à la
société, au rapport transcendant de
l’Homme avec son Créateur comme aux
rapports sociaux existants entre les
Hommes. De ce point de vue, l’islam a un
caractère englobant.
L’islam demande aux musulmans de
s’engager pleinement dans la voie tracée
par Allah à tous les niveaux de leur vie
afin de lutter pour la justice contre
l’oppression, pour la libération des
opprimés sur la terre, al moustadh`afin
fil-ardh, contre les oppresseurs
orgueilleux, al moustakbirin,
pour la libération des Hommes et de la
terre contre les agressions
impérialistes et la colonisation. Dans
son essence, l’islam s’oppose à la
conception d’une religion se détournant
du drame du monde dans lequel nous
vivons, pour ne s’intéresser qu’à la vie
spirituelle et au bien être des âmes.
Quel qu’en soit le prix à payer, le
musulman et la musulmane ne peuvent pas
se détacher du monde dans lequel ils
vivent. Ils ne peuvent pas renoncer à
avoir un impact sur la société dans
laquelle ils évoluent car la réclusion
monastique n’appartient pas à la
tradition prophétique. Le musulman et la
musulmane doivent vivre leur foi dans ce
monde avec les Hommes en suivant la
prescription coranique de «
témoigner devant l’humanité »[9].
De ce fait, le musulman et la
musulmane ne peuvent pas se résigner à
accepter une vie humiliante et la vision
d’un monde injuste, en pensant
uniquement à leur devenir individuel sur
cette terre et à leur vie future dans
l’au-delà car cette démission devant
l’adversité est en contradiction avec
l’injonction divine appelant les Hommes
à agir et à influer sur le monde dans
lequel ils vivent. Le musulman et la
musulmane doivent continuellement lutter
pour promouvoir la justice : « Nous
avons, certes, créé l’homme pour une vie
de lutte »[10].
Insistant sur l’importance de
l’action et de la lutte, Allah dit :
« Les croyants sont ceux qui croient en
Allah et en son Prophète – puis qui n’en
doutent plus – et luttent dans le chemin
d’Allah avec leurs biens et leurs
personnes. Voilà qui sont les véridiques
»[11].
Dans la mise en œuvre de sa volonté
d’influer sur le monde, le musulman et
la musulmane seront inévitablement
confrontés à l’adversité. Ils seront
immanquablement mis à l’épreuve par
Allah qui évaluera ainsi la profondeur
de leurs convictions, la sincérité de
leur foi et la détermination de leur
engagement. Dans le Saint Coran, Allah
dit : « Certes, Nous vous mettons à
l’épreuve pour reconnaître ceux d’entre
vous qui combattent et souffrent pour
Notre cause, et pour apprécier votre
comportement »[12].
Dans un autre verset, Allah
questionne le musulman et la musulmane
sur la sincérité et l’endurance de leur
engagement : « Pensiez vous entrer
au paradis sans qu’Allah ait jamais mis
à l’épreuve la sincérité et l’endurance
de ceux d’entre vous qui combattent pour
Lui ? »[13].
Parmi toutes les épreuves auxquelles
les musulmans et les musulmanes sont
confrontés tout au long de leur
existence, leur capacité à s’engager, à
lutter et à persévérer dans cette voie
est l’une des plus déterminantes même si
les croyants ont parfois une certaine
répulsion à remplir leurs devoirs du
fait des sacrifices qu’ils impliquent.
L’importance de ces sacrifices peut
entraîner une sorte de paralysie les
empêchant d’agir comme ils le devraient.
A ce propos, Allah dit dans le Coran :
« On vous a prescrit l’obligation du
combat et c’est une chose que vous
n’aimez guère. Or il se peut que vous
n’aimiez pas une chose alors qu’elle est
dans votre bien ; et il se peut que vous
aimiez une chose alors qu’elle est dans
votre mal. Allah sait et vous ne savez
point »[14].
D’ailleurs ceux qui s’engagent
activement et ceux qui restent passifs
face au drame du monde qui les entoure,
n’ont pas la même valeur auprès de leur
Créateur. Expliquant la valeur de ceux
qui s’engagent dans son chemin, Allah
dit : « Ne sont pas sur un même
niveau ceux des Croyants qui restant
(chez eux) sans empêchement physique et
ceux qui combattent sur le chemin
d’Allah avec leurs biens et leurs vies.
Allah a élevé d’un degré ceux qui
combattent avec leurs biens et leurs
vies au-dessus des inactifs. A tous, Il
a promis la meilleure (part) mais Allah
a favorisé les combattants sur les
inactifs par un salaire immense »[15].
Ces versets coraniques montrent
l’importance et la valeur déterminante
de l’engagement social et politique en
islam. La capacité des musulmans et des
musulmanes à lutter en faveur de la
justice est une épreuve déterminante
dans leur vie spirituelle. Dans un
hadith, le Prophète Mohammed (BSDL)
affirma : « Quiconque parmi vous
constate un mal qu’il le fasse
disparaître de sa main. S’il ne le peut,
que ce soit de sa langue, sinon qu’il le
fasse par la conscience, ce qui
constitue la plus faible expression de
la foi »[16].
La capacité d’engagement des
musulmanes et des musulmans est une
épreuve, une sorte d’« évaluation »,
pour connaître la sincérité de la foi du
croyant. Si cette foi ne possède pas
d’influence sur l’environnement social
du croyant, si elle ne rayonne pas, cela
montre son inefficience et son
inefficacité. Dans ce cas, cette foi est
tout simplement stérile. Une conception
de la foi uniquement centrée sur
l’individu est dans l’incapacité de
transformer l’environnement social dans
lequel vivent les croyants. Une telle
conception est en totale contradiction
avec la perception de la foi qu’avaient
les musulmans des premières générations
de l’islam. Loin d’être uniquement
centrée sur l’individu, la foi des
premiers musulmans est parvenue à servir
de socle pour bâtir une civilisation.
Islam et
anticolonialisme
Si elle est efficiente, la foi du
musulman doit le pousser à soutenir la
justice contre l’injustice, les opprimés
contre les oppresseurs. Dans le cadre de
ce soutien aux opprimés victimes
d’injustices, la lutte contre le
colonialisme et l’Occident impérialiste,
qui menacent l’intégrité de la oumma,
devient une obligation islamique pour
nombre de ouléma et d’intellectuels
musulmans. Selon Mounir Chafiq, le
colonialisme occidental qui a soumis le
monde musulman par le fer et le feu,
prouve que le jihad « doit
resté présent dans la conscience des
musulmans, astreints à une guerre
déclarée par leurs ennemis ». Pour
l’intellectuel palestinien, ils’agit d’«
une question vitale pour la nation qui
[…] peut […] par ce moyen chasser
l’occupant de ses terres et éloigner les
glaives qui la menacent »[17].
Sur cette question, la position de
Mounir Chafiq n’est pas nouvelle parmi
les ouléma et les intellectuels
musulmans. En avril 1955, dans une fatwa
énoncée quelques mois après le
déclanchement de la Révolution
algérienne, le second président de
l’Association des ouléma musulmans
algériens, le cheikh Bachir El Ibrahimi,
dénonçait clairement le colonialisme
comme étant intrinsèquement contraire à
l’islam : « L’Islam et le
colonialisme sont deux extrêmes, qui ne
peuvent jamais se rencontrer. L’Islam
est la religion de la liberté et de
l’émancipation alors que le colonialisme
est la religion de la servitude. L’Islam
a instauré la pitié, la charité et
préconise la pratique du bien et de la
justice ; le colonialisme lui, repose
sur la dureté et la tyrannie. L’Islam
appelle à la résignation et à la
stabilité, pendant que le colonialisme
appelle à la destruction et à la ruine.
[…] Le colonialisme renie tout cela et
travaille à ruiner ces principes et plus
particulièrement ceux de l’Islam dont il
combat l’essence, le Prophète, le Coran
et les adeptes »[18].
De cette opposition radicale de
l’islam au colonialisme, le cheikh
Ibrahimi en déduisait l’obligation pour
tout musulman et toute musulmane de
combattre le colonialisme et
l’impérialisme : « Aussi, nous
déduisons de tout cela que le
colonialisme est le pire ennemi de
l’Islam et par voie de conséquence de
tous les gens de confession musulmane.
Aussi sachant que le colonialisme est
l’ennemi le plus acharné de leur
religion, il est du devoir de tous les
musulmans d’appliquer cette règle
islamique ; le combattre et non le
défendre et être hostile à
l’impérialisme occidental et au
colonialisme sous toutes ses formes »[19].
Cette fatwa du cheikh Ibrahimi
s’inspirait directement des préceptes
coraniques incitant les musulmans à
prendre parti en faveur des opprimés,
des moustadh`afin. Ainsi, Allah
nous dit dans le Coran : « Et
qu’avez-vous à ne pas combattre dans le
sentier d’Allah, et pour la cause des
faibles : hommes, femmes et enfants qui
disent : « Seigneur ! Fais-nous sortir
de cette cité dont les gens sont
injustes, et assigne-nous de Ta part un
allié, et assigne-nous de Ta part un
secoureur » »[20].
Aujourd’hui qui sont ces opprimés
qu’Allah incite les musulmans à secourir
sinon les martyrs de Palestine ? Qui
mérite le soutien actif des croyants si
ce n’est le peuple palestinien qui
depuis plus de soixante ans est victime
de la colonisation sioniste, de la
politique de l’Occident impérialiste qui
soutient activement cette colonisation,
et des relais arabes et musulmans de
l’Occident qui participent directement à
l’oppression du peuple palestinien ?
La question palestinienne occupe une
place centrale dans la lutte mondiale
pour la justice contre l’oppression
coloniale. La Palestine est le «
territoire-guide »[21]
vers lequel se tourne le visage de
tous les résistants à la domination de
l’Occident impérialiste. Elle est
devenue le symbole de la résistance à la
colonisation et à l’impérialisme
notamment dans le monde arabo-islamique.
Selon Mounir Chafiq, tous les ouléma et
penseurs musulmans « condamnent
l’occupation israélienne et refusent de
reconnaître l’Etat d’Israël ». Ils
« sont unanimes et considèrent que
la cause palestinienne est une cause
islamique et que seul le jihad islamique
libèrera la terre de Palestine »[22].
Pour Mounir Chafiq, l’Etat sioniste
n’est pas uniquement une menace pour la
Palestine. Il est « un danger pour
la nation musulmane qu’il souhaite
dominer » et « la canne sur
laquelle s’appuie l’Occident »[23].
En mars 2012, au cours d’une
rencontre organisée par le Comité de
Soutien à la Résistance en Palestine,
qui rassemble les représentants des
organisations palestiniennes et
libanaises engagées dans la résistance à
l’occupation sioniste, le représentant
du Jihad islamique palestinien au Liban,
Hajj Abou ‘Imad Rifa‘i expliquait la
centralité de la lutte de libération
nationale palestinienne pour l’ensemble
du monde musulman. Hajj Abou ‘Imad
Rifa‘i affirmait : « La bataille
pour al-Qods n’est pas une bataille
foncière, mais une grande bataille
civilisationnelle, une bataille entre
deux voies : celle du colonialisme
barbare qui veut imposer sa domination
sur la terre et asservir les gens,
confisquer leur liberté et effacer leur
civilisation, déformer leur histoire,
voler leur sacralité et piller leurs
ressources, qui mène des guerres, qui
tue, qui réprime et terrorise, qui
incendie les mosquées et les oliviers,
qui confisque la terre, sème les
colonies… et la voie de la libération et
de la lutte pour l’être humain, qui veut
la libération de la terre, la
récupération de la liberté humaine, qui
affirme son humanisme, qui résiste à la
corruption, qui se bat, qui résiste et
qui se défend, au service de l’humanité
toute entière. La bataille pour al-Qods
n’est pas une bataille entre les
Palestiniens et les sionistes, mais une
bataille entre le vrai et le faux. Ou
bien le vrai et la réforme remportent la
victoire, ou alors le faux et la
corruption s’étendent et dominent.
[…] Ce qui se déroule aujourd’hui,
dans al-Qods, c’est un conflit relatif à
l’identité et à la dignité »[24].
La question palestinienne a une
résonance particulière au sein des
peuples arabes et musulmans en raison
des liens spécifiques qui unissent
organiquement ces peuples au peuple
palestinien.
La
Palestine et al-Qods dans une
perspective spirituelle
Géographiquement situé au centre de
la oumma arabo-islamique,
l’asservissement de la Palestine est
vécu comme une attaque dirigée contre
l’ensemble des peuples arabes et
musulmans qui, malgré leurs luttes de
libération nationale, vivent toujours
sous le joug de l’Occident impérialiste.
Cette domination occidentale empêche ces
peuples de recouvrir pleinement leur
souveraineté politique, économique et
culturelle, préalable indispensable à
toute renaissance nationale-culturelle
de la oumma arabo-islamique. La
Palestine apparaît comme le point
paradigmatique de la résistance des
peuples arabes et musulmans en lutte
pour reconquérir leur capacité
d’initiative historique.
La symbolique religieuse entourant la
Palestine renforce la centralité de
cette question dans l’identité
civilisationnelle des peuples arabes et
musulmans mais aussi dans leur
mobilisation concrète. Le Coran décrit
la Palestine comme une terre sainte[25]
et une terre béniepar Allah[26] qui fut
un refuge pour les opprimés[27].
La Mosquée al-Aqsa, dont le Coran
nous dit qu’Allah a « béni les
alentours »[28],
fait d’al-Qods une ville chère au cœur
de l’ensemble des musulmans. Dans la
tradition musulmane, la Mosquée al-Aqsa
est décrite comme le second lieu de
prière ayant vu le jour sur terre.
Questionné au sujet du premier lieu de
prière consacré à Allah bâti sur terre,
le Prophète (BSDL) affirma : « C’est
la Mosquée Sacrée [la Kaaba] ».
« Ensuite ? » lui demandèrent
ses compagnons. « C’est la Mosquée
al-Aqsa », répondit le Prophète
(BSDL). « Combien de temps entre les
deux [constructions] ? »
demandèrent-ils. Le Messager d’Allah
(BSDL) répondit : « 40 ans »[29].
Les musulmans ont tous en mémoire cet
événement capital de la vie du Prophète
(BSDL), ayant eu lieu environ deux ans
avant l’hégire à Médine, qu’est
l’ascension et le voyage nocturne –
al-isra’ wa al-mi‘raj – au cours
duquel Allah transporta Mohammed (BSDL)
de la Mosquée de la Mecque à la Mosquée
al-Aqsa[30]. La place de cet évènement
majeur de l’islam est d’autant plus
centrale dans la tradition musulmane que
c’est au cours de ce voyage nocturne
qu’Allah institua les cinq prières
quotidiennes qui représentent le second
pilier de l’islam.
Après leur émigration à Médine en
622, le Prophète (BSDL) et ses
Compagnons ont accompli, pendant 16 ou
17 mois, leurs cinq prières quotidiennes
le visage tourné en direction d’al-Qods
qui fut la première Qibla des musulmans.
Il fallut attendre la deuxième année
après l’émigration du Prophète (BDSL)
vers Médine pour que les musulmans
prient le visage tourné vers la Kaaba.
Après que la direction de la prière
fut réorientée en direction de la Kaaba,
la mosquée al-Aqsa conserva une valeur
particulière pour les musulmans.
Expliquant cette place, le Prophète
(BSDL) affirma : « On ne doit
voyager que vers trois mosquées : la
Mosquée Sacrée, ma Mosquée que voici
[celle de Médine], et la
Mosquée al-Aqsâ »[31].
Le Prophète (BSDL) souligna qu’en dehors
de ces trois mosquées, il était inutile
de voyager spécialement pour se rendre
dans une mosquée ou bien qu’il était
autorisé d’entreprendre un voyage
cultuel uniquement vers ces trois
mosquées. Un jour alors que les
Compagnons du Prophète (BSDL) se
demandaient quelle mosquée, entre celle
de Médine et celle d’al-Qods, avait le
plus de valeur auprès d’Allah, le
Messager d’Allah (BSDL) leur répondit :
« Une prière dans ma mosquée est
meilleure que quatre prières là-bas.
Pourtant, quel excellent lieu de prières
! »[32].
La Palestine
et al-Qods dans une perspective
historique
Au-delà de cette perspective
spirituelle, la centralité de la
Palestine, dans l’imaginaire
arabo-musulman, est aussi liée à
l’histoire spécifique du monde
arabo-islamique. En janvier 637, les
armées du second calife de l’islam, Omar
ibn al-Khattab, partirent à la conquête
d’al-Qods alors aux mains des Byzantins.
Omar ibn al-Khattab accorda sa
protection aux habitants de la ville au
terme d’une lettre remise au patriarche
chrétien Sophrone. Il garantit la
sauvegarde des lieux de culte chrétien
et ordonna à ses hommes de ne pas les
détruire et de ne pas les utiliser comme
habitations. De même, en 638, Omar ibn
al-Khattab permit aux juifs de retourner
à al-Qods après avoir été chassés de
Palestine en 135 après J-C par les
Romains suite à la deuxième révolte
juive.
Lors de sa venue dans la ville d’al-Qods,
Omar ibn al-Khattab visita l’église de
la Résurrection. Au moment de la prière,
il s’éloigna de l’église et fit sa
prière en dehors de son enceinte. Omar
ibn al-Khattab craignait que les
musulmans des générations futures ne
prennent le prétexte d’une prière du
second Calife de l’islam à l’intérieur
de cette église pour la transformer en
mosquée. Omar ibn al-Khattab rédigea un
décret interdisant aux musulmans de se
réunir en ce lieu pour y prier afin de
préserver les droits des fidèles
chrétiens. Le Calife se rendit aussi sur
le Haram ash-sharif où il effectua ses
prières à l’endroit où se situe la
Mosquée al-Aqsa. Les gestes du Calife
montraient le respect qu’il avait pour
les religions ayant précédé l’islam dans
la ville.
La résistance aux croisades
(1095-1270), qui frappèrent durement une
civilisation alors florissante, fut un
autre moment historique important dans
l’affirmation de la centralité de la
Palestine aux yeux de la oumma
arabo-islamique. Les exactions des
Croisés marquèrent durablement la
mémoire des peuples arabo-musulmans. A
partir du 15 juillet 1099, jour de la
prise d’al-Qods par les Croisés, pendant
trois jours la ville fut livrée aux
pillages et aux massacres : les juifs
réfugiés dans la grande synagogue furent
brûlés vifs ; poursuivis de maison en
maison, des musulmans furent passés au
fil de l’épée ou vendus comme esclaves.
Les musulmans réfugiés dans la Mosquée
al-Aqsa furent mis à mort. Al-Qods fut
vidée de toute sa population musulmane.
Les juifs rescapés furent rachetés à
Ascalon par leurs coreligionnaires
d’Egypte.
Décrivant ces massacres, le
chroniqueur Albert d’Aix écrivait : les
Croisés « s’étant réunis en un seul
corps, coururent vers le palais en
poussant de grandes clameurs et faisant
beaucoup de bruit, portèrent secours à
ceux de leurs frères qui les avaient
devancés, et massacrèrent sans pitié
tous les Sarrasins, qu’ils rencontrèrent
dans la vaste enceinte de ce bâtiment.
Le sang coula en si grande abondance
qu’il se formait en ruisseaux sur les
pavés de la cour royale, et que les
pieds des hommes en étaient baignés
jusqu’aux talons »[33].
Chanson de geste écrite par Richard le
Pèlerin et Graindor de Douai La
Conquête de Jérusalem célébrait
ces massacres : « Jérusalem est
prise ; la cité est aux mains des
chrétiens. […] Les chrétiens les tuent,
c’est un véritable massacre, la terre
est couverte de sang et de cervelle. […]
La Ville sainte fut totalement dévastée
ce jour-là; Sarrasins et païens meurent
dans les pires tourments. […] Le
massacre dura jusqu’à la mort du dernier
païen ».
Enfin la résistance de figures
héroïques telles que Nour ad-Din ibn
Zenqi (1146-1174) ou Salah ad-Din al-Ayoubi
(1171-1193), finit d’imposer la
centralité de la Palestine et d’al-Qods
dans l’imaginaire politique et religieux
des peuples arabo-musulmans.
Le vendredi 2 octobre 1187, lorsque
Salah ad-Din al-Ayoubi reprit al-Qods
aux mains des Croisés, le chef musulman
ne délivra pas uniquement une ville.
Salah ad-Din al-Ayoubi libéra une
civilisation menacée en son cœur. Dans
cette lutte civilisationnelle, Salah ad-Din
al-Ayoubi mit en œuvre les préceptes de
l’islam et suivit l’exemple d’Omar ibn
al-Khattab dans son respect pour les
religions juives et chrétiennes. Salah
ad-Din al-Ayoubi ordonna à ses hommes de
n’inquiéter aucun chrétien qu’il soit
franc ou autochtone. De plus, il fit
protéger les lieux de culte chrétien
afin d’éviter toute forme de
représailles de la part des musulmans.
Seule la croix franque, installée sur le
Dôme du Rocher, fut retirée et la
Mosquée al-Aqsa, qui avait été
transformée en église, redevint un lieu
de culte musulman. Les synagogues qui
avaient été fermées par les Croisés,
furent rendues à la communauté juive. La
politique de Salah ad-Din al-Ayoubi de
respect des différentes religions était
clairement inspirée par les
enseignements du Prophète (BSDL) et les
actions de ses Compagnons.
Cette perspective historique est
particulièrement importante car, pour un
intellectuel musulman comme Mounir
Chafiq, « le conflit
islamo-israélien est une continuité du
conflit qui opposa l’Islam à la
colonisation et aux Croisés jadis »[34].
Comment ne pas voir une poursuite de
l’œuvre des croisades lorsque les
puissances coloniales britannique et
française, qui colonisaient déjà une
grande partie du monde musulman, se
mirent d’accord pour découper le Machrek
arabe à leur unique profit au moment des
accords Sykes-Picot en mai 1916 ? Ces
accords permirent l’institution de
mandats sur les territoires des nouveaux
Etats dessinés par les puissances
tutélaires : Liban et Syrie sous
domination française ; Irak, Jordanie et
Palestine sous domination britannique.
Entre 1921 et 1947, le mandat
britannique permit le développement de
la colonisation sioniste prélude à
l’expulsion des Palestiniens et à la
création de l’Etat sioniste. N’est-ce
pas le général britannique Edmund
Allenby entrant dans Jérusalem le 9
décembre 1917 qui affirma : « Les
Croisades se sont terminées aujourd’hui
! » ? N’est-ce pas le général
français Henry Gouraud, entrant dans
Damas soumise par les Français en
juillet 1920, qui déclara en frappant le
tombeau de Salah ad-Din al-Ayoubi : «
Réveille-toi Saladin, nous sommes de
retour. Ma présence ici consacre la
victoire de la croix sur le croissant »
?
La perspective spirituelle et
historique explique la place centrale de
la Palestine dans l’imaginaire
arabo-musulman empli des représentations
de la Mosquée al-Aqsa et de la ville
d’al-Qods. Ces données spirituelles et
historiques permettent de mieux
comprendre les mobilisations massives en
faveur de la Palestine que nous pouvons
observer de Dakar à Djakarta depuis
bientôt un siècle.
La Palestine
au cœur de la résistance
anti-impérialiste
Dès 1938, le président de
l’Association des ouléma musulmans
algériens, le cheikh Abdelhamid Ben
Badis, dénonçait le colonialisme
britannique et le sionisme qui avaient
« blessé le cœur de l’Islam d’une
blessure qui ne guérira pas ».
Expliquant la centralité de la Palestine
dans l’imaginaire musulman, le cheikh
Abdelhamid Ben Badis affirmait que le
conflit opposait « d’une part le
sionisme et le colonialisme anglais et
d’autre part l’Islam et les Arabes ».
Selon lui, « le champ de bataille »
était « l’esplanade de la
Mosquée al-Aqsa et tout musulman
responsable » avait « la
responsabilité auprès de Dieu le Très
Haut sur tout ce qui se passe là-bas ;
toutes les personnes tuées, tous les
enfants devenus orphelins, toutes les
femmes devenues veuves, tous les biens
qui s’y dépensent, toutes les maisons
qui y sont détruites, tous les lieux
sacrés violés, tout cela c’est comme si
ça se passait à la Mecque ou à Médine
dans la réalité, s’il n’œuvre pas à
faire cesser cette injustice atroce avec
ce qu’il peut faire »[35].
Dans la même perspective, en mars
2012, lors de la rencontre organisée par
le Comité de Soutien à la Résistance en
Palestine, le cheikh Hassan Nasrallah a
expliqué l’importance de la ville d’al-Qods
aux yeux des musulmans : « al-Qods,
dans ses multiples aspects, est une
question unique dans le monde actuel,
elle est incomparable : ville sainte
située sur une terre sainte, ville bénie
située dans un environnement béni, elle
est le lieu de rassemblement des
religions célestes. Elle est présente
dans notre doctrine, notre culture,
notre conscience et la conscience de
milliards d’êtres humains, musulmans et
chrétiens dans le monde. Aucune ville au
monde ne ressemble à al-Qods ».
Face à la politique coloniale
sioniste, le cheikh Hassan Nasrallah
ajoutait : « Al-Qods fut de tout
temps l’axe des conflits dans la région,
elle l’était au siècle dernier et l’est
encore aujourd’hui et le sera demain
dans l’avenir. Il s’agit de dominer la
région qui a été parcellisée par les
accords de Sykes-Picot, et aujourd’hui,
c’est le projet de domination sous
l’appellation du projet du nouveau
Moyen-Orient que les résistances et les
pays de la fermeté ont fait échouer. […]
Aujourd’hui, al-Qods est visée par une
campagne systématique de judaïsation,
les lieux saints musulmans et chrétiens
sont bafoués et profanés, elle vit la
menace de la destruction, de la terreur
et de l’annihilation. Ses habitants
autochtones et historiques sont menacés
d’expulsion et de déportation en vue
d’en faire une ville vidée de ses
habitants musulmans et chrétiens.
Concernant les responsabilités, je
considère que tout Palestinien, Arabe,
musulman et chrétien doit assumer la
responsabilité nationale, morale,
croyante et religieuse envers cette
ville sainte, envers son avenir et son
identité »[36].
Dans le monde arabo-islamique, le
soutien populaire à la Palestine
s’exprime le plus souvent en opposition
aux dirigeants des pays arabes et
musulmans qui restent soumis aux
injonctions de l’Occident impérialiste.
A Gaza, pour accomplir leur sale
besogne, les sionistes ont pu bénéficier
du fidèle soutien des petits Pharaons
arabes et musulmans. L’Occident
impérialiste leur dicte sa loi mais cela
entraîne l’hostilité croissante des
peuples arabes et musulmans. Le soutien
actif de l’Egypte d’Hosni Moubarak, et
de la réaction arabe, au blocus de Gaza
démontre le degré de félonie régnant
chez les laquais de l’Occident dans la
région.
Tous ces éléments donnent un
caractère civilisationnel à la lutte de
libération nationale palestinienne et à
la résistance à la domination sioniste.
Pour Hajj Abou ‘Imad Rifa‘i
l’alternative est simple : « ou bien
la nation arabo-islamique confirme sa
présence et sa capacité à défendre ses
lieux saints et à protéger son identité
civilisationnelle, historique et
doctrinaire, ou bien elle annonce sa
mort, sa défaite et sa soumission totale
à la volonté du sionisme et à la
domination coloniale occidentale ».
Dans ce cadre, les révolutions arabes
peuvent jouer un rôle décisif dans la
lutte civilisationnelle pour la
libération de la Palestine. Selon Hajj
Abou ‘Imad Rifa‘i, « les révolutions
arabes qui ont renversé des régimes et
des gouvernements liés à l’Occident,
doivent poursuivre leur chemin pour
renverser la voie du règlement et des
négociations, soutenue par le régime
arabe officiel »[37].
Pour Hajj Abou ‘Imad Rifa‘i, le
mouvement islamique doit jouer un rôle
fondamental dans la remise en cause des
politiques de capitulation et de
renoncement mises en place par les
régimes arabes inféodés à l’Occident
impérialiste : « Nous comptons
aujourd’hui sur les mouvements
islamiques pour lesquels les masses de
notre nation ont massivement voté, car
la nation voit dans l’Islam le salut et
la fin de toute injustice, de toute
oppression et de l’ignorance. Le
mouvement islamique porte une lourde
responsabilité, celle de protéger
l’avenir de la nation, de protéger ses
lieux saints, de libérer la terre «
d’al-Isra’ wal-mi`raj ». Nous disons
clairement que le mouvement islamique,
que l’Occident cherche aujourd’hui à
noyer dans des problèmes internes, et à
lui susciter des crises à tous les
niveaux, ce mouvement islamique ne
pourra réussir dans ses tâches s’il ne
s’oriente pas vers al-Qods et la
Palestine, qui doivent être leur « qibla
». Le mouvement islamique ne pourra
surmonter les crises économiques et
sociales, et affronter les pressions
occidentales, ni maintenir le soutien
populaire à ses côtés, s’il ne dirige
pas son fusil vers la Palestine, et
qu’il annonce son intention de libérer
al-Qods. Al-Qods est la capitale qui
rassemble les peuples de notre nation.
Elle rassemble et ne divise pas. Elle
est effectivement la capitale également
des Arabes et des musulmans »[38].
Certains « officiels » musulmans sont
allés jusqu’à manipuler l’islam pour
tenter de justifier « islamiquement »
l’oppression du peuple palestinien en
apportant un soutien aveugle à des
gouvernements complices. Contre de tels
agissements, les musulmans ne peuvent
pas soutenir les dirigeants politiques
et autres responsables musulmans
uniquement parce qu’ils se réclament
formellement de l’islam. Seul le strict
respect des principes de justice et de
résistance à l’oppression peut être
soutenu par des musulmanes et des
musulmans attachés à leurs principes
fondamentaux. Les dirigeants arabes et
musulmans, qui acceptent la domination
occidentale, doivent être dénoncés avec
autant de fermeté que leurs maîtres
impérialistes. Le Prophète (BSDL)
enseigna que « le meilleur jihad est
une parole véridique dite face à un
tyran »[39]. Même
s’ils ne peuvent pas être qualifiés de
tyrans, cette position de principe est
aussi valable pour les responsables
communautaires musulmans qui, en France,
ferment les yeux sur ce qu’il se passe
en Palestine.
Expliquant le devoir de résistance
des musulmans et le refus qu’ils doivent
exprimer devant toute forme de
capitulation, de renoncement et de
soumission, Allah dit : « Restez
fermes sur vos positions ! Nous aussi,
nous sommes avec vous à attendre ! »[40].
En France, la communauté
arabo-musulmane est particulièrement
active dans le soutien à la Palestine et
son avenir social et politique dépend
directement de son aptitude à se
mobiliser sur cette question. Alors que
les représentants des intérêts
impérialistes et sionistes veulent
mettre à l’index la communauté musulmane
en lui imputant la responsabilité «
d’importer le conflit » afin de
discréditer son action, sa capacité à
résister à cette offensive idéologique
est la seule preuve de sa force et de sa
maturité politique.
Allah dit dans le Coran : « Allah
ne modifient point l’état d’un peuple
tant que les individus qui le composent
ne modifient pas ce qui est en eux-mêmes
»[41]. Communauté
« en soi » c’est-à-dire communauté
n’ayant pas encore conscience
d’elle-même en tant que force sociale
agissante, le soutien actif apporté à la
Palestine est en train de transformer la
communauté musulmane en communauté «
pour soi » c’est-à-dire ayant pris
pleinement conscience de son rôle
sociopolitique.
Ce rôle de la Palestine dans la
transformation de la communauté
musulmane vivant dans l’hexagone se
manifeste aussi dans la préservation de
son identité. Contre les perspectives
dépersonnalisantes d’un « islam de
France », néo-shu’ubite,
le soutien à la Palestine est un des
éléments majeurs de la perpétuation d’un
lien civilisationnel « indissoluble »
entre le monde arabo-islamique et la
communauté musulmane vivant dans
l’hexagone[42]. Le soutien actif apporté
à la Palestine constitue un élément d’un
retour collectif à soi et un point focal
de la réaffirmation identitaire de la
communauté musulmane contre la politique
assimilationniste de l’Etat français et
de ses appareils idéologiques.
En raison de cette fonction du
soutien à la Palestine dans la prise
d’initiative historique de la communauté
musulmane vivant dans l’hexagone, nombre
d’acteurs sociopolitiques, mus par un
esprit néocolonialiste nauséabond ou par
un « fraternalisme » suranné, condamnent
toute affirmation identitaire spécifique
dans la mobilisation en faveur de la
cause palestinienne. Ils cherchent par
là à enrayer toute expression politique
autonome de la communauté musulmane qui
pourrait remettre en question la
suprématie idéologique et culturelle du
« centre » hégémonique au cœur même de
l’Occident. Ils se situent dans une
tradition occidentalocentriste,
soucieuse d’homogénéité, qui refuse
d’entendre les sociétés et les cultures
différentes, dissemblables et
contestataires.
Face aux partisans, avoués ou non, de
la suprématie de l’Occident, la capacité
des musulmans vivant dans l’hexagone à
soutenir activement la lutte de
libération du peuple palestinien au cœur
même du « centre » impérialiste doit
être la démonstration de l’aptitude des
musulmans à assumer leurs
responsabilités historiques vis-à-vis
des opprimés de Palestine et d’ailleurs
en remettant en cause la domination
occidentale au sein même de l’Occident.
Le soutien de la lutte du peuple
palestinien bouleverse la situation
sociale et politique de la communauté
musulmane vivant en France en lui
permettant de s’affirmer comme
communauté autonome consciente
d’elle-même.
Pour toutes ces raisons, les
musulmans vivant dans l’hexagone doivent
s’engager pleinement pour soutenir le
peuple palestinien et sa résistance car
les musulmans ont un devoir impératif de
solidarité avec ce peuple mais aussi
parce qu’au travers de ce soutien les
musulmans participent directement à leur
auto-émancipation en tant que «
communauté paria », pour reprendre un
concept de Max Weber. Paraphrasant le
slogan que le Fatah clamait à la fin des
années 1960 – « L’unité arabe passe
par la libération de la Palestine »[-
nous pouvons affirmer que l’émancipation
de la communauté musulmane vivant dans
l’hexagone empruntera nécessairement le
chemin du soutien à la Palestine, à son
peuple et à sa noble résistance.
Youssef Girard
[1] Coran 20 : 14
[2] Coran 2 : 183
[3] Coran 51 : 55
[4] Coran 6 : 162-163
[5] Coran 9 : 111
[6] Coran 16 : 90
[7] Coran 5 : 8
[8] Coran 11 : 113
[9] Coran 2 : 143
[10] Coran 90 : 4
[11] Coran 49 : 15
[12] Coran 47 : 31
[13] Coran 3 : 142
[14] Coran 2 : 216
[15] Coran 4 : 95
[16] Rapporté par
Mouslim.
[17] Chafik
Mounir,
L’Islam et les défis du monde
contemporain,
Beyrouth, al-Bouraq, 1995, pages 235-236
[18] Nadjib
Achour, « Défendre le colonialisme c’est
faire la guerre à l’islam », URL :
http://www.hoggar.org/index.php?option=com_content&view=article&id=3013:defendre-le-colonialisme-cest-faire-la-guerre-a-lislam-cheikh-el-ibrahimi&catid=193:achour-nadjib&Itemid=36
[19]
Ibid.
[20] Coran 4 : 75
[21] Fanon
Frantz, « La guerre d’Algérie et la
libération de l’homme », El Moudjahid,
n° 31, 1er
novembre 1958, in.
Pour une révolution
africaine, Ecrits politiques,
Paris, Ed. La Découverte, 2001, page
168.
[22] Chafik
Mounir,
L’Islam et les défis du monde
contemporain,
op. cit.,
page 247
[23]
Ibid.,
page 251
[24] Rim al-Khatib,
« Al-Qods, capitale de la Palestine, des
Arabes et des musulmans », URL :
http://www.ism-france.org/analyses/Al-Qods-capitale-de-la-Palestine-des-Arabes-et-des-musulmans-article-16716
[25] Coran 5 :21
[26] Coran 21 : 71 ;
21 : 81
[27] Coran 7 : 137
[28] Coran 17 : 1
[29] Rapporté par al-Boukhari
[30] Coran 17 : 1 ;
53 : 13-18
[31] Rapporté par al-Boukhari
et Mouslim
[32] Rapporté par
al-Hakim. Reconnu authentique par adh-Dhahabi
et al-Albani. Une prière effectuée dans
la Mosquée du Prophète (BSDL) à Médine
valant 1 000 prières, une prière dans la
Mosquée al-Aqsa en vaut 250.
[33] D’Aix
Albert,
Histoire des faits et gestes dans les
régions d’outre-mer, depuis l’année 1095
jusqu’à l’année 1120 de Jésus-Christ,
URL :
http://remacle.org/bloodwolf/historiens/albertaix/croisade6.htm
[34] Chafik
Mounir,
L’Islam et les défis du monde
contemporain,
op. cit.,
page 251
[35] Ben Badis
Abdelhamid, « Palestine la Martyre »,
ach-Chihab,
août 1938, in.
Textes choisis,
Alger, ANEP, 2006, pages 225-228
[36] Rim al-Khatib,
« Al-Qods, capitale de la Palestine, des
Arabes et des musulmans »,
art. cit.
[37]
Ibid.
[38]
Ibid.
[39] Rapporté par Ibn
Majah et Ahmad. Authentifié par
al-Albani.
[40] Coran 11 : 121 –
122
[41] Coran 13 : 11
[42] Pour une
analyse critique du discours sur l’«
islam de France » cf. notre article, «
De la
shu’ubiyya au
sein de la communauté musulmane vivant
dans l’hexagone », URL :
http://www.ism-france.org/analyses/De-la-shu-ubiyya-au-sein-de-la-communaute-musulmane-vivant-dans-l-hexagone-article-16982
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