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Opinion
Syrie: Un complot
aux épisodes connus
Soraya Hélou
Bachar al-Assad - Photo: Sana
Vendredi 29 avril 2011 Si quelqu’un avait encore des doutes
sur la spontanéité des soulèvements populaires en Syrie, il
devrait désormais être convaincu du contraire. Le déroulement
des événements montre en effet même au plus sceptique des
observateurs qu’il s’agit bel et bien d’un complot soigneusement
établi et dont les épisodes ressemblent étrangement à du déjà
vu.
Un petit rappel s’impose. Depuis le début des émeutes en Tunisie
et en Egypte, les milieux du Courant du Futur ont commencé à
annoncer des troubles en Syrie. Le chef des Forces Libanaises
avait même déclaré ouvertement qu’il y aurait des soulèvements
en Syrie et qu’il n’était absolument pas d’accord avec ceux qui
disaient qu’en raison de ses choix politiques, la Syrie était à
l’abri des revendications. Cela ne signifie naturellement que
ces parties politiques seraient impliquées dans le complot, mais
simplement qu’elles en étaient plus ou moins informées.
Vers la mi-mars, et alors que les manifestations en étaient à
leurs débuts à Deraa, une délégation saoudienne s’est rendue en
Syrie et aurait proposé au président Bachar Assad de songer
sérieusement à revenir dans le giron arabe et à défaire son
alliance stratégique avec l’Iran, en contrepartie de quoi il
bénéficierait de l’appui total du royaume et des pays arabes en
général. L’erreur du régime syrien a sans doute été de rester
fidèle à ses principes et peut-être de faire preuve d’une trop
grande confiance dans l’appui populaire à ses choix. Cet appui
reste (au moins jusqu’à présent), mais les ennemis du régime se
sont aussi bien organisés. Très vite, les événements se sont
succédés. De Deraa, les émeutes se sont étendues à Lattaquié et
à Banias, puis à Homs et Alep, à Douma et dans les environs de
la capitale Damas. Dans le même temps, des commandos en cagoule
montaient les différentes ethnies les unes contre les autres, en
disant aux habitants que ceux des autres communautés voulaient
les tuer.
Bref, il s’agissait de semer la peur et la haine raciale et
religieuse entre les composantes de la société syrienne. En même
temps, les médias dits de l’opposition ont commencé à prendre de
l’ampleur, alors que les chaînes d’information en continu arabes
se relayaient pour donner des tribunes aux opposants. Qui avait
en effet entendu parler d’al Barada TV ou de la chaîne AL Cham ?
Et voilà qu’elles s’imposent soudainement sur la scène
médiatique disposant de moyens technologiques considérables.
Comme malgré tout, les opposants ne parvenaient pas à mobiliser
une grande masse populaire, il leur fallait faire du couler du
sang, pour avoir des images qui frappent les esprits et
convainquent l’opinion publique internationale de « la
sauvagerie » du régime syrien. Il y a donc eu le guet-apens de
Banias contre une unité de l’armée et le pays s’est ainsi vu
plongé dans une sorte de chaos.
Pourtant, le régime ne s’est pas montré plus faible. Au
contraire, tout en lançant un train important de réformes, il a
réagi avec fermeté contre les fauteurs de troubles. Ceux-ci
devaient donc passer à une étape plus sophistiquée du plan qui
consiste à annoncer des défections des gens du régime. Il y a eu
ainsi les démissions super-médiatisées de deux députés à Deraa
et l’annonce de démissions en masse de membres du parti Baas,
pour montrer que le régime n’a plus la confiance de ses membres
et qu’il ressemble à un navire en plein naufrage, abandonné par
ses passagers. La prochaine étape consistera à pousser les
membres qui ont fait défection à former « un conseil
révolutionnaire en exil », qui obtiendra la reconnaissance des
Occidentaux et de leurs alliés arabes, alors qu’ils n’ont aucune
légitimité populaire.
En parallèle, les émissaires se rendront à Damas pour renouveler
les conditions occidentales au maintien du régime : à savoir
évidemment la rupture de l’alliance avec l’Iran. C’est
d’ailleurs le message porté par le ministre émirati des AE qui a
rencontré récemment le président Assad. En principe, le plan est
bien rôdé et selon certaines estimations il aurait coûté la «
modeste » somme de deux milliards de dollars, pour préparer les
cellules d’opposants, les armer, assurer les relais médiatiques
etc. Il aurait même été établi depuis plus de deux ans mais il
fallait attendre le moment propice pour l’exécuter, profitant
ainsi de la vague d’aspiration à la liberté qui secoue
actuellement le monde arabe. Il faut le reconnaître, l’idée est
intelligente: d’une part, la communauté occidentale et Israël
inquiets des révoltes arabes et du vent de démocratisation
qu’elles génèrent, cherchent ainsi à les récupérer et d’autre
part, ils parviennent enfin à briser cet axe de la résistance
qui empoisonne Israël. Elle est intelligente certes, mais se
concrétisera-t-elle ?
Le régime syrien bénéfice de l’appui de larges couches de la
population, qui rejettent le chaos, l’extrémisme et sont
satisfaites à la fois des options politiques du régime et des
réformes déjà entamées. De plus, ce régime a depuis des années
joué le rôle de stabilisateur dans la région et le chaos aurait
forcément des répercussions sur ses voisins et enfin, il dispose
encore de nombreuses cartes à jouer s’il se sent réellement
acculé. Alors qui remportera la partie ? Un régime qui jouit de
l’appui de son peuple ou des fauteurs de troubles manipulés par
l’étranger er dépourvus de plan clair et de légitimité ? Les
partisans du régime annoncent la fin de la partie au plus tard
dans un mois. Les plans sont en tout clairs et à chacun de
choisir son camp.
Article publié sur Résistance islamique au Liban
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