Opinion
La chute des
Frères Musulmans: Le Pouvoir contre la
Cause ??
Leila
Mazboudi
Pourquoi les Frères Musulmans en
Égypte ne font-ils pas comme l’imam
Khomeiny en Iran
Vendredi 13 janvier
2012
Cela fait quatre mois
que des responsables américains font la
navette vers le siège des Frères
Musulmans (FM) au Caire.
Mais jeudi, la rencontre était bel et
bien officielle. C’était la première
fois qu’un responsable aussi haut-placé,
en l’occurrence le vice-secrétaire
d’état des affaires étrangères William
Burns se déplace en personne pour venir
des États-Unis et se rendre chez eux. Il
y a eu avant lui John Kerry, le
président de la commission des affaires
étrangères au Congrès.
Dans la forme, la
délégation de Burns s’est voulue être
impressionnante : un convoi d’une
dizaine de voitures, transportant ses
assistants, sans oublier la compagnie de
l’ambassadrice Anne Paterson. ((Ce
devrait faire croire aux FM leur
importance !))
Favori aux élections, puis vainqueur
haut les mains aux législatives, la
confrérie historique des Frères
Musulmans est incontournable.
Depuis la chute de leur homme de main
Hosni Moubarak, les responsables
américains craignaient perdre ce pays,
s’il se désengage des accords conclus,
dont le plus important celui de camp
David qui instaura la paix avec l’entité
sioniste et sortit l’Egypte, principal
pays de la région de l’équation du
conflit arabo-israélien.
Il fut un temps, pendant longtemps
certes, ce parti était farouchement
opposé aux accords de paix avec Israël.
Jusqu’à l’éclatement de la révolution le
25 janvier 2011!
Depuis que les FM sont
rassurés de remporter les élections, ils
ne cessent de rassurer les Américains,
et par derrière les Israéliens qu’ils ne
toucheront pas à ces accords. La
rencontre de jeudi ne fut qu’une
confirmation a caractère officiel : «
l’Égypte qui est un grand pays et a ses
propres institutions respecte tous les
accords conclus dans le passé tant que
toutes les parties les respectent », a
affirmé leur président Mohammad Morsi a
son hôte américain.
Les autres thèmes de
la rencontre pourraient sembler moins
importants, s’ils ne sont expliqués
comme des contreparties.
Selon un des dirigeants du parti de la
Liberté et de la Justice (émanation
politique à la turque des FM), Mohammad
Saïd, la confrérie a mis l’accent sur la
nécessité que « les Américains
respectent la volonté de la rue
égyptienne, et la nature de la
démocratie qui soit compatible avec sa
culture et sa référence religieuse ».
L’équation serait donc qu’en échange
d’accéder librement au pouvoir et
d'instaurer le régime qui leur
convienne, les FM sont prêts à oublier
la Cause palestinienne.
Preuve à l’appui : les responsables de
la confrérie n’ont eu que très peu de
mots à cette cause centrale de la nation
islamique et dans la littérature
politiques des FM : se bornant à
demander aux Américains "d’exercer des
pressions sur Israël pour faire cesser
les agressions contre les Palestiniens".
Sans allusion aux colonies, ni à
Jérusalem AlQuds, et à sa mosquée AlAqsa
et autres lieux saints de l'Islam, ni à
la Cisjordanie occupée, ni au droit de
retour des Palestiniens, ...
Plus que jamais, c’est
le slogan « l’Égypte d’abord », lancé
par l’ancien président Anouar Sadate que
les FM sont en train de raviver.
Dans le communiqué, il est dit aussi que
Morsi a demandé aux Américains de «
changer leurs politiques en faveur des
peuples » et d’élaborer « leurs
positions concernant les questions
arabes et islamiques d’une façon
positive ».
Ironie du sort, parmi tous ces peuples,
et devant cet invité dont le pays en a
fait pâtir à tous les peuples du Tiers-
monde, les Frères musulmans ne se sont
souvenus que du peuple syrien, lui
demandant d’adopter « une position plus
claire à l’encontre des meurtres
méthodiques exercés contre lui » ! Sans
aucune allusion aux peuples révoltés au
Yémen, au Bahreïn, et en Arabie.
Les FM ne peuvent que
savoir que les Américains ne chôment pas
pour renverser le régime syrien, pour la
seule raison qu’il soutient le camp de
la résistance.
Leur position consolide la première
équation. Les FM ne feront pas de
l’Égypte un pays de la confrontation. Le
tout pour accéder au pouvoir.
Pour sa part, l’hôte
américain semblait comblé, en voyant les
Frères Musulmans rejoindre Sadate et
Moubarak en politique extérieure. Il ne
savait pas comment multiplier ses
promesses de respect pour le peuple
égyptien, et les dispositions de son
pays à offrir toutes sortes de
collaboration, politique et économique.
Comble du ridicule : Burns s’en alla
même jusqu’à remercier « la révolution
du peuple égyptien qui a renversé la
tyrannie ». Comme si Hosni Moubarak n’a
jamais été le principal allié de son
pays !
Pour les partisans du
camp de la résistance, les positions des
Frères Musulmans d’Égypte sont plus
surprenantes et semblent les sortir de
leur peau. Il est beaucoup question
d’une entente entre eux et les
Américains, patronnée par le Qatar et la
Turquie. Mais elle n’explique pas les
raisons de cette chute.
Plus que jamais, une
question s'impose aux Frères Musulmans :
pourquoi ne font-ils pas en Egypte ce
que l’Imam Khomeiny a fait en Iran
depuis trente ans? Une question qui nous
ramène à saluer le grand courage de cet
homme et de son peuple.
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