Syrie
Le Loutfallah II
et le complot planétaire contre la Syrie
Soraya Hélou
Mercredi 2 mai 2012
La
décision de l’Arabie saoudite et du
Qatar d’armer l’opposition syrienne
n’est plus des paroles en l’air. Ces
régimes frères qui se disent des amis du
Liban n’ont rien de trouvé de mieux pour
l’aider que de l’utiliser comme point de
passage pour y faire transiter les armes
vers la Syrie. Pour eux, le Liban est
une scène et les Libanais des exécutants
qui n’ont pas leur mot à dire. Ils n’ont
en fait pas tort, puisqu’il est clair
que leurs alliés libanais du 14 mars
exécutent leurs décisions avec
enthousiasme et zèle, peu soucieux
d’entraîner leur pays vers une
catastrophe certaine. C’est ainsi
qu’après de multiples incidents sur des
découvertes de dépôts d’armes à Tripoli
et même à Achrafieh, voici que le bateau
Loutfallah II qui devait débarquer sa
marchandise suspecte (plus de 150 tonnes
d’armes et de munitions diverses souvent
assez sophistiquées) à Tripoli a été
arraisonné par l’armée libanaise,
mettant ainsi en avant l’une des plus
grosses arrivées d’armes vers le Liban
depuis la guerre civile. L’itinéraire et
la destination de ce bateau soulèvent de
nombreuses interrogations, d’abord sur
les complicités dont il a bénéficié
depuis son départ d’un des ports de
Libye en passant par la Turquie et
l’Egypte et ensuite sur le rôle de la
Finul maritime chargée en principe de
contrôler les navires qui arrivent dans
les ports libanais pour vérifier qu’ils
ne transportent pas d’armes. Mais la
question la plus grave porte surtout sur
l’utilisation finale de ces armes à un
moment où le Liban s’engage chaque jour
un peu plus dans les turbulences en
Syrie, au détriment de sa propre
stabilité interne.
Le
périple du Loutfallah II confirme donc,
pour ceux qui avaient encore des doutes
sur le sujet- l’existence d’un complot
global visant la Syrie à travers
l’armement de l’opposition. L’objectif
du complot est clair : puisque nous
n’avons pas réussi à faire chuter le
régime de Bachar Assad, il faut donc
plonger le pays dans la violence à
travers l’armement massif de
l’opposition et même des groupes les
plus sanguinaires de cette opposition.
On connaissait l’implication de la
Turquie dans le complot, ainsi que celle
de certains pays du Golfe. On ignorait
par contre la complicité de l’Egypte et
surtout la complaisance de la Finul,
force onusienne de paix chargée de
préserver la stabilité entre le Liban et
"Israël" et d’empêcher le transfert
d’armes vers le Hezbollah au Liban.
Désormais, il n’y a plus d’illusions à
se faire, le Conseil de sécurité qui
prétend vouloir préserver la paix
mondiale n’hésite pas à fermer les yeux
sur un transport massif d’armes vers le
Liban et la Syrie, lorsque ces armes
sont destinées aux ennemis de l’axe de
la résistance.
Les
armes du Loutfallah II étaient donc
destinées à des Syriens installés au
Liban. Pour quel usage ? La question
reste posée. En principe, les armes
devaient ensuite être envoyées aux
opposants syriens, mais qui sait si au
passage, des parties libanaises ne se
seraient pas servies au passage. Au cas
où…Voilà une nouvelle preuve que le 14
mars et en particulier le Courant du
Futur qui s’apprête à célébrer la
commémoration des événements du 7 mai
2008 lorsqu’il s’est considéré comme une
victime des armes du Hezbollah n’hésite
pas à se procurer des armes lorsqu’il
croit pouvoir affronter la résistance.
On est donc loin de l’image de la
victime désarmée qui refuse le choix des
armes et opte constamment pour la
démocratie et la lutte pacifique. Le
Courant du Futur est ainsi pris à son
propre piège.
Un
nouvel élément est aussi mis en évidence
par l’affaire du Loutfallah II. Il porte
sur le fait que les opposants syriens
ont désormais leur propre infrastructure
au Liban nord. On savait qu’ils avaient
des points d’ancrage, et même des
hôpitaux qu’ils contrôlaient, on sait
désormais aussi qu’ils ont aussi des
réseaux complets de passage et même
accès au port de Tripoli. Ceux qui
reprochent à la résistance d’avoir
établi un Etat dans l’Etat devaient se
pencher sur l’Etat des opposants syriens
au Liban nord, avec ses camps de
réfugiés et son infrastructure
propre…Est-ce ainsi que l’on protège la
souveraineté du Liban ? La question doit
être méditée.
Enfin,
un dernier point doit être encore
soulevé, celui de l’attitude de l’armée
libanaise, véritable protectrice de la
souveraineté et de l’intégrité
territoriales libanaises, qui a réagi
avec fermeté et rapidité pour
arraisonner le bateau Loutfallah II.
Elle a accompli son devoir, mais qui lui
a fourni les informations nécessaires
sur le périple suspect du bateau
incriminé ? Il faut donc supposer qu’il
existe, face au complot planétaire
contre la Syrie, une coopération étroite
entre des parties libanaises, régionales
et internationales qui veulent contrer
le complot et préserver un équilibre
international des forces. La lutte est
ouverte, mais par leur faute et à cause
de leur manque de discernement, une
partie des Libanais y sont
impliqués…Dans ce contexte, que signifie
encore la politique de rester à l’abri
des événements de Syrie décrétée par le
gouvernement libanais ? Et qui mettra un
terme aux tentatives de ceux qui veulent
à tout prix que le feu syrien brûle
aussi au Liban ? Heureusement, l’armée
libanaise l’a montré, il y a encore au
Liban des forces nationales qui veulent
préserver la stabilité et qui ont à cœur
l’intérêt de leur pays et celui de la
région.
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