Actualité
In Memoriam
Jacques Vergès 1925-2013
Luc
Michel
Vendredi 16 août 2013
Notre
ami Me Jacques Vergès nous a quitté ce
15 août …
Luc MICHEL
avec PCN-SPO / 2013 08 16 /
http://www.lucmichel.net/
https://www.facebook.com/Pcn.luc.Michel
« Une journaliste danoise m'a demandé :
« Comment pouvez-vous vouloir défendre
Milosevic ? » Je lui ai répondu ceci : «
Vous vous croyez démocrate, mais votre
réflexion est fasciste ! ». Car c'est
seulement dans les régimes fascistes que
certaines causes ne peuvent pas être
défendues »
- Jacques Vergès (interview pour Le
Soir)
« Je ne crois pas en la justice pénale
internationale ! »
- Jacques Vergès (Dictionnaire amoureux
de la justice)
On vient d'apprendre le décès de
l'avocat Jacques Vergès, à l'âge de de
88 ans. C'est BFM TV qui révèle cette
info. Cet homme de loi s'était rendu
célèbre pour avoir défendu notamment le
président yougoslave Slobodan Milosevic
ou l’humble jardinier Omar Raddad.
UNE VIE ENGAGEE
Avocat de réputation mondiale, Jacques
Vergès fut résistant, communiste
patriote et militant anticolonialiste.
Défenseur des causes radicales, au
carrefour du politique et du judiciaire,
il a associé son nom à de nombreux
procès sulfureux, acceptant les causes
maudites dont aucun avocat ne voulait
(Klaus Barbie, Moussa Traoré, Paul
Barril, Omar Raddad, le tueur en série
Charles Sobrhraj, le préfet Bernard
Bonnet ...), ou encore les grands procès
politiques (Georges Ibrahim Abdallah,
Moussa Traoré, Carlos, Slobodan
Milosevic, l'un des avocats de la
Fraction Armée Rouge Klaus Croissant,
Magdalena Kopp, notamment ...) .
Né en 1925 d'un père réunionnais et
d'une mère vietnamienne il est le frère
de Paul Vergès, ancien député communiste
de la Réunion, président du conseil
régional et sénateur communiste de La
Réunion.
Dans son "carnet d'adresses", on
retrouve également le nom de Pol Pot, au
Cambodge, dont il est soupçonné d'avoir
été l'un des conseillers. Le
révolutionnaire Carlos et le président
ivoirien Laurent Gbagbo figurent
également parmi ses clients célèbres. Né
en 1925 en Thaïlande, Maître Vergès
avait obtenu une certaine notoriété
durant la guerre d'Algérie, après avoir
défendu les accusés du FLN. Et inventé
sa fameuse « défense en rupture »,
politisation radicale du procès où
l’accusé devient accusateur et le
Système coupable.
Il avait notamment défendu Omar Raddad
et attaqué – à nos côtés et ce fut un
des grands honneurs de ma vie militante
– le pseudo Tribunal pénal
international, chargé de juger des
crimes commis dans l’ex-Yougoslavie,
assimilé par lui fort justement « aux
sections spéciales de Vichy ».
Maitre Jacques Vergès, qui assurera
aussi la défense de Saddam Hussein, est
le « défenseur des causes perdues le
plus médiatique et le plus mystérieux du
barreau de Paris », dira le Nouvel Obs.
De petite taille, rond, le visage lisse
et ironique, amateur de havanes et de
pêche à la ligne, Me Vergès, 80 ans,
s'est rendu célèbre par les clients
"indéfendables" dont il a assuré la
défense devant les tribunaux.
Il ne cachait pas « son goût de la
déstabilisation et de la provocation »
et se flattait non sans raison de son
"pouvoir" engendré « par la
fréquentation de personnalités
politiques du monde entier et de
militants de l'ombre ».
UN GRAND RESISTANT : A 17 ANS DANS LES
FFL.
PUIS DANS LE COMBAT ANTICOLONIALISTE …
Né en Thaïlande, de père français et de
mère vietnamienne, Me Vergès passe son
enfance à La Réunion. Il s'engage à 17
ans dans les Forces Françaises Libres du
général de Gaulle, puis adhère en 1945
au Parti communiste. Il réside à Prague
de 1951 à 1954 comme cadre du mouvement
communiste international. Fin 1955, le
jeune avocat milite pour le FLN
algérien. Il quitte le PCF en 1957 et
épouse Djamila Bouhired, auteur de
plusieurs attentats à la bombe en
Algérie.
De 1970 à 1978, il disparaît. "Je suis
passé de l'autre côté du miroir. C'est
ma part d'ombre", dira-t-il. Selon
certaines sources, il aurait travaillé
clandestinement avec Pol Pot et les
Khmers rouges.
Il a notamment défendu devant les
tribunaux des militants du FLN pendant
la guerre d'Algérie
PARTISAN DE LA JUSTICE POPULAIRE
Il s’était toujours opposé à la justice
bourgeoise et prônait une justice
populaire (une des bases de la
Démocratie Directe).
« Etes-vous un inconditionnel du jury
populaire ? » interrogeait Le Soir
(Bruxelles). Vergès de répondre : « Tout
ce qui est humain est susceptible
d'erreur. Mais la justice populaire
donne la garantie d'une indépendance que
la magistrature n'a pas. Parce que vous
trouvez aussi, dans la magistrature,
l'esprit corporatiste. La Cour ne va pas
désavouer le juge d'instruction. Et le
juge ne va pas désavouer le policier -
qui, souvent, a fait le travail à sa
place ! »
Le Soir, hostile, interrogeait à
nouveau : « Le jury populaire, c'est un
maillon de la démocratie. Or, on a
souvent l'impression que vous êtes en
délicatesse avec les démocraties, en
défendant des dictateurs, des
terroristes, des « collabos ». »
Et Vergès, cinglant : « Une journaliste
danoise m'a demandé : « Comment
pouvez-vous vouloir défendre Milosevic ?
» Je lui ai répondu ceci : « Vous vous
croyez démocrate, mais votre réflexion
est fasciste ! ». Car c'est seulement
dans les régimes fascistes que certaines
causes ne peuvent pas être défendues ».
UNE ETHIQUE MILITANTE. L’HONNEUR CONTRE
LE FRIC-ROI …
Vergès était surtout un homme droit,
dirigé par une éthique révolutionnaire –
que je partage totalement et qui guide
aussi ma vie – , où l’honneur s’oppose
au fric-roi de la Société bourgeoise.
Vergès affirmait dans « L'apartheid
judiciaire » (et il n’y a rien a y
ajouter) : « Dans un passé pas si
lointain, le courage à la guerre était
une valeur sacrée. Rappelons-nous
Léonidas et ses trois cents Spartiates
mourant à Thermopyles pour obéir aux
lois de Sparte. Le sacrifice de la
vieille garde à Waterloo. Le sacrifice
du roi Lazare face aux Ottomans. Ou
encore le courage des défenseurs de
Stalingrad. C'est ce que l'on appelait
l'honneur. Le mot figure sur les
drapeaux de la République en France. ...
Hitler a mis fin à tout cela. Pour lui,
ses adversaires ne pouvaient être que
des sous-hommes. »
Et il concluait, rappelant les affinités
idéologiques occultées entre Nazisme et
Américanisme : « Aujourd'hui les
disciples de l'OTAN professent le même
mépris, chargé de peur et de haine,
contre ceux qui contestent leur droit à
l'hégémonie. Le racisme est simplement
remplacé par l'idéologie des Droits de
l'Homme, dans la version exclusive des
généraux Westmoreland, Powell et Clark,
bourreaux des peuples du Viêt-nam,
d'Irak et de Serbie. Le procédé n'est
pas nouveau. C'est toujours au nom d'un
idéal détourné que les conquérants
justifient leurs agressions et leur
sauvagerie. ...
Aujourd'hui c'est au nom des Droits de
l'Homme qu'on tue les civils dans les
Balkans, qu'on affame les enfants en
Irak et qu'on fait refleurir le pavot en
Afghanistan. »
UN AUTEUR PROLIXE
Me Vergès est l'auteur d'un grand nombre
d'ouvrages, notamment :
- de De la stratégie judiciaire,
Editions de Minuit, Paris 1981 ;
Beauté du crime, Plon, Paris 1988 ;
- Je défends Barbie (avec une préface de
Jean-Edern Hallier), Jean Picollec,
Paris 1988 ;
- J'ai plus de souvenirs que si j'avais
mille ans, J'ai lu, Paris 1999 ;
- avec Pierre Marie Gallois, L'apartheid
judiciaire, L'age d'Homme, Lausanne
2002.
NOS COMBATS COMMUNS
Nous avions combattu ensemble au sein du
"COMITE INTERNATIONAL POUR LA DEFENSE DE
SLOBODAN MILOSEVIC" (ICDSM) (*) – dont
il était le Conseil et moi le président
-, étroitement de 2002 à 2006,
organisant entre La Haye et Paris, la
défense du Président Milosevic détenu
dans les geôles de l’OTAN – dont le
pseudo TPI n’est qu’un appendice honteux
– à La Haye.
Le combat pour Milosevic fut long et
difficile. Parce que nous devions
combattre sur tous les fronts : contre
les médias de l’OTAN, la machine du TPI,
les médiamensonges. Mais aussi contre un
ennemi intérieur, des militants
trotskistes et sionistes, à New-York et
aux Pays-Bas, infiltrés dans nos rangs
et qui sabotaient sans cesse notre
action, semant la zizanie …
Moent fort de notre combat, le seul
débat public ayant jamais opposé les
porte-paroles du TPI et Vergès et
moi-même sur la chaîne de télévision «
LCP-PUBLIC SENAT » (Paris) et qui tourna
à la défaite des domestiques de l’OTAN
(**).
Nous nous étions encore retrouvé lors de
la défense de Saddam Hussein, de la
Jamahiriya libyenne de Moammar Kadhafi –
il avait comme moi été un des rares à
aller apporter son soutien à Tripoli
sous les bombes de l’OTAN au
triste printemps 2011 -, et celle du
président ivoirien Bgagbo …
La mort de Jacques Vergès laissera un
grand vide. Irremplaçable. Il était de
ceux dont la compagnie illuminait une
rencontre. Simple et sympathique aussi.
Je me souviendrai toujours de sa
gentillesse lors d’un dîner dans un
chinois à La Haye avec des militants
ouvriers liégeois du PCN. J’avais un
camarade …
Luc MICHEL
http://www.lucmichel.net/2013/08/16/luc-michel-in-memoriam-jacques-verges-1925-2013/
(*) Le "Comite
International pour la Défense de
Slobodan Milosevic" (ICDSM en anglais)
est né en mai 2001.
L'arrestation du Président Milosevic
avait suscité un vaste mouvement
international de soutien à l'ancien
président yougoslave, mais aussi aux
autres patriotes yougoslaves pourchassés
par le soi-disant "Tribunal Pénal
International" ou détenus dans les
geôles de La Haye, et le lancement de
plusieurs initiatives internationales et
pétitions. Notamment celle du PCN, alors
très engagé dans la défense de la
Yougoslavie. Pour de nombreux militants
progressistes, Slobodan Milosevic est
alors le symbôle de la Résistance aux
diktats du Nouvel Ordre Mondial et de
ses maîtres de Washinton et de l'OTAN.
Début mai 2011 est créé le
"International Committee to Defend
Slobodan Milosevic" (ICDSM), qui diffuse
une pétition internationale largement
soutenue et qui a recueilli plusieurs
centaines de milliers de signatures,
dont celle de 92 députés (sur 130) de la
Chambre haute (conseil de la Fédération)
du Parlement russe.
L'ICDSM a reçu
l'adhésion de nombreuses personnalités
internationales, notamment Ramsey Clark
(ancien procureur général des USA),
Harold Pinter, ou encore Guenady
Ziouganov, le président du PCFR. Il est
présidé à ses débuts par le
Professor Velko Vlkanov,
Député au Parlement de Sofia et
Président de l'"Union Antifasciste
Bulgare". En mai 2011, la première, est
fondée sous la présidence de Luc MICHEL
sa « section francophone » (Belgique,
France, Suisse, Québec). Qui sera la
seule à se structurer solidement :
personnalité juridique, websites,
newsletter, bulletin imprimé
« Solidarité Milosevic », affiches et
autocollants … Et la seule aussi à
accéder aux grands médias français et
suisses.
(**) Emission «
Paroles d’Europe » sur LCP SENAT. Une
émission présentée par Caroline de
Camaret et « destinée à mieux faire
connaître les enjeux européens et
l'impact de la construction européenne
sur la vie quotidienne des Français.
En direct le lundi 8 avril 2002, sur le
thème « FAUT-IL JUGER MILOSEVIC ? ».
Avec Luc MICHEL(ICDSM), Christian
CHARTIER, porte-parole officiel du TPI,
Maître Jacques VERGES, avocat de
Slobodan Milosevic, Patrick BAUDOIN,
président d’honneur de la Fédération
Internationale des Droits de l’Homme.
Photo : La
défense du Président Milosevic contre le
pseudo TPI. Me Jacques VERGES et Luc
MICHEL, lors du débat sur Milosevic de
la TV française LCP SENAT, Paris
(Sénat), avril 2002.
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