Opinion
Chrétiens en Terre
sainte :
Maintenir les Américains dans
l'ignorance
Leila
Mazboudi
Jeudi 26 avril 2012
Les « 60 minutes » sur
« les Chrétiens en terre sainte » ne
pouvaient en aucun cas passer inaperçus.
Compte tenu de l’emprise israélienne et
sioniste sur les medias américains.
Bien avant la
diffusion du documentaire sur la CBS,
l’ambassadeur d’Israël aux Etats-Unis
Michael Oren était aux aguets. Il a
déployé tous ses efforts pour le faire
interdire, ou du moins en atténuer
l’accent. En arrivant jusqu’à s’ingérer
dans les affaires de la chaine télévisée
et s’adressant directement à son
producteur, le célèbre animateur Bob
Simon. Ce à quoi ce dernier n’a pas
manqué d’exprimer sa réprobation de
l’intrusion de l’ambassadeur israélien.
« Je ne me souviens pas d'un cas
similaire sur l’intervention d’un Etat
dans un reportage diffusé dans le
programme » avait dit Simon à Oren.
Et l'ambassadeur israélien de lui
répliquer « qu'il y a un début à tout »
se justifiant comme étant au service de
son Etat et « tente de prévenir toute
tentative de lui porter atteinte ». Et
de faire remarquer à l’animateur
américain, qu’il ferait mieux de
diffuser des rapports sur la situation
des chrétiens dans d'autres pays de la
région.
En fin de compte, les
efforts d’Oren se sont avérés vains.
Dans la nuit du 22 avril dernier, la
chaîne a diffusé le reportage qui blâme
les politiques de sécurité israéliennes
qui poussent les Palestiniens chrétiens
des territoires occupées à quitter des
zones historiquement chrétiennes telles
que Nazareth et Bethléem.
Dans
le reportage télévisé, l’ambassadeur
israélien répond aux questions de Simon
sur les contraintes que subissent les
Chrétiens, en les imputant aux
Musulmans. Ce à quoi un homme d’affaire
chrétien réplique: « je n’ai jamais
entendu parler de quelqu’un qui quitte
en raison de la persécution islamique ».
Selon le Haaretz,
Netanyahou était au courant de l’action
de l’ambassadeur israélien pour faire
suspendre la diffusion de l’enquête
télévisée ou au moins en atténuer
l’accent. Dans un contact avec le
Premier ministre israélien Benjamin
Netanyahou, l'ambassadeur Oren l’avertit
que si le reportage est diffusé, tel
quel, selon les informations qu’il en a
« il provoquera une explosion dans les
relations stratégiques avec les
chrétiens aux États-Unis. »
Pour
en amortir les effets, avant sa
diffusion, un journal américain avait
fait publier un article qui vante la
liberté religieuse en Israël et dans les
territoires occupés, différemment du
monde arabe. Le journal en question
avait refusé de faire diffuser les
commentaires de Chrétiens de Bethléem et
de Jérusalem.
Après sa diffusion, de
nombreux medias se sont lancés dans une
campagne de suspicion contre le
programme et son animateur.
Certains l’ont présenté comme un travail
de « démolition d’Israël » voire « un
journalisme de poubelle ». Plusieurs ont
repris la rhétorique de l’ambassadeur
israélien, mettant l’accent sur le thème
de l’émigration des Chrétiens en Orient
en raison de l’islamisme.
Un article sur le site « The Institute
on religion and democracy » en veut au
reportage d’avoir vérifié les
informations données par l’ambassadeur
israélien en s’enquérant auprès de
chrétiens palestiniens.
Alors qu’un site américain hostile à
l’Iran « Iran aware » a accusé la CBS de
vouloir « jeter les Juifs aux lions ».
Ce que
les Américains ne doivent pas savoir
Pour
expliquer les raisons pour lesquelles
Israël a voulu censurer l’émission de
Simon, Juan Cole en dénombre dix :
1-Le reportage dit que certains
palestiniens sont des Chrétiens, ce qui
ébranle la propagande sioniste. «
Lorsque la droite israélienne a tenté de
déplacer, d'exproprier et d'effacer la
nation palestinienne, elle a persuadé
les Américains que les Palestiniens
n'existent pas ou sont des ennemis des
États-Unis. Lorsque l'ennemi des
États-Unis était l'Union soviétique, ils
ont présenté les palestiniens comme
étant des communistes. Lorsque l'ennemi
est devenu Al-Qaïda, ils en ont fait des
fondamentalistes violents. Mais
lorsqu’un certain pourcentage de
Palestiniens est formé de chrétiens,
ceci perturbe la propagande. En fait,
des millions de Palestiniens sont les
descendants des 700.000 Palestiniens
nettoyés ethniquement par les Israéliens
depuis 1948, dont environ 10% étaient
des chrétiens », écrit-il.
2-L’émission
signale que ces Chrétiens sont des
Luthériens, des catholiques, des
Episcopaliens, avec lesquels les
Américains pourraient entretenir des
liens. Alors que le Likoud voudrait que
les Américains ne s’identifient qu’aux
israéliens.
3-le reportage montre qu’Israël occupe
des terres palestiniennes alors que la
plupart des américains pensent le
contraire...
4- le reportage montre les mesures
humiliantes exercées contre les
Palestiniens à l’instar du régime
apartheid en Afrique du sud...
5- le programme américain a permis aux
Palestiniens de parler d’eux-mêmes, et
de réfuter les assertions d’Oren alors
que la propagande israélienne contre les
Palestiniens a instauré comme principe
de ne jamais défier les versions
israéliennes des faits.
6-le reportage a permis à un éminent un
homme d’affaire palestinien travaillant
dans la distribution de Coca cola de
dire qu’il n’a jamais connu de chrétiens
palestiniens quitter la Cisjordanie
occupée et Jérusalem en raison des
Musulmans, mais à cause de l’oppression
des israéliens.
7-il a permis de montrer la Cisjordanie
qu’elle est découpée comme un fromage
suisse (gruyère), en raison des
colonisations et de la confiscation des
bonnes terres et des sources d’eau...
8- le documentaire montre les
Palestiniens comme non-violents, et
menant une lutte pacifique contre
l’occupation israélienne,...,
contrairement a la propagande qui en est
faite par le Likoud...
9-le programme cite un expert israélien
qui met sur le même pied d’égalité « le
judaïsme politique » et l’Islam
politique, ce qui contrarie un des
principes de la propagande du Likoud
selon laquelle aucun mouvement en Israël
ne peut être comparé à des mouvements
dans le monde islamique.
10- Le reportage permet aux Palestiniens
de souligner que la façon dont les
Israéliens construisent le mur de
séparation isole Bethléem, la ville
natale de Jésus ou il ne reste plus que
18% de chrétiens, en fait «une prison à
ciel ouvert."
Ces dernières années,
plusieurs grands journalistes américains
ont poussé un cri de colère contre la
mainmise du lobby sioniste pro israélien
sur les médias américains ou ont fait
exprès de donner un avis différent de la
version officielle américaine. Tous ont
été révoqués de leur lieu de travail.
Bob Simon devrait avoir un sort
similaire. Affaire à suivre au pays qui
exporte la démocratie au monde entier.
(à dos de chars!).
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