L'art de la guerre
Le vent de l'Est
redouté par les Usa
Manlio
Dinucci
Xi Jinping
- Photo:
PETER MUHLY / AFP
Mardi 4 juin 2013
Le sommet « informel » entre le
président Obama et le président chinois
Xi Jinping, les 7et 8 juin en
Californie, sera retransmis en
mondovision selon la mise en scène
washingtonienne de la chaude atmosphère
familiale, assaisonnée de sourires et
facéties. Mais, les caméras des télés
étant éteintes, le ton changera. De
nombreuses questions brûlantes sont sur
le tapis. Les Usa, au premier rang
mondial dans les investissements directs
étrangers (Ide), ont investi plus de 55
milliards de dollars en Chine (première
destination mondiale des Ide), où les
multinationales étasuniennes ont de plus
en plus délocalisé leur production
manufacturière, dont une grande partie
est ensuite réimportée aux Usa. De cette
façon cependant les Etats-Unis ont
contracté à l’égard de la Chine un déficit commercial
qui en
2012 a
dépassé les 315 milliards de dollars, 20
de plus par rapport à 2011. Les
investissements chinois aux Etats-Unis
sont bien plus petits, à cause surtout
des restrictions imposées : on permet
aux sociétés chinoises, par exemple,
d’investir dans le secteur alimentaire
(un groupe de Shanghai vient à peine
d’acheter le plus gros producteur
étasunien de viande porcine), mais le
secteur des télécommunications reste
off limits pour eux.
Washington accuse en outre la Chine d’avoir pénétré avec
ses hackers dans les systèmes
informatiques étasuniens, en dérobant
les données relatives à une vingtaine
des systèmes d’arme les plus avancés.
L’économie chinoise, arrivée au second
rang mondial avec un revenu national
brut de presque la moitié de celui des
Usa, est de plus en plus dynamique : non
seulement sa capacité productive est
impressionnante (elle exporte chaque
année un milliard de téléphones mobiles
et 20 milliards de vêtements), mais elle
investit aussi de plus en plus dans des
pays d’importance stratégique pour les
Usa. Après avoir dépensé dans les
guerres en Irak et en Afghanistan 6mille
milliards de dollars et s’être avec cela
lourdement endettés, les Etats-Unis
voient à présent
la Chine
économiquement de plus en plus présente
dans ces pays.
En Irak, non seulement elle
achète environ la moitié du pétrole
produit, mais elle effectue à travers
des compagnies étatiques de gros
investissements dans l’industrie
pétrolifère, pour plus de 2 milliards de
dollars annuels. Pour le transport du
personnel technique chinois a été
construit un aéroport spécifique aux
environs de la frontière iranienne. La
carte gagnante des compagnies chinoises
est que, à la différence de la société
étasunienne ExxonMobil et d’autres
compagnies occidentales, elles acceptent
des contrats pour l’exploitation des
gisements à des conditions beaucoup plus
avantageuses pour l’Etat irakien, en ne
misant pas sur le profit mais sur le
fait de pouvoir avoir du pétrole, dont la Chine est devenue le
principal importateur mondial. En
Afghanistan, des compagnies chinoises
sont en train d’investir surtout dans le
secteur minier, après que des géologues
du Pentagone ont découvert de riches
gisements de lithium, cobalt, or et
autres métaux. De plus en plus en
difficulté dans la compétition
économique, les Usa jettent leur épée
sur le plateau de la balance. A la
veille du sommet, le secrétaire à la
défense Hagel a « rassuré les alliés
asiatiques face à la croissance
militaire chinoise », en promettant que,
malgré l’austérité, les Usa déploieront
dans la région Asie/Pacifique des forces
dotées des technologies militaires les
plus avancées : unités navales à armes
laser, navires de combat côtier,
chasseurs F-35 et autres. Les navires de
guerre déployés dans le Pacifique, qui
constituent aujourd’hui la moitié des
cent déployés (sur un total de 283),
seront augmentés ultérieurement. Ainsi,
souligne Hagel, les Etats-Unis
conserveront « une marge décisive de
supériorité militaire ».
À laquelle s’agrippe, pour lutter
contre son déclin, l’empire américain[1]
d’Occident.
Edition de mardi 4 juin 2013 de
il manifesto
http://www.ilmanifesto.it/area-abbonati/in-edicola/manip2n1/20130604/manip2pg/14/manip2pz/341237/
Traduit de l’italien par Marie-Ange
Patrizio
[1]
L’adjectif américain est ici
volontairement employé en
référence au déclin de l’empire
romain d’Occident (NdT).
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