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Yediot Aharonot
Les
gamins de Gaza ne jouent pas
Roï Peled D'après
l'armée, les enfants palestiniens « font partie de la machine de
guerre palestinienne »
Yediot Aharonot, 3 octobre 2007
http://www.ynetnews.com/articles/1,7340,L-3445181,00.html
Sur le site officiel qui commémore les victimes de Tsahal, on
trouve ce qui suit sur Nissim Gini : « Il s¹est porté
volontaire, comme des dizaines de ses jeunes camarades, pour défendre
sa ville et sa patrie, et a demandé à jouer un rôle On lui a
assigné comme tâche de faire la liaison entre les positions
militaires, et il a rempli sa mission avec la responsabilité et
la loyauté d¹un adulte, sous des grêles de balles et des
explosions
assourdissantes... après que l¹une des positions fut prise par l¹ennemi,
il a été blessé, puis est mort dans d¹atroces souffrances. Il
avait dix ans. La plus jeune des victimes israéliennes de la
guerre. »
L¹histoire de Nissim Gini nous fut racontée quand nous étions
en primaire, lors d¹une promenade sur les traces des héros de la
guerre d¹Indépendance. Elle nous fut racontée sous la forme d¹une
histoire de bravoure, et personne n¹osait alors dire quoi que ce
soit pour condamner ces héros qui recrutaient un gamin de 10 ans.
Je me suis souvenu de cette histoire en lisant un tas de clichés
de la part du porte-parole de Tsahal qui réagissait à la mort d¹enfants
à Gaza.
Ce porte-parole nous sortait des slogans destinés à nous rendre
plus facile l¹idée des conséquences terribles de nos attaques
sur Gaza. Il s¹agit ici d¹une réelle inquiétude à l¹égard
de l¹opinion publique, d¹une crainte que des citoyens, rendus
plus conscients des souffrances causées en notre nom, puissent se
mettre à poser des questions sur les actes de Tsahal à Gaza et
exiger des réponses.
De tous ces slogans, de tous ces mensonges, les plus révoltants
concernent le mal fait à la population civile.
« Il est regrettable que les Palestiniens agissent délibérément
au sein de la population civile » : cliché utilisé chaque fois
que l¹armée de l¹air tire un missile sur un véhicule qui
circule au milieu d¹un marché et tue des
civils.
Quand des enfants sont tués sur ce que Tsahal qualifie de «
sites de lancement de Qassam », l¹explication est que « les
Palestiniens savent très bien que ce sont des zones où il ne
faut pas pénétrer. »
Mais ces « zones interdites » ont été définies arbitrairement
par Israël, et s¹étendent sur plusieurs dizaines de km2 dans la
bande de Gaza. Contrairement à ce que l¹on croit généralement,
de nombreux Palestiniens n¹ont aucune idée de l¹endroit où se
trouvent exactement ces zones. Et les enfants qui, l¹après-midi,
parcourent les dunes de sable n¹en ont très certainement aucune
idée.
Si l¹on suit la logique de Tsahal, les enfants palestiniens ne
traversent jamais les champs sans raison particulière, tout comme
les gamins israéliens, par exemple, ne jouent jamais avec les
obus non éclatés, car
tout le monde sait que les obus sont dangereux (1). Comme ils ne
jouent jamais avec les armes à feu, car chacun sait qu¹elles
sont dangereuses. Et ,si un tragique accident de la sorte se
produit en Israël, tout le monde parlera de tragédie et personne
n¹accusera l¹enfant.
« Les Palestiniens font un usage cynique des enfants » : si l¹on
en croit Tsahal, les enfants tués à Gaza la semaine dernière se
trouvaient sur les lieux pour l¹une ou l¹autre de deux raisons :
soit ils faisaient partie d¹une cellule terroriste particulièrement
jeune, soit ils avaient été envoyés par des groupes terroristes
pour y jouer le rôle de boucliers humains.
Les enfants palestiniens, semble-t-il, ne sont pas faits comme les
enfants israéliens, qui parfois se promènent pour s¹amuser, et
parfois cherchent l¹aventure, surtout par ennui. Quand un enfant
palestinien est tué par
Tsahal, il a très certainement fait quelque chose de très mal.
Dommage qu¹ils ne prennent pas exemple sur les juifs de Hebron
qui élèvent de si merveilleuses petites filles.
Les clichés de Tsahal contredisent la réalité et la logique de
quiconque fut un jour enfant. Notre expérience personnelle nous
enseigne qu¹il n¹est pas toujours possible de contrôler nos
enfants. Notre expérience nationale, elle, nous enseigne qu¹un
peuple engagé dans une lutte recrute toutes ses forces.
Une visite sur le site web du ministère de la défense nous
apprend qu¹au moins en ce qui concerne le peuple d¹Israël,
certains d¹entre nous n¹ont pas hésité à recruter des
enfants. Et jusqu¹à ce jour, les gardiens de
l¹héritage continuent à s¹en vanter.
Ces clichés sont acceptés par la société israélienne et par
ses journalistes, dont le sens critique a disparu. La vie est
tellement plus facile quand les enfants palestiniens ne sont qu¹un
bataillon de la machine de guerre palestinienne si sophistiquée
qui nous menace.
Aux yeux d¹un jeune Israélien de 2007, ceux qui ont permis à
Nissim Gini, 10 ans, de devenir soldat ont commis un acte méprisable.
La même chose vaut pour ceux qui laissent des enfants, israéliens
ou palestiniens, s¹approcher de zones qui présentent un danger réel
et immédiat. Mais je peux comprendre
qu¹au cours d¹une lutte à la vie et à la mort, les choses
puissent paraître différentes, aussi bien dans le quartier juif
pendant la guerre d¹Indépendance qu¹à Gaza de nos jours.
J¹ai appris cela sur le site web du ministère de la défense,
qui encense les enfants juifs morts à la guerre. Il est dommage
que le porte-parole de Tsahal ne jette pas plus souvent un coup d¹¦il
sur ce site.
Et une nouvelle fraîche : alors que cet article était sous
presse, l¹enquête de Tsahal a montré que les trois
enfants tués jouaient au catch. Vous imaginez, des Palestiniens ?
Du catch ? Des enfants ? Décidément, on n¹en finira jamais avec
les surprises.
(1) Cette remarque, faut-il le préciser, est ironique, les obus
étant l¹un des jeux favoris des enfants israéliens, au moins
dans les zones frontalières.
* Roï Peled fait partie du bureau politique du Meretz
Trad. : Gérard
pour
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