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Analyse
Psychanalyse anthropologique de
l'inconscient politique d'un grand agent d'influence
Manuel de Diéguez
Manuel de Diéguez
Lundi 30 novembre 2009
A propos de l'article de Jean-Claude
Casanova in Le Monde
du 17 novembre 2009 intitulé : " Le
temps est venu pour l'Europe de s'émanciper des Etats-Unis
"
1 - De l'innocence en
politique
2 - Les
démocraties jésuitiques
3 - De
la servitude volontaire
4 - De
la servitude institutionnalisée
5 - Les
craquements de l'empire
6 -
L'apprenti sorcier de Walt Disney
7 - La
fin d'un Messie
8 - Une
diversion diplomatique
9 - Le
crime médical est-il un crime contre l'humanité?
10 -
Les nouveaux embarras de l'agent d'influence
11 -
Une exégèse, textes en mains
12 - " Vivre
est une guerre " (Sénèque)
13 -
L'intelligence politique perdue des ancêtres
14 -
L'Europe des enfants
15 -
Les dieux nationaux et les dieux universels
16 - Le spectre de
Talleyrand
1 - De l'innocence en politique
Dans quelle mesure les grands agents d'influence des Etats-Unis
en France le seraient-il en raison de leur ignorance, supposée
abyssale, des relations que les Etats entretiennent entre eux au
gré de leur puissance et dans quelle mesure faut-il, bien au
contraire, considérer, que leurs compétences exceptionnelles
réfutent nécessairement l'hypothèse que le cancer foudroyant de
la candeur politique en aurait fait sa cible? La question semble
tranchée: il n'y a pas de naïveté concevable sur le fond chez
des juristes chevronnés, des serviteurs ardents des intérêts
d'une puissance étrangère, des acteurs à l'aise sur les planches
et qui auront fait leurs preuves de longues années durant aux
yeux des observateurs spécialisés dans l'analyse psychologique
et la détection des "infiltrés" volontaires, conscients
et sûrs de leur mission.
Mais si l'on y
regarde de plus près, le paysage psychique peut changer
entièrement la donne, parce que ce type d'agents obéit presque
toujours à la race des croyants invétérés. Or, la foi ne répond
en rien aux critères courants de la pensée logique. Si je
démontre à un philosophe chrétien qu'il ne saurait revendiquer
le titre de philosophe que par un abus de langage éhonté - la
rigueur de l'argumentation dialectique lui interdit de se faire
octroyer par un tiers omniscient le privilège tout partiel et
limité de penser tout seul - mon pauvre discours glissera sur
lui comme l'eau sur les plumes d'un canard, parce que la piété
obéit à un pilotage cérébral propre à l'imagination religieuse.
Mais il faut également se garder de tomber dans le piège de
confondre l'agent d'influence volant de ses propres ailes avec
les intellectuels moyens, qui croiraient déserter leur cénacle à
traiter d'une question avec franchise et dont l'esprit
componctieux ressortit aux bienséances politiques du moment.
L'agent d'influence responsable n'est pas un boiteux jouant à la
balle. Le latin usait de tournures sans fard pour dépeindre les
acteurs des savoirs convenus, telles que "vagabonder loin de
ses chaussures", "errer de tout son ciel", "n'y
voir goutte en plein soleil", "ignorer combien votre main
a de doigts", "se fabriquer une corde de sable". Le
Gaulois demeuré franc du collier les rend à merveille, avec des
expressions aussi crues que "se trouver à côté de ses pompes",
"aligner des noix sur un bâton" ou "tenir un discours
sans queue ni tête". Si vous confondez l'agent d'influence
de haut vol avec l'intellectuel formaté auquel un pitoyable
apprentissage de la dissertation scolaire aura enseigné l'art de
passer comme chat sur braise à côté de son sujet, vous ne
comprendrez rien aux docteurs du clergé d'Etat et au sacerdoce
qu'exerce désormais la pensée institutionnalisée au sein de la
République et de la démocratie des faux messies de la Liberté.
Il se trouve, de
surcroît, que la chute du mur de Berlin a démontré aux
descendants de La Boétie qu'un souverain de type démocratique
n'est nullement accepté de ses vassaux en raison des intérêts
stratégiques de ses subordonnés - depuis Jules César, il est
toujours censé être accouru en toute hâte afin de les défendre
de quelque Arioviste - mais exclusivement parce que la pente
naturelle de tous les peuples et de toutes les nations de la
terre n'est autre que celle de l'humanité tout entière de se
soumettre à un maître. Le premier défenseur réputé s'être
précipité la main sur le cœur afin de sauver sa créature menacée
de tomber dans le gouffre - mais, en réalité, afin de l'asservir
à jamais à l'éternité de son sceptre - n'est-il pas le Créateur?
Or, dès l'origine, cet acteur du cosmos fait croire que la
noblesse et la justice seraient nécessairement du côté de son
omnipotence, de sorte que l'agent d'influence sûr de lui croit
faire d'une pierre deux coups: d'un côté, se donner un
protecteur hors de pair, c'est se rallier aux forces du "Bien",
de l'autre, c'est se convaincre que les forces du "Bien"
sont immanquablement prédominantes, puisque les puissants
tiennent toujours le haut du pavé en ce bas monde. Le malheur,
c'est que la défaite du souverain et de son ciel sur les champs
de bataille lui révèle, mais un peu tard, que son auréole
n'était que l'éclat de son glaive. On voit que la psychanalyse
politique de l'inconscient dont l'agent d'influence se révèle
l'otage nous conduit au plus secret des relations que le genre
humain entretient avec sa tête. C'est pourquoi il n'y a pas
d'anthropologie critique sans psychanalyse de l'obéissance
sacrée.
2
- Les démocraties jésuitiques
Il
vous faudra donc démontrer preuves à l'appui, que les agents
d'influence de fort calibre se sont mis consciemment au service
d'une puissance étrangère et en apporter une démonstration
tellement irréfutable qu'il serait ridicule de seulement tenter
d'en refuser l'évidence. Or, M. Jean-Claude Casanova, né en
1934, agrégé des facultés de droit et de sciences économiques,
docteur ès sciences économiques et diplômé de l'Institut
d'études politiques de Paris, a bénéficié cette année de
l'honneur de présider l'académie des sciences morales et
politiques. C'est donc à des titres éminentissimes qu'il publie,
dans le Monde du 17 novembre, un article
fracassant en apparence et couvrant une page entière de ce
quotidien: "Le temps est venu pour l'Europe de s'émanciper
des Etats-Unis".
Mais qui croira
qu'un spécialiste de cette envergure ignorerait que la
souveraineté réelle des Etats est incompatible avec l'occupation
armée de leur territoire par une puissance étrangère, qui croira
qu'un historien et un juriste de renom ignorerait que deux cents
bases militaires américaines occupent l'Allemagne depuis
soixante-cinq ans, alors qu'aucun intérêt stratégique ne
légitime une telle violation du droit international en temps de
paix, qui croira qu'une personnalité aussi connue en France et à
l'étranger ignorerait que cent trente sept garnisons
d'outre-Atlantique stationnent en Italie depuis la chute de
Mussolini, qui croira qu'un homme politique ayant appartenu au
cabinet de M. Marcel Jeanneney, Ministre de l'industrie de 1959
à 1961, puis de Joseph Fontanet, Ministre de l'éducation
nationale de 1962 à 1974, tous deux gaullistes, puis de M.
Raymond Barre de 1976 à 1981, qui croira, dis-je, qu'un
intellectuel de cette trempe ignorerait que le port de Naples
est devenu une parcelle inaliénable du territoire de la nation
américaine et que l'extension continue de l'exterritorialité de
la base de Vicenza en Italie permet aux armes du Nouveau Monde
d'assurer la progression patiente de leur main-mise sur
l'Afrique, qui croira que les politologues du monde entier
ignoreraient que les démocraties européennes ont inscrit dans
leur constitution, donc légitimé sur le modèle euclidien
l'occupation perpétuelle de leur sol par les troupes de l'OTAN,
qui sont commandés par un Général du Nouveau Monde et dont le
quartier général se trouve à Mons en Belgique?
La question
décisive que pose le statut politique réel de M. Jean-Claude
Casanova est donc de savoir comment le Département d'Etat entend
exploiter les clauses récentes et libératrices en apparence du
traité de Lisbonne afin de poursuivre, aussi ardemment que
précédemment, la vassalisation du Vieux Continent et surtout son
auto-domestication consensuelle, puisque la singularité de
l'empire américain est de se fonder sur le déclin volontaire de
l'Europe des chancelleries et des peuples.
On
comprendra qu'une psychanalyse politique d'un type relativement
inédit ne pourra se concevoir qu'à partir des paramètres d'une
radiographie des servitudes secrètement désirées auxquelles les
civilisations en voie d'auto-anéantissement entendent se
soumettre; car elles sont conduites à la ruine par les grands
Jésuites des démocraties dédoublées, dont la tête est à Rome et
le corps dispersé sur la terre entière. L'agent d'influence
convaincu est scindé entre Washington et son terroir comme M.
Prasquier entre Jérusalem et la France et il pourrait écrire,
comme le Président du CRIF citant Elie Wiesel: "Nous
pouvons vivre en dehors d'Israël, mais nous ne pourrions vivre
sans Israël."
3 - De la
servitude volontaire
La pesée de
l'influence d'un grand agent de la fatalité exige avant tout une
interprétation anthropologique de ses silences concertés : car
il serait irrationnel de présupposer qu'il n'aurait pas réfléchi
longuement à la face cachée d'une émancipation seulement
apparente de l'Europe de la tutelle de l'étranger, tellement il
paraîtra s'attacher à la promouvoir sous les dehors d'un appel
sincère et même ardent à l'indépendance et à la souveraineté des
peuples en livrée.
C'est pourquoi il
ne saurait ignorer les réflexes religieux de l'humanité: il sait
que la chute du communisme n'a nullement provoqué un soupir de
soulagement des peuples démissionnaires de l'Europe, il sait
qu'elle a permis, bien au contraire aux démocraties du Vieux
Monde de proclamer d'un cœur unanime que leur souverain
bien-aimé n'avait désormais plus d'adversaire à sa taille et
que, par conséquent, l'Europe allait se soumettre sans ambages à
une autorité que sa victoire était censée avoir rendue
incontestable. Certes, quelques esprits candides s'étaient
imaginé que, sitôt sa mission de justicier accomplie, leur
sauveur allait se retirer sous les applaudissements d'un
Continent libéré par la puissance salvatrice du verbe et des
armes de la Liberté. C'est ainsi que Vaclav Havel était allé
prononcer devant le Congrès américain un discours plein d'une
gratitude éperdue. Mais il avait découvert, avec la stupéfaction
des patriotes égarés parmi les grands fauves, que l'Amérique
couronnée des lauriers réservés aux grands rédempteurs ne
l'entendait nullement de cette oreille et que l'heure des
victoires du glaive n'est jamais celle des émotions dévotes,
mais celle des récoltes des guerriers méritants.
La
réaction émue de François Mitterrand avait été plus étonnante
encore: lui aussi avait cru le plus sincèrement, donc le plus
naïvement du monde que les troupes américaines quitteraient
nécessairement l'Europe et que leur retour dans leur patrie
n'était qu'une question de semaines. Aussi avait-il accueilli
avec tact la question un peu larmoyante de M. Bush père, qui lui
avait demandé, avec la gentillesse des saint Baptiste de la
diplomatie: "Voulez-vous vraiment que nous partions?"
4 - De la servitude
institutionnalisée
Mais pourquoi les
hommes politiques européens feignaient-ils avec une belle
unanimité d'ignorer qu'à la suite de la demande d'évacuation du
territoire de la France que le Général de Gaulle avait adressée
aux troupes américaines vingt-sept ans avant la chute du mur de
Berlin, Washington avait pris le plus grand soin de s'assurer de
la présence perpétuelle des troupes américaines dans le monde
entier, et cela non seulement par la conclusion de traités
bilatéraux avec les divers Etats rassemblés sous son sceptre,
mais par l'inscription de la servitude perpétuelle de ses
vassaux dans leurs constitutions respectives, donc dans leur loi
fondamentale?
La
vraie difficulté, pour la diplomatie américaine, n'était donc en
rien celle de légitimer la pérennisation de sa domination sur
les peuples qu'elle s'était assujettis, mais celle d'atténuer le
traumatisme, aux yeux de l'Europe des enfants de chœur,
d'assister au dénudement des Etats et des empires et de
découvrir que l'heure du triomphe des démocraties
bénédictionnelles n'est pas celle des cadeaux, comme il est dit
plus haut, mais de l'engrangement des moissons. Il fallait donc
affecter un instant une finesse inusitée, afin que le temps fît
oublier ubi jacet lepus.
Or, un agent
d'influence plus décoré des médailles de la démocratie française
que les généraux soviétiques d'autrefois sur les champs de
bataille du prolétariat mondial ne saurait oublier l'histoire
réelle de l'Europe, donc passer outre à l'examen, même succinct,
des conditions dans lesquelles les troupes américaines se sont
incrustées à jamais en Europe. Comment feindre l'amnésie au
chapitre de l'absence de toute menace guerrière de la part de la
Russie? Il n'y a pas de lucidité politique sans pesée du destin
du monde. D'un côté, l'agent d'influence dormira sur les deux
oreilles, parce qu'il saura fort bien que jamais l'Europe ne
verra jaillir des masses ballotées de ci, de là, par un suffrage
universel tombé aux mains des démagogues, une élite politique
avertie et résolue à poser les vraies questions aux peuples
réputés avoir recouvré leur liberté.
C'est pourquoi l'agent d'influence affectera de croire que,
depuis 1945 l'opinion des foules serait devenue la clé du destin
du monde et que le pouvoir réel reposerait désormais et à jamais
sur un vote populaire préalablement aliéné par le droit et la
loi de l'étranger. Il écrira donc en toute tranquillité: "La
vague Obama a effacé l'antiaméricanisme." Et il ajoutera
dans la foulée: "Les Européens ont été de tout coeur
favorables à l'élection de Barack Obama, les Américains ont élu
un président qui inspire en Europe une admiration sans réserve."
Mais si le
sommeil politique d'un Continent est un garant de tout repos aux
yeux de l'agent d'influence conséquent, de quel danger son
gabarit est-il menacé ? Pourquoi l'assoupissement de la classe
dirigeante d'une civilisation tout entière ne suffira-t-il en
rien à faire glisser le Vieux Continent dans l'insignifiance ?
Voyez comme notre Jésuite de la Liberté se trouvera contraint de
demeurer sur ses gardes, voyez comme il devra faire preuve d'une
vigilance accrue et de tous les instants s'il entend éviter les
pièges d'une sécurité apparente, alors même que, pour ne prendre
qu'un seul exemple, Mme Merkel et toute la classe dirigeante
allemande ont paru interpréter comme un drame national, non
point le stockage humiliant de centaines de bombes atomiques
américaines sur le sol des Germains, mais le renoncement de
Général Motors à vendre Opel au Canadien Magna?
5 - Les craquements de l'empire
C'est que le vrai
danger n'est plus celui d'un réveil hypothétique des peuples
européens occupés, tellement la résignation aveugle et muette du
Vieux Monde à la présence éternelle de troupes étrangères sur
son territoire est devenue le témoin d'une léthargie politique
inguérissable, mais le danger des craquements de plus en plus
assourdissants dont l'empire américain fait retentir la planète.
Aussi la stratégie qui s'impose désormais le plus impérieusement
à l'agent d'influence chevronné est-elle de faire silence sur la
fragilité soudaine du Saint Siège de la démocratie. Mais si, dès
la quatrième génération, il n'y a plus rien à craindre de la
docilité d'une civilisation vaticanisée par les ignatiens de la
Liberté, que va-t-il se passer si la planète retentit tout
subitement de l'effondrement imminent d'un autre building que
celui du World Trade Center de New-York - celui de l'auréole en
voie de vaporisation du vainqueur de 1945?
Car enfin, que raconte le véritable catéchète de la pièce, celui
qui se prénomme l'histoire? Que David est entré en
campagne la fronde à la main. Nous n'en sommes qu'au premier
acte de la tragédie. Pourquoi Israël a-t-il refusé tout net de
marquer un temps d'arrêt dans la conquête de la Cisjordanie?
Parce qu'après six mois de pause, non seulement il aurait été
relativement difficile de reprendre la représentation à partir
de la première scène du premier acte et d'invoquer, aussi
traditionnellement qu'auparavant "l'échec des négociations"
ou "l'absence d'interlocuteur", mais parce qu'une trêve
illusoire de plus aurait démontré au monde entier que le verrou
est fermé à triple tour depuis un demi siècle et qu'il est trop
tard pour prétendre en forcer la serrure.
Jamais Israël ne
se retirera sur ses frontières de 1967. Mais si un miracle plus
biblique que tous les précédents venait à se produire, il en
faudrait aussitôt un second, de plus forte corpulence encore que
le premier, afin de légitimer aux yeux de Jahvé un retour
colossal d'Allah sur ses terres, puis un troisième plus
herculéen que les deux sus nommés afin de partager la ville
sainte avec les autochtones, puis un quatrième, le plus
titanesque de tous, celui de fonder un Etat viable sur la
légitimation du rapt du territoire d'une vieille nation par un
brigand, et enfin - entassons Pélion sur Ossa - un cinquième, le
dernier de la pyramide, dont la taille s'élèverait jusqu'aux
nues, celui de légitimer en droit international un pseudo Etat
composé de quelques tribus de Peaux-rouges qui auraient accepté,
les malheureux, de porter sur les fonts baptismaux d'une
démocratie gesticulatoire la spoliation triomphale des
trois-quarts ou davantage du territoire de leurs ancêtres.
Aussi Israël
précipite-t-il le Nouveau Monde dans les ténèbres; car voici les
Messies de la Liberté et de la justice pris en otage dans l'Eden
où le Démon leur tend la pomme fatale, voici la démocratie
mondiale contrainte au reniement de tous ses principes, voici
que le démon tentateur précipite dans le grotesque les apôtres
de l'évangélisation planétaire de la politique.
6 -
L'apprenti sorcier de Walt Disney
Israël a jugé qu'il était moins dangereux de tenter
l'affrontement massif et direct de David avec le reste de la
planète des droits de l'homme et, en premier lieu, avec un
empire américain lézardé que de planter une fois de plus des
décors usés jusqu'à la trame. Premièrement, Jahvé demeurera
préservé du péché, même momentané, de faiblesse. A ce compte -
relativement peu coûteux - son peuple bénéficiera du prestige
des héros que leur courage solitaire fait avancer la tête
découverte dans l'arène. Secondement, depuis la guerre de Suez,
l'expansion territoriale continue de l'Etat juif s'opère
nécessairement au détriment du prestige de l'Amérique dans le
monde musulman tout entier. C'est pourquoi le groupe de pression
qu'Israël a puissamment renforcé sur le territoire des
Etats-Unis depuis 1957 avait obtenu, en juin 2009, que le
Congrès votât d'extrême urgence une motion qui demandait à M.
Barack Obama qu'une fois de plus, il imposât à la Palestine des
négociations illusoires, dites "en tête à tête" et dont
le leurre, vieux de trois générations, est devenu traditionnel
entre Israël et les indigènes.
Mais, en ces temps reculés, le Président des Etats-Unis se
trouvait encore en mesure de ne tenir aucun compte des vœux
impérieux des élus d'une nation tombée depuis si longtemps entre
les mains de l'étranger. Pourquoi, six mois plus tard, Israël
a-t-il si bien gagné la première manche qu'il ne reste rien de
la tentative, pourtant déjà désespérée de la Maison Blanche au
Caire le 4 juin 2009 de retrouver dans le monde arabe un lustre
perdu depuis un demi siècle? C'est que Washington s'est résigné
à demander à M. Mahmoud Abbas d'accepter de reprendre des "négociations"
de façade sans qu'Israël suspendît une seconde sa conquête mètre
carré par mètre carré de la Cisjordanie. Mais autoriser un Etat
colonial à poursuivre la conquête du territoire de son voisin
dans un monde décolonisé par l'Amérique à la suite de la
victoire de 1945, c'est quitter la politique pour un festival de
la bande dessinée. Si je dois m'entendre avec un cambrioleur qui
se sera introduit par effraction dans ma demeure et qui se verra
autorisé par les principes de la démocratie à piller mes biens
sous mes yeux, alors Israël est le premier Etat du monde qui ait
fait, de l'Histoire évangélique du monde, une copie du film de
Walt Disney, L'apprenti sorcier.
7
- La fin d'un Messie
La
seconde manche s'annonce également sous les plus heureux
auspices: cette fois-ci, Israël a obtenu en moins de
vingt-quatre heures que le Congrès rejetât à une majorité
massive de quatre-vingt dix pour cent des voix le fameux rapport
Goldstone sur les crimes de guerre commis par des rescapés de la
shoah armés jusqu'aux dents à Gaza. Mais qui a lutté aux côtés
d'Israël pour obtenir par la corruption, donc à prix d'or un
résultat aussi consternant? L'Amérique de M. Barack Obama. Le
renvoi de l'Etat juif devant le Tribunal pénal international
sera-t-il donc enterré , alors qu'il était approuvé par la
grande majorité des Etats représentés à l'ONU? On prétend que M.
Netanyahou aurait regardé le Président des Etats-Unis droit dans
les yeux et lui aurait lancé: "La démocratie a parlé. Vous
voyez que tout le monde ne pense pas comme vous dans la patrie
d'Abraham Lincoln".
Le vrai danger
que court un agent d'influence de nationalité française s'il
opère au service des Etats-Unis dans la presse et sur le sol
même de son pays est le suivant: comment plaiderait-il en
logicien cartésien pour l'émancipation de l'Europe asservie s'il
s'abstient de raconter aux Français l'histoire du monde telle
qu'elle se déroule non seulement sous ses yeux, mais à l'échelle
de la planète tout entière, comment ignorerait-il qu'Israël est
devenu le nœud stratégique de la géopolitique, comment ferait-il
silence sur l'effondrement de l'autorité de M. Barack Obama dans
son pays et sur les cinq Continents, alors que les ossements de
ce messie dorment d'ores et déjà à trois mètres sous terre?
8
- Une diversion diplomatique
Certes, M. Barack
Obama s'est tout soudainement précipité à Pékin et à Tokyo.
Ignorerait-il que le Japon entend obtenir le retrait des troupes
américaines d'occupation stationnées à Okinawa depuis 1945 ?
Ignorerait-il que les petits-fils des victimes d'Hiroshima et de
Nagasaki refusent maintenant de ravitailler les navires de
guerre de l'empire dans l'Océan pacifique? Ignorerait-il que la
Chine achète massivement dans le monde entier et dans sa monnaie
les grandes entreprises qui permettront à l'empire du Milieu de
se débarrasser à toute allure de ses titanesques avoirs en
dollars? Pourquoi le voyage de M. Barack Obama a-t-il été si mal
préparé qu'il courait au désastre, sinon parce qu'il est aux
abois dans son pays et qu'il lui fallait tenter une diversion
qui a tourné à la catastrophe diplomatique?
Car l'Asie n'offre aucun contre-jeu planétaire à la
Maison-Blanche. M. Barack Obama et M. Medvedev ont bien pu
lancer un semblant d'appel commun à l'Iran au cours d'un séjour
de M. Ahmedinejad en Amérique du Sud : personne n'a tenu compte
d'un appel qui a permis, bien au contraire, au peuple des "Lettres
persanes" de s' amuser des tours de passe passe auxquels
la planète se voit livrée plus de deux siècles et demi après la
mort de l'auteur de L'Esprit des lois. Téhéran
n'a-t-il pas feint, lui aussi, et sur un ton gravissime, de
mettre en garde le monde entier contre un fantasme dont l'usage
était d'ordinaire inversé: voici que l'épouvantail nucléaire
local aurait déménagé au cours de la nuit et serait allé dès
potron minet installer ses marmites et ses maîtres queux à
Tel-Aviv.
Observez bien cet
endroit de la rivière : il présente à tous les regards un
passage à gué de l'anthropologie à la simianthropologie. Quel
retournement des leurres que les descendants du chimpanzé
s'appliquaient à brandir depuis 1945! Alors qu'Israël faisait
semblant de croire que son arme nucléaire à elle ne serait
qu'arquebuse et chassepot face à la foudre des Perses, voici que
Téhéran renverse tout subitement le tir et se tient les côtes de
rire à son tour, voici que Téhéran lève les bras au ciel des
matamores et dit à Israël : "Vois, nous n'avons de l'eau que
jusqu'aux genoux. A quoi bon nous tenir en joue pour rien?
L'apocalypse des singes nous renvoie aux arcs et aux flèches des
armées de Cyrus ou d'Artaxerxès". Quelle titanesque comédie que
celle d'un animalcule tout tremblant de ne savoir sur quelle
planète installer des armes disproportionnées à sa taille ! Les
mollahs sont devenus malicieux. Leurs Usbeck et leurs Rica
prêtent une oreille attentive aux ténors de leur trépas et
clignent de l'œil en direction des acteurs. " Décidément,
disent-ils, les foudres de Jahvé sont aussi mouillées que les
nôtres. Quand rangerons-nous notre foudre dans les arsenaux de
nos délires. Mais comment nos belliqueuses simagrées nous
feront-elles prêter l'oreille au bel canto de la mort?"
Car un empire guetté par sa poussière, c'est une autre chanson.
Les grands Etats, eux, voient clair comme le jour que le
capitalisme financier est une bulle de kérosène proche de
l'explosion, les grands Etats, eux, se réjouissent de ce que le
fonds monétaire international ait vendu récemment quelque quatre
cents tonnes d'or afin de tenter de freiner la hausse inexorable
du métal jaune; les grands Etats, eux, ont mis dare dare la main
sur ce pactole. Car ils savent bien que rien n'arrêtera
l'ascension du trésor du roi Midas. Certes, on entend encore,
ici ou là, quelques rêveurs prétendre que la production
industrielle retrouverait son élan. Mais aucun économiste digne
de ce nom ne croit à une "sortie de la crise" mondiale.
Chut, les grandes banques de la planète alertent secrètement
leurs plus gros clients de l'imminence d'un effondrement
financier global de notre astéroïde; chut, les banques
asiatiques achètent de l'or à tour de bras; chut, Michael Moore
sort sur les écrans du monde entier le premier film jamais
produit sur l'effondrement mondial du capitalisme.
9 - Le crime médical est-il un
crime contre l'humanité?
Gardez-vous, bonnes gens, d'écouter les clairons de la
prospérité retrouvée. Comment une Amérique qui a perdu la
maîtrise de son industrie des armes de guerre, comment une
Amérique qui ne contrôle plus ses bourreaux et ses chambres de
torture, comment une Amérique en perdition à Kaboul, comment une
Amérique proche de s'enfuir d'Irak, comment une Amérique
coupable du lancement sur le marché de la peur d'un virus de la
grippe qu'elle a fabriqué de ses mains à seule fin de produire
et de vendre des centaines de millions de doses d'un vaccin
insuffisamment testé à la population des cinq continents,
comment une Amérique qui a acheté à prix d'or la complicité des
gouvernements démocratiques du monde entier afin d'interdire à
leurs citoyens de se pourvoir en justice à la suite de leur
empoisonnement éventuel par un faux remède, comment une Amérique
qui a suscité l'indignation patriotique de quatre-vingt dix pour
cent du corps médical français face aux escrocs planétaires de
la santé publique, comment une Amérique qui n'a pas réussi à
faire taire la Pologne qui, seule de tous les Etats du monde a
osé dénoncer à la télévision un type nouveau de crime contre
l'humanité, comment une telle Amérique, dis-je, obtiendra-t-elle
longtemps encore le silence des agents d'influence au petit
pied, qu'on appelle encore les "intellectuels français"
et dont on prétend que leurs chromosomes contiendraient quelques
traces du capital génétique de Descartes et de Voltaire?
Voyez comme la
rébellion des peuples naît toujours de leur combat contre
l'immoralité de leurs maîtres, voyez comme leur guerre contre
l'indignité de leurs chefs arme le bras de leur justice: c'est
parce que le peuple français de 1789 a jugé immoraux les
privilèges de la noblesse, qui ne reposaient plus sur la
vaillance de cette classe sociale sur les champs de bataille,
mais seulement sur les droits héréditaires dont son arbre
généalogique se targuait, que la nation s'est sentie serve de
ses rois et qu'elle s'est faite vengeresse. Que va-t-il se
passer si la démocratie mondiale périt du péché originel
d'iniquité dont elle se nourrit?
10 - Les nouveaux embarras de
l'agent d'influence
Un
Continent que son immoralité contraint à se déplacer en chaise
roulante n'opposera pas indéfiniment une fin de non-recevoir
offusquée à la volonté de la Palestine de se proclamer un Etat
souverain. Cette fois-ci, Israël échouera à brandir l'épouvante
contrefaite de l'arme onirique dont disposera l'Iran longtemps
après l'Inde et le Pakistan. Mais la fantasmagorie suicidaire -
arrêtez-moi, ou je me volatilise avec vous dans l'atmosphère -
n'est que jeux d'enfants dans un préau d'école: comment l'agent
d'influence traiterait-il doctoralement de "l'émancipation du
Vieux Monde" de la férule des Etats-Unis si toute la
scolastique de la pseudo démocratie mondiale s'attache à
interdire une prise de conscience publique de l'autre tragédie,
celle qui s'annonce par "mille signes et présages"?
Car l'agent d'influence américain en France flotte entre deux
eaux. Le président du CRIF, Richard Prasquier, peut écrire: "Que
l'Etat du peuple juif ait retrouvé sa souveraineté à Jérusalem,
c'est le sursaut des espérances reconquises, une nouvelle
dimension de notre existence, pour nous, les juifs."
Rien de tel pour les fidèles de l'alliance des Etats-Unis et
d'Israël . Mais si ces deux puissances s'effondrent de conserve,
la petite entraînant la grande dans sa chute , comment évoquer
l'émancipation de l'Europe ? Einstein prétendait que la
stupidité humaine serait infinie. Sans doute l'auteur de la
relativité générale éprouvait-il le besoin de loger l'absolu
quelque part; mais il est absurde de supposer que la sottise de
l'agent d'influence serait un Everest du haut duquel il verrait
Israël rendre gentiment les territoires occupés, autoriser le
retour des réfugiés et partager Jérusalem avec les aborigènes si
seulement l'islam renonçait à une arme illusoire et diabolisée
sur le modèle des foudres de l'Eglise du Moyen Age.
L'agent d'influence voit donc l'empire américain et Israël se
précipiter ensemble dans le gouffre à la manière dont Ignace de
Loyola décrivait la descente du genre humain vers les empires
infernaux. Comment faire face à un si grand embarras doctrinal ?
La première consigne de l'Eglise de la Liberté sera de paraître
donner une parure sacerdotale rassurante à la théologie fatiguée
de la "relation américano-européenne", qu'on qualifiera
maintenant de "partenariat" gentillet et joliet, alors
qu'on aura pris un soin tout ecclésial, comme il est dit plus
haut, à soustraire d'avance les ouailles de la Liberté à tout
examen sérieux de leur asservissement, celui dans lequel la
vraie question est celle de l'occupation militaire perpétuelle
du Vieux Monde et de la chute précipitée de l'empire dans un
chaos politique irrémédiable.
Car le peuple le plus nationaliste de la terre, celui qui avait
seul regimbé - il se refusait à acquitter le tribut à l'occupant
romain et à rendre un culte idolâtre à une effigie de l'empereur
dont l'exposition dans le temple de Jérusalem aurait souillé la
pureté du culte de Jahvé - ce peuple né insoumis aux dieux de
bois, de pierre ou de fer a été replacé dans son enclos
d'autrefois après deux mille ans d'errance dans les sottes
vapeurs de la supranationalité politique dont l'Europe est en
train de croquer la pomme. Mais à peine a-t-il retrouvé ses
arpents et sa propre effigie décorporée dans les plus hautes
régions de l'air qu'il se démène comme un beau diable, à peine
a-t-il flairé l'odeur les lieux qu'il casse les barreaux de son
berceau. Décidément, ce diablotin n'en fait jamais qu'à sa tête,
ce fauve brandit ses poings intacts contre tous ses voisins.
Comment ses sauveurs canaliseront-ils l'énergie et la fureur
avec lesquels ce lionceau prend, avec quelque retard, sa
revanche sur les légions de Titus ? Pis que cela, c'est à
pleines dents qu'il mord, lui aussi, dans la pomme de l'arbre
dit "de la connaissance du Bien et du Mal" que la
Démocratie a planté dans son jardin de la Liberté. Et voici que
Jahvé apostrophe toutes les nations du monde : "Il y aura
désormais deux Eden sur la terre, dit-il, le mien, qui produira
en abondance les fruits de ma justice, l'autre dont les fruits
seront l'œuvre du Démon."
Comment l'agent
d'Israël s'appliquera-t-il à feindre d'ignorer les relations
théologiques que les grands Etats entretiennent entre eux depuis
les origines du monde?
11 - Une exégèse, textes en mains
Quel joli livre d'images coloriées à l'usage des démocraties
séraphiques on mettra maintenant entre les mains des enfants ! "Pourquoi
le lien transatlantique s'est-il affaibli depuis vingt ans?
L'ennemi soviétique a disparu. La crainte hantait les Européens
et les liait aux Américains. La guerre froide unissait, la paix
sépare. Les désaccords peuvent s'exprimer sans dommage, puisque
la cause commune fait défaut." Ah ! qu'en termes choisis ces
choses-là sont dites!
Puis les poussins accourus en toute hâte au secours de leur bon
maître en Afghanistan, puis en Iran présenteront, dans les
écoles de la République, le tableau touchant de l'évangélisme
inné qui inspirerait le genre humain au paradis des catéchistes
de la démocratie planétaire: "Les Européens, émus par
l'agression islamiste qui avait frappé New York, invoquèrent
l'article 5 du traité de l'OTAN pour se ranger aux côtés de
l'Amérique. Les Etats-Unis, obnubilés par l'outrage, ont d'abord
négligé le ralliement européen."
Mais si l'Europe du "ralliement" des saints de la
démocratie est censée avoir quitté motu proprio l'histoire
apostolique du monde afin de "chasser les talibans
d'Afghanistan" les armes à la main, comment laisserons-nous
ignorer au Continent de la Liberté que les Etats-Unis ne se sont
nullement rués sur l'Afghanistan afin d'y chercher une aiguille
dans une botte de foin - un certain Bel Laden - mais en raison
du revirement de cet Etat, qui, après avoir accordé à des
sociétés américaines la construction d'un pipe-line qui aurait
transporté l'or noir en provenance des champs pétrolifères de la
mer Caspienne jusqu'à l'océan Indien, est revenu sur
l'autorisation d'un enrichissemet gigantesque qu'il avait
accordé à une puissance étrangère. Ce sont les sociétés
pétrolières Unocal, Enron et Halliburton, dirigée par le
vice-président des Etats-Unis Dick Cheney, qui avaient obtenu
les droits exclusifs d'acheminement du gaz naturel du
Turkménistan à travers l'Afghanistan et le Pakistan vers
l'énorme centrale électrique à gaz naturel d'Enron à Dabhol près
de Bombay.
12- "
Vivre est une guerre
" (Sénèque)
Non seulement les Jésuites des démocratie dichotomisées des
modernes se verront contraints de s'opposer désormais à la
puissance bicéphale de l'Amérique qu'ils auront soutenue depuis
1945, mais on les verra paraître se résigner à légitimer un
réalisme politique imposé par le gigantesque bouleversement du
rapport des forces issu de la chute du mur de Berlin. Certes, on
commencera par minimiser l'évènement: "Les Etats-Unis
détiennent à eux seuls 40 % de la puissance armée du globe et
ils conservent la possibilité d'intervenir partout dans le
monde. Les forces européennes ne sont pas comparables, bien que
les Européens soient plus nombreux que les Américains. L'Europe
seule ne peut donc se concevoir comme une puissance mondiale, et
cela d'autant moins que, depuis la fin de la guerre froide, elle
a réduit bien davantage que l'Amérique la part de ses dépenses
militaires."
Que de réticences
cachées! Comment un empire entretiendrait-il durablement plus de
mille bases militaires sur la planète s'il ne disposait d'une
monnaie fiduciaire planétarisée par les accords de Bretton Woods?
Le budget du Pentagone a été porté à six cent quatre-vingt
milliards de dollars cette année. La dette de l'Etat s'élève
maintenant à plus de cinquante mille milliards de dollars. Qui
ne voit que les agents d'influence du monde entier frémissent à
la perspective d'un effondrement de la monnaie de l'empire qui
entraînerait son effacement militaire de la surface du globe et
le retour de mon maître biblique aux sables du désert?
C'est pourquoi l'agent déconfit associera timidement la
légitimation de l'occupation militaire perpétuelle de l'Europe
avec les cantilènes d'une dépendance désormais catéchisée du
bout des lèvres, mais tenacement maintenue sous les dehors de la
déploration: "Cette situation explique que, du côté européen
comme du côté américain, la relation transatlantique paraisse
affaiblie. Les Etats-Unis n'assurent plus la sécurité d'une
Europe qui (…) n'a plus à redouter la Russie post-soviétique.
L'alliance subsiste, mais l'OTAN, autrefois au coeur de la
solidarité atlantique, est devenue un objet incertain qui lie
les Etats-Unis, le Canada, différents pays européens et la
Turquie."
Qu'est-ce qu'un "objet incertain"? Un "objet"
affectif et qui prétendra que les relations entre les Etats
seraient régies par la "solidarité", le souci de la "sécurité"
et les liens sentimentaux entre les gouvernements. Monsieur
Nicolas Sarkozy ne proclamait-il pas que M. Barack Obama était "son
copain"?
Mais, voyez comme l'agent de la prétendue "solidarité
atlantique" feindra maintenant de croire, la main sur le
cœur, que le traité de Lisbonne pourrait non seulement "unir
l'Europe", mais l'armer d'une volonté politique réelle,
alors qu'il n'y aura évidemment jamais de "vues communes",
c'est-à-dire de vision de l'avenir de la planète entre les
Napolitains agenouillés devant leur fiole de saint Janvier et la
Hollande, cette "colonie de l'Angleterre", comme disait
le Général de Gaulle ou entre le Royaume-Uni et le Continent.
Une île est une île, disait M. de la Palice. Les Britanniques
ont appris cette évidence sous Jules César, Claude, Domitien,
Guillaume le Conquérant, Charles Quint, Napoléon et Hitler.
Quand bien même Londres serait-il tenté de recommencer une
expérience négativement gravée dans le capital psychogénétique
du peuple anglais, les liens que la City entretient avec banque
fédérale américaine sont tels qu'ils interdisent toute tentative
de participation politique à l'aventure européenne d'une
Angleterre fière de son " splendide isolement " financier. En
effet, ce furent, dès l'origine, les financiers de la City de
Londres, menés par les Rotschild, qui conçurent et mirent sur
pied la FED (Federal Reserve System), banque privée
jouant le rôle de banque centrale des Etats-Unis et qui créèrent
leur monnaie: le dollar. Celui-ci est la monnaie des banquiers
privés de la FED et elle est gérée par eux.
Mais l'agent d'influence sait tout cela mieux que personne.
Pourquoi feint-il d'ignorer que l'Histoire est une tragédie dont
Sénèque disait: "Vivere militare est" - "La vie est
une guerre?"
13 - L'intelligence politique
perdue des ancêtres
Pour tenter de comprendre la dose de bonne foi qui soutient la
démission intellectuelle de nombreux agents d'influence
français, il faut peser la portée de la ratification du traité
de Lisbonne et de sa prétendue "entrée en vigueur",
tellement le principal bénéfice de ses pieuses dispositions est
du moins d'exorciser le spectre d'une supra-nationalité
fatalement acéphale et qui serait censée faire descendre du ciel
d'une démocratie mondiale surveillée par Israël une assemblée de
députés miraculés par l'onction et la droiture conjuguées de
leur élection au suffrage universel. Comment le vote populaire
serait-il contrôlé par un ciel des saints de la Liberté? Comment
s'inspirerait-il spontanément d'une vision prophétique de
l'avenir de l'Europe, alors que les hautes lucidités n'inspirent
jamais que les grands chefs d'Etat - ceux qui, de Bolivar au
Général de Gaulle, ont toujours pris un siècle d'avance sur leur
temps?
Par bonheur, la France et l'Allemagne disposent désormais, du
moins sur le papier, de la faculté minimale de mettre le moteur
en marche à eux deux - tant pis pour les traînards. Mais il
n'est pas sûr que ces deux nations parviendront dans un avenir
raisonnable à initier une portion dite "significative" de
l'élite politique de leur population aux secrets bien cachés des
Machiavel de la géopolitique. Il est certain, en revanche, que
si les Slovènes, les Lettons, les Lithuaniens, les Chypriotes,
les Luxembourgeois ou les Maltais se révélaient soudainement
métamorphosables en phalanges macédoniennes de l'Europe de
demain, ce prodige ne servirait de rien, parce que les hommes de
valeur n'ont jamais, hélas, que la taille des pays auxquels ils
appartiennent et qui leur donnent leur "surmoi politique",
comme dirait le Dr Freud: on ne fera jamais d'un Hongrois, d'un
Slovaque, d'un Danois ou d'un Finlandais des interlocuteurs
titanesque de la Chine ou des Etats-Unis. Aussi à peine entré en
fonctions, M. Van Rompuy a-t-il dit: "J'attends avec
impatience un coup de téléphone de M. Barack Obama."
Tout est dit : la
hiérarchie actuelle entre l'Amérique et l'Europe entraîne une
subordination spontanée de cette dernière. On accepte d'emblée
une réalité censée aller de soi, mais qui n'est jamais que
l'expression de la soumission des élites politique du Vieux
Monde à l'air du temps. C'est au maître qu'il appartient de
téléphoner à ses valets, non l'inverse.
14 - L'Europe des enfants
Si vous
psychanalysez l'incapacité actuelle des Etats les plus peuplés
du Vieux Monde eux-mêmes à doter leurs citoyens d'une vision à
la fois réaliste et d'envergure du devenir de la planète, vous
découvrirez que la cause principale du réflexe instinctif de
subordination du petit Belge promu à une Présidence illusoire de
l'Europe n'est autre que l'occupation perpétuelle du Continent
par des troupes étrangères, parce que des vassaux même de forte
taille, s'ils demeurent hérissés à demeure de garnisons venues
d'au-delà des mers et qui s'expriment en une langue dont le
gazouillis demeure inintelligible aux oreilles des autochtones,
ces vassaux, dis-je, ne vont pas se coaliser contre leur maître
vénéré, mais, au contraire, rivaliser avec ardeur entre eux, à
la manière des petits enfants, dont l'espoir est seulement
d'entretenir, chacun de son côté, des relations flatteuses à
leurs yeux avec leur maître d'école à tous.
En revanche, si
l'Europe des premiers de classe se défaisait de son protecteur
et pédagogue, son retour à l'âge adulte serait quasiment
instantané, tellement les vieux peuples savent que l'on quitte
ses couches pour marcher tout seul sur ses deux jambes. Mais,
comment les élites démocratiques actuelles de la France et de
l'Allemagne forgeront-elles jamais les troupes de choc d'une
raison informée et d'une lucidité politique d'avant-garde si,
depuis trois quarts de siècle, les marmots du mythe de la
Liberté dorment à poings fermés dans le berceau de leurs
républiques grisées par le mythe de la Liberté?
Par bonheur,
l'histoire est faite de violents électrochocs, par bonheur, les
électrochocs de cent mille volts marient de force le réel et le
symbolique.
-
Pour une
anthropologie transcendantale - Gaza et l'avenir de la
pensée politique mondiale,
23 novembre 2009
Si l'Europe
exprimait l'audace de demander tout de go aux Etats-Unis de
ramener leurs troupes chez elles après une escapade de
soixante-dix ans hors de leur territoire, un traumatisme aussi
brutal des nourrissons briserait tout net leur propension
culturelle non encore inscrite dans leur capital génétique à
courtiser le substitut du Père éternel qu'ils se sont donné dès
le berceau. Alors seulement le retour collectif à la réalité des
orphelins de la lucidité politique dont jouissaient leurs
arrière-grands parents les rassemblerait tout soudainement; et
leur ralliement rapide aux affaires de ce bas-monde changerait
la face de la terre. Mais si les électrochocs politiques sont
les éveilleurs de la raison des peuples et des nations, encore
faudra-t-il détecter l'enclume de leurs retrouvailles
précipitées avec l'intelligence politique de leurs ancêtres.
15 - Les
dieux nationaux et les dieux universels
C'est ici que l'anthropologie transcendantale rappelle une fois
encore qu'il n'y aura jamais de psychanalyse de la servitude
politique sans une connaissance rationnelle de l'inconscient
religieux de l'histoire. Prenez la récente déclaration de M.
Barack Obama à Pékin: "Les Etats-Unis veulent une Chine
puissante et prospère". Qu'enseigne la spectrographie
théologique de ce discours? Que le Président des Etats-Unis
emprunte sans seulement s'en douter un langage inscrit depuis
ses origines calvinistes dans la culture bénisseuse de cette
nation: il appartient aux élus du ciel du Nouveau Monde,
pense-t-il, d'octroyer une grâce souveraine à l'empire du
Milieu, celle de lui souhaiter un heureux avènement de son règne
et de sa gloire sur cette terre.
On
sait que les présidents des Etats-Unis achèvent leurs discours
annuels sur l'état de l'Union par l'invocation rituelle: "Que
Dieu bénisse l'Amérique". Mais cette apostrophe au ciel de
l'endroit mime le verbe du Créateur forgé à Genève au XVIe
siècle. Elle se place à mi-chemin entre le vœu du dévot
privilégié et l'objurgation comminatoire. Si Pékin répondait à
la Maison Blanche avec une onction toute théologique à son tour:
"Nous voulons une Amérique puissante et prospère", la
presse d'outre-Atlantique lui répondrait sans doute: "Les
acteurs européens attendent passivement que la salle veuille
bien les applaudir à la chute du rideau. Chez nous, c'est d'un
port fier de nos têtes que nous attendons du public qu'il
accomplisse bruyamment son devoir à la fin de la représentation."
Et
d'ajouter: "Notre puissance et notre gloire de prédestinés
sont l'affaire de notre piété à nous, non celle de vos
mandarins. Pourquoi empruntez-vous un ton de bénisseurs-nés à
notre égard ? Qui vous autorise à afficher une allure de
protecteurs appelés à bénir notre destin ? Seriez-vous de toute
éternité les dépositaires et les dispensateurs de notre salut
sur la terre?"
Mais l'espèce
humaine est faite de fractions qui se diversifient au gré des
territoires et à l'école des climats. C'est pourquoi Rome, après
avoir importé des dieux grecs, n'a pas tardé à légiférer contre
l'invasion de divinités étrangères venues d'Asie. Or tout empire
devient un dieu universel à ses propres yeux. C'est donc à point
nommé que la métamorphose de Jahvé en un souverain universel et,
de surcroît, incarné, comme l'exigeait le réalisme romain, a
permis à Rome de conserver longtemps son ubiquité, avec tout
l'appareil théologique qui prolongeait son universalité
territoriale. L'empire américain a témoigné du même processus:
si son langage n'était pas devenu théologique, l'Amérique
n'aurait pas accédé à un rang politique mondial.
Mais, de nos
jours, il n'y a plus d'omniprésence et d'omnipotence
politico-religieuse. C'est en vain que l'Amérique présente un
partenariat tronqué et contrefait à la Russie, à la Chine et
demain à l'Inde et à l'Amérique du Sud, parce qu'elle a oublié
que tous les dieux sont inconsciemment nationaux sous leur
apparat théologique universel. C'est la théologie de la grâce
qui a changé l'Amérique en sosie de l' Olympe de saint Augustin.
Aussi longtemps que l'Europe n'aura pas de science de
l'inconscient mythologique de l'histoire et de la politique,
jamais elle ne descendra dans les coulisses des trois
monothéismes et jamais elle n'osera demander tout à trac aux
Etats-Unis de quitter les planches, parce qu'elle recevra
toujours d'un autre la parole de bénédiction qui fait
l'histoire. Telles sont les coulisses de la demande impatiente
de M. Van Rompuy que M. Barack Obama veuille bien décrocher son
téléphone.
Mais Confucius répond du tac au tac aux apôtres de leur propre
gloire: "Occupez-vous de votre grandeur, à nous de nous
occuper de la nôtre", parce que la Chine, elle, n'est pas
marquée du sceau de l'universalité et de l'ubiquité des
théologies du salut, de sorte que son réalisme garde les yeux
grands ouverts sur la logique biaisée de la Maison Blanche.
16 - Le
spectre de Talleyrand
Mais, encore une fois, comment forgerons-nous en Allemagne, en
Italie, en Espagne le fer de lance d'une classe dirigeante
adulte si nos élites politiques ignorent tout des ressorts
anthropologique du sacré ? La France est retournée dans l'OTAN
avec un bandeau sur les yeux. Par chance, elle se contente de
humer les parfums qui montent des autels de la Liberté
américaine. Ce luxe lui est permis du fait que, depuis
quarante-sept ans, elle n'est plus occupée par les forces armées
de l'étranger. Mais quand on ne partage plus le picotin de la
servitude que mâchent ses voisins, comment tirer parti du
réalisme chinois de la France ? Que faire de Mme Merkel, qui
marie une grande énergie ménagère avec un cerveau attentif à ne
pas quitter ses fourneaux des yeux? Que faire de M. Berlusconi,
qui gère la dernière basse-cour de l'empire romain?
Je
suggère que le spectre de Talleyrand vienne tenir au Nouveau
Monde le discours des grands piégeurs du sacré. En 1814, c'est
au nom de la légitimité théologique des monarchies que le Prince
de Bénévent a défendu le droit à la souveraineté de droit divin
de la nation de 1789 face à une Sainte Alliance coalisée contre
le trône des Bourbons sur son sol. Pourquoi la France de la
raison politique retrouvée du Vieux Monde ne dirait-elle pas à
l'Amérique: "L'Europe vous rend grâces de lui avoir apporté
le salut, l'Europe vous sait gré d'avoir, en outre, poursuivi
votre sainte mission plus de vingt ans après la chute du mur de
Berlin afin de consolider et de rendre indestructible votre
Sainte Alliance avec la Liberté du monde. A l'heure de votre
réembarquement, nos fleurs et nos couronnes vous disent notre
impérissable gratitude pour les lauriers que vous avez récoltés
chez nous. Nous vous souhaitons la puissance et la prospérité
sur vos terres enfin si heureusement retrouvées ; et que votre
Dieu vous bénisse."
Publié le 30
novembre 2009 avec l'aimable autorisation de Manuel de Diéguez
Les textes de Manuel de Diéguez
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