Depuis qu'il a envoyé ses chaussures sur la tête du
terroriste américain Bush, en signe d'adieu de
l'Irak, le journaliste Muntazar Zaydî est devenu le
héros national dans le monde arabe. Partout, des
manifestations, des rassemblements de soutien, des
articles, des hommages, dont celui-ci, en toute
modestie.
Muntazar Zaydî a relevé la tête des masses arabes,
qui se sont vues toutes entières en train de lancer
leurs chaussures sur la tête de ce criminel.
Certains journalistes, voulant paraître
professionnels, modernistes, occidentalisés, font la
moue. Ils auraient été d'accord si.... D'autres
responsables politiques, se haussant au-dessus des
masses, essaient d'en parler avec détachement, comme
s'il s'agissait d'un acte banal, pour montrer à
leurs maîtres, américains, occidentaux en général,
qu'ils ne sont pas comme ces foules excitées, qu'ils
réfléchissent, qu'ils savent analyser, à tête
froide.
Moi, je l'avoue, j'ai
adoré le geste, et j'ai souhaité que les chaussures
touchent ce criminel en plein front. J'ai même
souhaité que les chaussures aient plus d'effet que
de simples coups. Et je suis certaine que des
milliers et des milliers d'Arabes, et d'autres,
comme Hugo Chavez, par exemple, auraient voulu la
même chose. Peu nous importe qu'il soit journaliste,
que ce geste soit professionnel ou pas, mais le
geste est symbolique. Il résume la situation.
Mais nos sentiments indiquent notre frustration,
aussi. Jusqu'à quand allons-nous applaudir les héros
et ne pas les imiter ? Jusqu'à quand allons-nous
faire la surenchère pour de simples gestes, mais
significatifs, sans pouvoir oser faire de même ?
L'hommage, le véritable hommage par lequel on
pourrait célébrer le geste de Muntazar Zaydî, c'est
de faire la même chose, c'est d'oser frapper
l'ennemi, oser se lever devant lui, oser lui cracher
à la face notre haine, oser l'affronter. Nous en
sommes capables car nous le désirons si fort, mais
jusqu'à quand allons-nous continuer à vivre, par
procuration, des gestes héroïques comme celui-là ?
Des jeux internet sont
parus, pour que nous puissions nous défouler, battre
Bush avec une, deux, trois chaussures. La première
idée qui nous traverse l'esprit c'est : qui veut
nous aider à nous défouler ? Quoi de plus simple que
de lancer des chaussures fictives sur une tête
fictive et faire passer notre rage ? Qui a intérêt à
nous faire ravaler notre énergie dans des jeux
vidéos ???
C'est toute la question. Saurons-nous nous lever
comme Muntazar Zaydî et affronter le véritable
ennemi ??? Et ne pas, ne plus nous contenter de
vivre ces moments décisifs, par procuration ??
Rim