Selon cet article, on assiste au démantèlement programmatique,
sinon programmé, des services de santé. Services de santé
institutionnels et étatiques qui assurent la
communauté de la
solidarité et de la générosité - de la charité. Qui s'échine à
démanteler les services de santé? Des cabinets de stratégie,
d'analyse et de droit au service des élites oligarchiques
concernées par le secteur de la santé. On commence par bosser au
service des groupes de laboratoires et autres industries
médicamenteuses, puis on se rend compte bien vite que
tous les secteurs
industriels et financiers sont concernés par cette logique de l'oligarchisation
de la santé.
Au passage, il est important de constater le rôle primordial de
ces cabinets d'intrigues qui ont pris la place des boudoirs et
des alcôves de l'Ancien Régime. C'est dans ces cabinets que les
cercles oligarchiques recrutent leurs stratèges, leurs
prévisionnistes et leurs
analystes. En France, un porte-parole de ces milieux est
l'ineffable Baverez (cabinet Gibson, Dunn & Crutcher LLP), selon
qui la diminution du temps de travail aboutit
inévitablement et
tragiquement pour le
petit peuple à une augmentation de l'alcoolisme et des violences
conjugales. Ergo...
Il est vital (pour l'homme) de connecter les velléités
ultra-libérales de démantèlement de la santé avec la mentalité
oligarchique qui a compris que l'effondrement inévitable du
système de domination impliquait la mise en place de programmes
malthusiens pour mieux contrôler la domination par temps de
crise, soit par temps de dégringolade. Au passage, on notera le
lien pour le moins frappant entre malthusianisme et
décroissance. C'est une correspondance troublante et
terrifiante, car d'ordinaire on présente les adeptes de la
décroissance comme les opposants au système dominant, comme ceux
qui veulent enfin rationaliser le système politique et
économique, le capitalisme, le libéralisme...
En réalité, les décroissants sont les idiots utiles et les
promus opposants des
malthusiens explicites - qui pensent aux
sévices des cercles
oligarchiques. On a les opposants qu'on peut, mon Prince! Les
décroissants sont les opposants des croissants une fois que l'on
a compris que la croissance en crise menait vers la décroissance
et la croissance malthusienne. Le démantèlement de la santé est
un point cardinal du malthusianisme en ce qu'il permet de
détruire les États-nations nés de la Paix de Westphalie et les
digues antioligarchiques et
républicaines.
Au fait, si l'on en croit le sociologue Alphonse d'Houtaud, que
veut dire santé? La santé renvoie au salut. La santé est ce qui
sauve. Détruire la santé est ainsi détruire ce qui sauve.
Détruire le salut. Je sais bien que quand on analyse
sérieusement et lucidement ce qui signifient décroissance et
malthusianisme, on arrive à la conclusion que leurs zélateurs
complémentaires et antagonistes sont favorables à la destruction
de l'humanité et à tous les antonymes du salut - sous couvert
chaque fois de sauver l'humanité du péril écologique
irrémédiable et urgentissime.
Une fois de plus, l'étymologie est un redoutable révélateur
contre les innombrables campagnes de propagande favorable au
système (tout comme la mode marginale et anticonformiste, la
propagande se présente toujours
comme opposée au système au pouvoir et comme rebelle). Le
déni et la mauvaise foi empêcheront sans doute les décroissants
de comprendre en fin
qu'ils font le jeu trouble et pervers des malthusiens. Ils
s'abriteront derrière les discours scientifiques (scientistes?),
la condamnation noble et courageuse du capitalisme ou la
critique de l'impérialisme. Ils avanceront leur argument-massue
d'un monde mieux contrôlé par l'homme et enfin compatible avec
la nature polluée, souillée et détruite par les exactions
humaines. Ils fustigeront la méchanceté
rousseauiste de l'homme.
Las! Tout projet de décroissance n'est pas seulement un projet
évident de destruction programmé et incontrôlable (par
définition). La décroissance n'est pas seulement incompatible
avec la structure de développement humain. Soit l'homme croît;
soit il disparaît. L'homme n'est pas capable de fixité, car sa
représentation du réel n'est pas celle d'un réel fixe et stable,
ainsi que voudrait nous le faire accroire un Aristote, chef de
file des nihilistes contre le maître Platon. L'homme se meut
dans un réel qui est dynamique et en constante évolution.
L'homme a seulement le choix entre croître et décroître. Je sais
bien que l'entropie est l'antienne
anthropique à la mode,
mais la vérité, c'est que l'univers est de forme
antientropique... Dans
cette configuration qui indique que notre époque est nihiliste,
plus précisément immanentiste,
avec comme clé de voûte le cartésien radical Spinoza, le
démantèlement de la santé a valeur de slogan subliminal.
D'avertissement aussi. Démanteler la santé, c'est rien moins que
démanteler le salut. Démanteler ce qui sauve l'homme. Vous voilà
prévenus. Si vous refusez d'entendre, désolé.
Publié le 11 janvier
2010 avec l'aimable
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