Opinion
L'exploitation
politique d'un événement tragique
N. Raad
Samedi 20 octobre
2012
Peu importe qui a tué le chef du
bureau des renseignements des forces de
sécurité internes libanaises le général
Wissam elHassan hier vendredi à
Achrafiyeh.
Il est évidemment beaucoup moins
important de dévoiler les auteurs de
l’attentat qui a fauché la vie de huit
civils et qui a fait au moins 100
blessés.
Cheikh Abdel Razzak elAsmar, tué dans
des tirs de mitrailleuses survenus dans
la soirée à Tripoli suite à la
confirmation de la mort d’elHassan est
un incident banal auquel on ne doit
prêter la moindre attention,
pareillement à la fermeture des routes
principales à Beyrouth, au Sud, au Nord
et à la Békaa par les partisans du
Courant du Futur.
Les convois des centaines d’hommes
armés qui circulent dans les rues de
Tripoli sont en ce moment légitimes, et
peut-être applaudis !
La seule chose qui importe est la
liste des revendications des forces du
14 mars, en cette occasion en or leur
favorisant, comme à chaque assassinat,
de parvenir à leurs objectifs escomptés.
Depuis la confirmation de cette mort,
les forces du 14 mars ont multiplié
leurs rencontres et leurs interventions
télévisées. Même les responsables des
comités de jeunes de cette coalition
sont devenus des vedettes qui se
concurrencent pour s’exprimer sur
l’événement, incitant leurs partisans à
descendre en masse dans les rues.
Normalement, les parties soucieuses
de connaitre la « vérité » doivent
réclamer une enquête sérieuse et rapide
permettant d’arrêter les criminels.
Mais, dans la presque totalité des
discours prononcés par les dirigeants du
14 mars, les revendications étaient
liées à des sujets purement politiques,
voire électoraux !
Nouhad
elMachnouk, un député du Courant du
Futur, réclame à l’issue d’une réunion
des forces du 14 mars, la démission
imminente du gouvernement, la remise par
le Hezbollah de ses membres accusés par
le Tribunal international pour le Liban
d’implication dans le meurtre de Rafic
Hariri, et le déploiement des forces
internationales à la frontière
libano-syrienne !
Comme prévu, tous les dirigeants de
cette coalition politique ont
immédiatement accusé le régime syrien de
responsabilité, comme le font d’ailleurs
depuis 2005, date de l’assassinat de
l’ancien Premier ministre Rafic Hariri.
Certains d’entre eux, tels Mostapha
Alloush, ont pointé du doigt le
Hezbollah et le régime iranien, alors
que le député Misbah elAhdab a accusé «
l’alliance criminelle irano-syrienne »
dans l’assassinat. D’autres ont appelé à
chasser l’ambassadeur syrien du Liban et
à rompre les liens diplomatiques avec la
Syrie.
Et comme prévu encore, le chef des
Forces Libanaises Samir Geagea s’est
attelé à disculper « Israël » du crime.
Quant à Saad Hariri, chef du Courant du
Futur, il a accusé « Najib Mikati en
personne d’avoir tué Wissam elHassan » !
Pour
leur part, les organisations de jeunes
du14 mars ont appelé à un sit-in ouvert
à la place des martyrs près du grand
sérail jusqu’à obtenir le départ du
gouvernement. Les responsables de ces
comités de jeunes « aspirent à travers
cette mobilisation réaliser le printemps
du Liban », selon l’un d’eux.
Au vu de leurs déclarations- les
forces du 14 mars militent donc pour
retourner au gouvernement afin de
renforcer leur animosité au régime
syrien, resserrer l’étau sur le
Hezbollah et augmenter leurs chances
électorales pour le scrutin législatif
de 2013.
Vraiment, peu leur importe qui a tué
elHassan. Quant aux victimes civiles,
que leurs âmes reposent en paix !
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