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Netanyahou doit plus
craindre Platini qu'Obama
Pascal Boniface
Michel Platini - © UEFA
Mercredi 29 septembre 2010
Le président de l’Union européenne des
associations de football (UEFA), Michel Platini, vient
d’affirmer que les mesures israéliennes vis-à-vis du sport
palestinien constituaient une violation des réglementations et
lois internationales en vigueur, susceptible de le pousser à
reconsidérer la qualité de membre de l’UEFA pour Israël.
Michel Platini vient de rencontrer Jibril Rajoub,
président de la Fédération palestinienne de football. Celui-ci a
mis en avant les pratiques israéliennes qui ont pour effet
d’isoler le sport palestinien évoquant les restrictions imposées
pour les allers et venues des sportifs palestiniens et les
difficultés à pouvoir importer des équipements sportifs. Israël
a interdit par ailleurs l’entrée de matériels destinés à
favoriser le développement du sport en Palestine, octroyés en
juillet 2009 par Platini, et qui sont toujours bloqués au niveau
des ports israéliens. Jibril Rajoub a fourni un rapport détaillé
au président de l’UEFA sur les difficultés des sportifs
palestiniens, et notamment des footballeurs, à pouvoir se
réunir, s’entraîner et se déplacer.
Michel Platini a alors déclaré qu’Israël avait
été accepté en Europe et qu’ils doivent respecter les messages
des lois et réglementations sportives internationales, faute de
quoi leur présence en Europe n’aura pas lieu d’être : « Je vais
peser de tout mon poids pour mettre un terme à la souffrance du
joueur palestinien notamment au football et je présenterai cet
état de fait au bureau exécutif lors de la prochaine réunion
prévue en automne 2010 d’autant plus qu’Israël est membre du
bureau exécutif. » C’est un message particulièrement ferme et
tout à fait inhabituel qu’Israël reçoit de la part d’un
organisme international.
Israël avait quitté la confédération asiatique
du fait du boycott des pays arabes et avait été accepté dans les
instances européennes de football. C’est pour cela que les
équipes de clubs israéliens disputent la Champion’s League et la
Ligue Europa, tandis que l’équipe nationale dispute sa
qualification pour la Coupe du monde au sein de la zone Europe
et participe aux qualifications pour le championnat d’Europe des
Nations. En 2002, l’UEFA avait empêché provisoirement des matchs
internationaux de se dérouler en Israël mais pour des
considérations liées à la sécurité et du fait de la menace
d’attentats. Ce n’était en rien une condamnation politique
d’Israël.
Si Platini maintient sa menace, le coût serait
particulièrement lourd pour Israël. La menace de suspension de
la participation des équipes nationales ou de clubs israéliens à
des compétitions européennes serait un coup très dur porté à
Israël. On se rappelle ainsi qu’en 1992, l’équipe de Yougoslavie
avait été écartée du fait du début des guerres balkaniques.
Contrairement à l’ONU avec l’Assemblée générale qui multiplie
les résolutions sans aucune valeur juridique contraignante et où
le Conseil de sécurité est bloqué par le veto des Etats-Unis,
l’UEFA peut prendre de vraies décisions. La visibilité du sport,
son impact quotidien profondément ancré dans les sociétés,
donneraient au débat sur la participation d’Israël à l’UEFA, une
importance politique et symbolique énorme.
On peut penser qu’Israël ne se méprendra pas sur
le message envoyé par Platini en sachant que, pour de simples
raisons d’attachement au sport, il ne cédera pas et que les
moyens traditionnels de pression qui fonctionnent très bien pour
les Etats européens n’auront pas d’effets sur l’instance suprême
européenne sportive. Il est donc très probable qu’Israël revoit
assez rapidement sa politique de restriction des déplacements
des sportifs palestiniens et de la fourniture d’équipements
sportifs à la Palestine. Les dirigeants israéliens sont
suffisamment perspicaces pour savoir quelles pressions sont
réelles ou purement verbales. Et Platini et l’UEFA auront
probablement plus d’impact et d’influence sur leur décision que
les différentes protestations verbales sans consistance des
dirigeants politiques occidentaux.
Pascal Boniface, Directeur de l’ Institut de
Relations internationales et stratégiques (IRIS). Il vient de
publier « 50 idées reçues sur l’Etat du monde aux éditions
Armand Colin.
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