Moyen-Orient
L'Occident et un
Moyen-Orient sans chrétiens
Soraya
Hélou
Une église
au Moyen-Orient / AFP
Lundi 24 décembre 2012 Jour
après jour le plan occidental pour la
région se précise. Il s’agit en réalité
d’un plan israélien adopté, faute
d’imagination, par l’Occident,
Etats-Unis en tête. L’idée directrice
est de préserver les intérêts d’«Israël»
qui, en dépit des accords de paix
conclus avec l’Egypte et la Jordanie et
des contacts discrets avec certains
Etats du Golfe continue à ne pas être
accepté par la grande majorité des
Arabes et doit faire face à un axe de
plus en plus puissant, celui de la
résistance ou comme on dit en arabe de
la «moumanaa». Les grands stratèges qui
se sont penchés sur la question ont
trouvé que les régimes dictatoriaux en
place étaient devenus un poids pour
l’Occident et que le mieux était donc de
s’en séparer pour mettre en place des
régimes islamistes sur le modèle turc ou
qatari qui calment les populations tout
en respectant les accords conclus avec
«Israël» et en oeuvrant pour des
négociations de paix entre islamistes et
juifs. Si dans le cadre de l’application
de ce plan, les minorités dans la
région, en particulier chrétiennes se
sentent menacées et condamnées au
départ, cela ne dérange nullement
l’Occident en principe chrétien, mais
qui a de moins en moins de foi et qui ne
pense plus qu’à ses intérêts
économiques. De plus, l’idée de mettre
en place des entités musulmanes qui
justifieraient l'entité sioniste ne
déplait pas non plus à l’Occident qui
pense que ce type d’entités garantit la
sécurité d'«Israël» bien mieux que le
bouclier anti-missiles et les aides
militaires américaines massives aux
israéliens. C’est dans cet esprit que l’armée
américaine pourtant largement déployée
sur place, n’a rien fait pour protéger
les chrétiens d’Irak dont la moitié a
quitté le pays. Tout comme aujourd’hui
l’Occident en général ne fait rien pour
les chrétiens de Syrie ouvertement
menacés par les groupes salafistes comme
Jabhet al Nosra et d’autres. Même en
Egypte où il y a plus de dix millions de
coptes, les Etats-Unis et leurs alliés
ont mollement condamné les dérives
totalitaires du président Frère musulman
Mohammed Morsi, estimant que tant qu’il
ne remet pas en cause les accords de
Camp David signés avec «Israël», il peut
faire ce qu’il veut de son pouvoir. Il
est donc désormais clair que s’il n’y a
pas un plan véritable pour pousser les
chrétiens du Moyen Orient à l’exode, il
y en a au moins un pour donner le
pouvoir dans la région aux groupes
islamistes, sous la bannière des Frères
musulmans, même si cela devait entraîner
un exode massif des chrétiens de la
région. Pour l’Occident, l’intérêt prime
donc et dans la balance, les chrétiens
de la région, dont le nombre n’atteint
pas les 20 millions, ne pèsent pas
lourd. Si le prix pour assurer la
sécurité d’«Israël» est leur départ, eh
bien qu’ils partent. D’ailleurs, comme
le déclarent ouvertement certains
diplomates européens en poste à
Beyrouth, les chrétiens du Liban et même
de Syrie et d’Irak sont ouverts aux
cultures occidentales et s’intègrent
bien dans les sociétés européennes et
américaines. Encore un peu ils diraient
qu’ils leur rendent un grand service en
leur donnant des visas pour l’Europe ou
l’Amérique ! Ce que ces diplomates ne disent pas mais
que les centres de recherche américains
et autres évoquent, c’est que si les
régimes islamistes refusent de signer la
paix avec «Israël» et de protéger sa
sécurité, ils devront faire face à une
discorde entre sunnites et chiites que
les Occidentaux ne cessent d’alimenter.
De la sorte, ils seront neutralisés et
«Israël» aura la paix. Par contre, si
les chrétiens sont encore dans la
région, il sera difficile de planifier
cette discorde sans passer par des
massacres de chrétiens qui feront
certainement réagir le Vatican et les
populations chrétiennes dans le monde.
Ce n’est donc pas un hasard si le chef
de l’Eglise catholique le Pape Benoît
XVI a insisté pour venir au Liban en
septembre dernier, en dépit des conseils
qui lui ont été donnés de reporter cette
visite historique à plus d’un titre. En
tant que responsable de la plus grande
Eglise dans le monde, le Pape a voulu
montrer, à partir du Liban qui abrite la
communauté chrétienne de la région qui a
une influence sur la politique du pays,
l’importance de garder les Chrétiens
d’Orient sur leur terre. Un message qui
ne plaît pas beaucoup aux Occidentaux,
qui ont depuis longtemps, mis de côté
les valeurs véhiculées par leur religion
au profit de leur nouveau Dieu qui porte
un seul nom : intérêt.
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