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Le Quotidien d'Oran
Un pouvoir
sérieusement ébranlé
Kharroubi Habib
Manifestation Alger 12.02.11 - Photo: El
Watan
Mercredi 16 février 2011
Signe irrécusable que le pouvoir algérien est sérieusement
ébranlé, son silence après les réactions et déclarations de
l'étranger critiquant et condamnant son recours à la répression
contre les manifestations pacifiques de contestation ayant eu
lieu dans le pays sous l'égide de la Coordination nationale pour
le changement et la démocratie (CNCD).
En d'autres temps, il aurait réagi au quart de tour en criant à
«l'ingérence étrangère» inadmissible et inacceptable. Il n'a
pipé mot cette fois. Il faut croire qu'il a pris conscience que
l'indignation souverainiste dont il a si souvent usé est passée
de mode dans le conteste créé par les révolutions populaires en
Tunisie et en Egypte.
En fait, il en est à donner des gages d'avoir bien entendu et
décodé les remontrances et mises en garde internationales ayant
émané des Etats-Unis et d'Europe. Et c'est bien un gage qu'a
donné Mourad Medelci, ministre des Affaires étrangères, en
déclarant lundi sur les ondes d'Europe I que «la levée de l'état
d'urgence interviendra dans les jours prochains», expliquant que
cela signifiera un «retour en Algérie à l'état de droit, qui
permet de manière totale l'expression des opinions».
Washington ayant fait savoir que les Américains « suivront de
près la situation en Algérie ces prochains jours », il faut
s'attendre à ce que les autorités adoptent un autre comportement
face aux manifestants, auxquels la CNCD a lancé un appel à une
nouvelle démonstration pour samedi prochain. Il est quasi
certain qu'elles annonceront la levée de l'état d'urgence avant
cette date et probablement même la levée de l'interdit
spécifique mis à l'organisation de marches dans la capitale.
Il est clair que le pouvoir en Algérie a compris qu'il a perdu
la bienveillance permissive dont il a longtemps bénéficié de la
part des Etats-Unis et de l'Union européenne, au motif qu'il est
un rempart contre le terrorisme international et le garant de la
stabilité d'un pays reconnu pour offrir des opportunités
d'affaires importantes.
Pris entre le marteau d'une contestation populaire qu'il ne
peut espérer contenir que par la répression et la violence, et
l'enclume de la nouvelle perception qu'ont les Américains et les
Européens de la nouvelle donne surgie dans le monde arabe suite
aux révolutions populaires tunisienne et égyptienne, le pouvoir
algérien n'est plus en situation de rester figé dans
l'autoritarisme et de continuer à faire l'autiste. En persistant
dans cette voie, il s'enlèverait l'ultime chance qui lui reste
de ne pas se trouver confronté à un scénario à la tunisienne ou
à l'égyptienne.
En somme, ou tirant les leçons de ces deux cas, le pouvoir
donne suite à la revendication de changement qu'exige la société
algérienne, ou il s'expose à être emporté par une lame de fond
qu'il aura rendue irrépressible. Il se trompe du tout au tout
s'il persiste encore à se faire à l'idée que l'Algérie est à
l'abri d'une situation comme celle qui a donné naissance aux
soulèvements populaires ayant abattu les régimes de Ben Ali et
de Moubarak.
Les marches sur lesquelles Mourad Medelci a ironisé lundi ont
été l'avertisseur que le pays est en ébullition et que
l'explosion populaire n'est pas loin. Ce n'est pas en exhibant
ses «muscles» aux contestataires et en faisant le «dos rond» aux
pressions étrangères l'incitant à prendre acte de la volonté de
changements qu'exprime son peuple, que le pouvoir algérien sera
en capacité de faire face à l'orage qui s'annonce.
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