L'art de la guerre
En Irak la guerre est « subrogée »
Manlio Dinucci
Photo:
L'Humanité
Mardi 20 décembre
2011
Nos troupes sont
sorties d’Irak « la tête haute », a
annoncé le commandant en chef Barack
Obama. Les USA ont de quoi être fiers.
Ils quittent un pays envahi en 2003 au
motif qu’il possédait des armes de
destruction de masse, motif qui s’est
révélé infondé. Mis à feu et à sang par
plus d’un million et demi de soldats,
que le Pentagone a déployés par
rotations, avec aussi des centaines de
milliers de contractor militaires
(mercenaires), en employant n’importe
quel moyen pour écraser la résistance :
des bombes au phosphore contre la
population de Fallujah aux tortures
d’Abu Ghraib. Provoquant environ un
million de victimes civiles, qui
s’ajoutent à celles de la première
guerre contre l’Irak et de l’embargo.
Contraignant plus de 2 millions
d’Irakiens à quitter leur maison et
autant à se réfugier en Syrie et en
Jordanie. Laissant un pays sinistré,
avec un chômage à plus de 50%, la moitié
des médecins qu’il avait avant
l’invasion, un tiers des enfants
affectés de malnutrition, à qui
s’ajoutent ceux qui ont des
malformations génétiques dues aux armes
du Pentagone. Une guerre que les USA ont
payée de 4.500 morts et plus de 30mille
blessés chez les militaires, dont 30%
sont rentrés chez eux avec de graves
problèmes psychiques. Guerre qui a coûté
1.000 milliards de dollars, à quoi
s’ajoutent environ 4mille milliards de
dépenses indirectes, comme celles de
l’assistance aux anciens combattants.
Elle en a cependant valu la peine :
dorénavant « l’avenir de l’Irak sera
dans les mains de son peuple », assure
le président Obama. Est-ce ainsi qu’il a
gagné le Prix Nobel de la Paix ? On peut
en douter en lisant le manuel de la US
Army sur « La guerre subrogée pour le 21ème
siècle » : une guerre menée en
substituant aux forces armées
traditionnelles, qui interviennent
ouvertement, des forces spéciales et
agents secrets qui agissent dans
l’ombre, avec le soutien de forces
alliées, de fait sous commandement
étasunien. Divers faits le confirment.
Le personnel de l’ambassade étasunienne
à Bagdad, la plus grande du monde,
passera de 8mille à 16mille personnes.
Son « bureau de coopération et
sécurité », qui entraîne et arme les
forces irakiennes sera renforcé. Depuis
2005, le gouvernement irakien a acheté
des armements étasuniens pour une valeur
de 5 milliards de dollars et, selon le
programme, il en achètera d’autres pour
26 milliards. Parmi lesquels, 36
chasseurs F-6 avec leurs armements (qui
pourraient augmenter jusqu’à 96), dont
les pilotes seront entraînés aux
Etats-Unis et dont les bases seront de
fait sous le contrôle du Pentagone. Des
unités de la Cia et des forces spéciales
étasuniennes continuent à entraîner (et
de fait à diriger) les « forces de
sécurité » qui, sur ordre du premier
ministre Nouri al-Maliki, ont déjà
arrêté des centaines d’ex-baasistes
accusés, sur la base de preuves fournies
par le Cnt libyen, d’avoir préparé un
coup d’état avec l’appui de Kadhafi. En
même temps Washington s’attache le
gouvernement régional kurde de Masoud
Barzani avec lequel ExxonMobil a conclu
un gros contrat d’exploitation
pétrolière, en doublant le gouvernement
de Bagdad.
Au Kurdistan irakien opèrent
depuis 2003 des forces spéciales
étasuniennes, sous les ordres du général
Charles Cleveland. Celui-là même qui
-révèle le journal égyptien al-Arabi-
entraîne et dirige aujourd’hui en
Turquie les commandos de l’ « armée
syrienne libre» pour la « guerre
subrogée » contre la Syrie.
Edition de mardi 20
décembre 2011 de il manifesto
http://www.ilmanifesto.it/area-abbonati/in-edicola/manip2n1/20111220/manip2pg/14/manip2pz/315245/
Traduit de
l’italien par Marie-Ange Patrizio
Le
dossier Irak
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