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Tunisie

Ben Ali «superstar» au 1er anniversaire de sa chute
Ridha Kéfi

Samedi 14 janvier 2012

A l’approche de la célébration du premier anniversaire de la chute de l’ex-président Ben Ali, des enquêtes journalistiques, films documentaires et révélations d’acteurs privilégiés remettent ce dernier sur les devants de la scène.
Par Ridha Kéfi

Dans l’entretien qu’il a accordé à la chaîne Watania 1, diffusée jeudi soir, Mohamed Ghannouchi, l’ex-Premier ministre de Ben Ali, qui a également dirigé les deux premiers gouvernements post-révolution, a présenté une version des faits qui se sont déroulés au cours de cette fatidique et décisive journée du 14 janvier 2011, une version du reste très favorable à sa personne. On peut se demander cependant pourquoi M. Ghannouchi a-t-il attendu si longtemps, 9 mois après son départ du gouvernement, pour faire des confessions aussi téléphonées.


Abdallah Kallel, Mohamed Ghannouchi et Foued Mebazaa:
la baguette magique de l'article 56

Ben Ali était prêt à tuer jusqu’à 1000 morts

A en croire l’ex-Premier ministre, Ben Ali lui avait dit, au cours d’un entretien téléphonique, le 14 janvier 2011, peu avant midi, alors que des dizaines de milliers de manifestants rugissaient devant le siège du ministère de l’Intérieur: «Je suis déterminé à faire revenir l’ordre, même s’il faut sacrifier plus de mille morts».

Cette confession, qui ne va pas arranger les affaires de Ben Ali, contredit les affirmations de ce dernier, dans son discours de la soirée du 13 janvier, au cours duquel il avait appelé les forces de l’ordre, sans vraiment les nommer, à ne plus tirer sur les manifestants: «Assez de morts, assez de sang. Il faut faire taire les armes. Assez de cartouches», avait-il dit, fidèle en cela à une habitude qui lui est chère: dire des choses et faire exactement le contraire.


Le général Ali Sériati

Concernant l’entretien téléphonique qu’il a eu, le lendemain matin, avec l’ex-président, qui l’a appelé de Djeddah où il était arrivé la veille au soir avec sa famille, M. Ghannouchi n’a pas fait vraiment de révélation. Il a seulement confirmé la thèse selon laquelle, en quittant Tunis pour Djeddah, Ben Ali comptait bien revenir le lendemain à Tunis, après avoir mis sa famille en sécurité en Arabie saoudite. Sinon pourquoi a-t-il reproché à celui qu’il considérait encore comme son Premier ministre de l’avoir trahi?


L'arrestation du clan des Trabelsi

Cela signifie aussi que l’attribution des prérogatives présidentielles à M. Ghannouchi, environ une heure après le départ précipité de l’ex-président, et ce conformément à l’article 56 de la Constitution, a complètement chambardé les plans de Ben Ali et rendu impossible son retour, d’autant que son départ, aussitôt annoncé comme une fuite, avait été accueilli par les Tunisiens avec une immense joie et un grand soulagement.

Mohamed Ghannouchi fait son propre chef

M. Ghannouchi explique la décision de transfert des prérogatives présidentielles par le contenu d’un entretien téléphonique qu’il a eu avec le colonel Sami Sik Salem, second responsable de la sécurité présidentielle, et adjoint de général Ali Sériati – lequel avait été arrêté après le décollage de l’avion présidentiel sur instruction du ministre de la Défense, Ridha Grira, qui le soupçonnait de fomenter un plan de déstabilisation.


Le général Rachid Ammar.

Le colonel Sik Salem aurait donc demandé, la voix grave et presque lyrique, à M. Ghannouchi d’assumer ses responsabilités et de répondre à l’appel du devoir national en prenant la situation en main, et ce dernier d’y aller de bon cœur, la fleur au fusil. M. Ghannouchi, d’habitude moins présomptueux, a cru pouvoir s’attribuer, aujourd’hui, la paternité de l’entourloupe constitutionnelle en vertu de laquelle il prit en main les commandes de l’Etat, avant de la céder, le lendemain, sous la pression de l’opinion publique, et selon l’article 57 de la même Constitution, au président de la défunte Chambre des députés, Foued Mebazaa, ex-collaborateur du «déchu», devenu président malgré lui.

Où M. Ghannouchi a-t-il puisé ce courage physique et ce savoir-faire constitutionnel qui lui ont permis de carrément… sauver le pays?


Les foules rugissent devant le siège du ministère de l'Intérieur

L’ex-Premier ministre, et président d’un jour, un homme aimable et sans doute intègre, mais sobre et presque effacé sous son allure de commis de l’Etat, y pensait-il, lui aussi, un peu beaucoup, tous les jours, en se rasant le matin (ah, le cachotier!)?

Quand on connait le caractère réservé de l’homme et sa prédisposition presque naturelle à jouer les seconds rôles, on ne peut admettre facilement que la décision de mettre la dernière touche au roman du «renversement» de l’ex-président a été prise par M. Ghannouchi, à la suite d’un entretien téléphonique avec un haut responsable sécuritaire, et mûrie sur la route reliant le Palais du gouvernement de la Kasbah à celui de Carthage.

Difficile de croire, en effet, que M. Ghannouchi, pris par une sorte d’ivresse patriotique et guidé par une inspiration républicaine, aussi soudaine que très opportune, ait décidé de son propre chef d’aller au charbon – autant dire au casse-pipe – , alors que le pays était déjà à feu et à sang, en cette fin d’après-midi trouble (on était entre 17h30 et 18 heures).

Qui a fait quoi, au juste?

Quoi qu’il en soit, et si l’on s’en tient à d’autres récits, qui se recoupent sur de nombreux points, l’entourloupe constitutionnelle qui a offert la direction de l’Etat sur un plateau à M. Ghannouchi, n’aura finalement été que le dernier épisode d’une série d’événements quasi divins qui ont poussé l’ex-président à monter dans son avion personnel pour prendre le chemin de l’Arabie saoudite.


Ridha Grira

Les histoires de l’hélicoptère qui se rapprochait dangereusement du Palais de Carthage, des meutes de manifestants marchant sur le palais présidentiel, de l’arrestation des membres de l’ex-clan présidentiel à l’aéroport de Carthage décidée – de son propre chef, et sur une inspiration tout aussi divine –, par le colonel Samir Tarhouni, du Bataillon anti-terroriste (Bat), ou encore le début du sac des propriétés des Trabelsi, des magasins et autres établissements publics… Tous ces faits devraient pouvoir s’imbriquer, complétés par d’autres éléments du puzzle, notamment le rôle exact joué par l’armée, plus muette que jamais sur ce qui s’est passé ce jour-là, pour constituer une chronique cohérente, précise et qui, surtout, tienne la route.

Beaucoup de mythes devraient aussi être dissipée, car ils contribuent à brouiller le tableau, notamment ceux relatifs au plan de déstabilisation (ou de putsch) mis en route par Ali Sériati, aux éléments de la garde présidentielle à bord de voitures de location bourrées d’armes et qui sèment la terreur dans le pays, aux snipers étrangers ramenés au pays par Leïla et Belhassen Trabelsi – on avait même parlé de snipers israéliens –, du rôle joué par Mouammar et Seif El islam Kadhafi dans un soi-disant plan visant à faire revenir Ben Ali au pays, etc.


Samir Tarhouni

Des enquêtes restent à faire

Ce travail d’enquête, un an après les événements, n’a vraiment pas encore été fait. Certains confrères étrangers (Médiapart, Al-Arabiya…) s’y sont essayés avec plus ou moins de bonheur, mais il reste assez lacunaire, car beaucoup d’éléments manquent. Et si certains acteurs ont été particulièrement bavards (les Tarhouni, Sériati et, plus récemment, Ghannouchi), d’autres sont restés particulièrement muets, et Dieu sait que leur témoignage serait précieux. On pense surtout à Ridha Grira et Ahmed Fria, qui étaient alors ministres de la Défense et de l’Intérieur, ainsi qu’aux généraux Rachid Ammar et Ahmed Choubir, mais aussi à tous les autres hauts responsables de la sécurité.

Nous autres journalistes tunisiens, qui avons fait si peu d’effort pour aider à la révélation de la vérité, sommes les moins bien placés pour critiquer les travaux de nos confrères arabes ou français. Il faut dire que nous sommes très peu à l’aise dans le genre de l’enquête et de l’investigation, et préférons nous occuper – et occuper nos lecteurs – par l’écume des événements, nous attardant sur la surface et l’apparence de l’actualité, prenant pour argent comptant les dires des uns et des autres: c’est facile et ça fait momentanément buzzer.

Cette autocritique s’est imposée à nous, en ce premier anniversaire de la révolution tunisienne, comme une évidence. C’est aussi un appel adressé à tous les confrères et consoeurs pour les inciter à s’engager dans ce travail d’investigation de longue haleine. Un travail que nous devons aux martyrs et blessés qui ont sacrifié leur vie ou leur santé pour nous offrir, sur un plateau, la liberté dont nous jouissons aujourd’hui.

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Publié le 14 janvier 2012 avec l'aimable autorisation de Kapitalis

 

 

   

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Source : Kapitalis
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