|
Politique
Toute honteuse médiocrité bue
Philippe Randa
Lionel Jospin
Il fut une époque où l’on ne frappait pas les
dames, ne serait-ce qu’avec une rose. On ne se permettait pas
non plus de leur cracher dessus. Autre temps, autres mœurs, si
tant est que ces dernières fussent jamais socialistes.
« Tristounet » : c’est ainsi que l’humoriste Laurent Gerra
surnommait Lionel Jospin dans certains sketchs il y a de cela plus
d’une demi-douzaine d’années. La récente manifestation
publique du dernier Premier ministre socialiste confirme cette
qualification.
Dans un livre à paraître – mais dont les « bonnes feuilles »,
comme on dit dans le jargon professionnel, sont déjà parvenues
entre certaines mains chargées de les faire connaître avant
l’heure – ce dernier « flingue » Ségolène Royal. La femme,
la socialiste, la candidate, « personnalité (qui) n’a pas
les qualités humaines ni les capacités politiques » nécessaires
pour remettre le Parti socialiste en ordre de marche et « espérer
gagner la prochaine présidentielle ».
On ne peut être guère moins aimable… et paraître plus aigri,
plus rancunier, plus mauvais camarade que ce Tristounet qui,
rappelons-le, abandonna tout de même le soir de sa seconde défaite,
les troupes qui menèrent deux batailles présidentielles
successives à ses côtés. Il y a toujours de la grandeur à
assumer ses échecs, voir ceux de ses partisans : la désertion de
Lionel Jospin au soir du 5 mai 2002 a prouvé qu’il était
tout… sauf un chef !… sans parler, cinq ans plus tard, de sa
grotesque tentative de « come-back présidentiel ».
On peut apprécier ou non Valéry Giscard d’Estaing, François
Mitterrand ou Jacques Chirac, mais tous les trois firent preuve
d’une tout autre ténacité dans leur carrière politique ; même
le premier qui envisagea et espéra vainement, deux décennies
durant, un bien improbable retour à l’Élysée.
On sous-entend que ce livre a pour objectif de « promouvoir
Bertrand Delanoë » à la tête du Parti socialiste : l’actuel
maire de Paris a sans doute moins à se préoccuper de ses ennemis
que de tels amis.
Ces attaques déshonorantes, loin de nuire à Ségolène Royal, ne
peuvent que renforcer la sympathie à son encontre de ceux qui menèrent
combat à ses côtés… et qui la virent, le 6 mai dernier,
haranguer ses troupes pour qu’elles gardent confiance dans
l’avenir.
La campagne qu’elle avait mené a pu surprendre, c’est le
moins qu’on puisse penser et même laisser franchement sceptique
jusqu’à faire hésiter nombre de ses partisans à lui garder
leur confiance pour une future victoire. Mais son attitude
battante, d’une rare bravoure, ce soir-là, a probablement balayé
leurs doutes et définitivement balayé les ambitions de tous ceux
qui, au sein de sa formation politique, avaient espéré sa défaite,
en y contribuant sournoisement.
Lionel Jospin écrit dans son introduction qu’il a «
quelques titres [à s’exprimer] sans détour » ; fort de
cela, il juge que Ségolène Royal était « la candidate la
moins capable de gagner », mais au moins s’est-il agi pour
elle du second tour. Lui restera à jamais comme le candidat qui a
été incapable de s’y hisser en 2002. À ce titre, des esprits
malicieux lui rétorqueront qu’il était sans doute « le
moins autorisé à le faire », même toute honteuse médiocrité
bue.
© Les chroniques de
Philippe Randa sont libres de reproduction à la seule condition
que soit indiquée leurs origines, c’est-à-dire le site
www.philipperanda.com
|