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L'EXPRESSIONDZ.COM
QUATRE ANS DE GUERRE EN IRAK
La déconvenue américaine
Karim Mohsen

18
mars 2007 La désillusion est totale pour
Washington qui s’est lancé dans une guerre aventureuse le 19
mars 2003. Après quatre années de guerre, la
première remarque qui vient à l’esprit est de relever, une
fois encore, l’échec de la force brutale et qu’il ne suffit
pas d’être la superpuissance mondiale pour imposer son diktat
aux peuples comme le démontre quotidiennement la résistance
irakienne, qualifiée d’insurrection par le pouvoir placé par
les Etats-Unis à Baghdad et de terrorisme par ces derniers.
L’Irak c’est aussi le revers de la guerre «technétronique»
que ses hérauts, à commencer par l’ancien secrétaire à la Défense,
Donald Rumsfeld, pensaient être l’arme décisive contre un
peuple désarmé et une armée irakienne désorganisée et
inefficace. Aujourd’hui, la «doctrine» Rumsfeld,
abandonnée, est passée par pertes et profits au regard de
l’inanité d’une expérience qui s’est révélée lamentable
compte tenu des pertes humaines immenses, surtout du côté du
peuple irakien. Engagée sans le feu vert du Conseil de sécurité
de l’ONU et contre l’avis de plusieurs pays, qui y voyaient le
retour -sans doute sous d’autres formes- d’un certain impérialisme
qui voit un Etat vouloir, au seul prétexte de sa sécurité
(militaire et énergétique notamment) imposer son hégémonie et
son pouvoir unipolaire au reste du monde. L’invasion de mars
2003 entrait dans un contexte de redéploiement américain
consistant singulièrement dans la mainmise sur les puits pétroliers
du Moyen-Orient, dont l’Irak -gouverné par un régime supposé
hostile- en est l’un des plus gros producteurs avec l’Arabie
Saoudite. De fait, les sociétés pétrolières américaines ont
voyagé dans les «bagages» de l’armée d’invasion américaine
faisant main basse dès le lendemain de la chute du régime de
Saddam Hussein sur les gisements pétroliers irakiens. Evidemment,
officiellement, cette armée d’invasion américaine est venue
inculquer la «démocratie» aux pauvres Irakiens en sus de
combattre le «terrorisme». Quatre ans après cette
invasion, le résultat est catastrophique avec une insécurité
omniprésente alors que le chaos règne en maître dans le pays,
avec en sus une guerre confessionnelle alors que l’Irak est au
bord de la partition. Il est patent que ce n’est pas là le scénario
qui a été tracé par les stratèges de la Maison-Blanche qui
pensaient effectuer en Irak une promenade de santé après la
chute rapide du régime «saddamien» et la désagrégation
de son armée. De fait, forts de leur puissance de feu, les
Etats-Unis pensaient alors avoir gagné la guerre suite à la
chute du régime de Saddam Hussein le 9 avril 2003 après
l’invasion militaire de l’Irak trois semaines plus tôt.
Aussi, c’est en grande pompe que le président américain George
W.Bush annonçait le premier mai de cette année «la fin de la
guerre». Or, la guerre loin de finir ne faisait que commencer
comme en attestent outre les violences quotidiennes qui
endeuillent le pays avec des milliers de morts irakiens
comptabilisés et (plus de trois mille) de soldats américains tués
au combat. La guerre contre l’Irak, outre l’échec consommé
dans la «démocratisation» du pays est aussi, sans doute
surtout, un revers total dans la lutte contre le terrorisme, comme
en excipait l’administration américaine justifiant son invasion
de l’Irak. Bien au contraire, la guerre contre l’Irak a eu
pour effet de renforcer, voire de stimuler les réseaux d’Al Qaîda
contre lesquels l’armée américaine était censée lutter. Or,
en Irak, c’est plutôt le syndrome du Vietnam qui se répète
pour les Américains eux qui pensaient apporter la «liberté»
et autres «bienfaits» de la civilisation occidentale aux
Irakiens, ils leur ont surtout apporté les violences et le
malheur. En fait, englués dans une guerre dont ils ne voient pas
comment en sortir, les Etats-Unis ont été, ces derniers mois,
contraints de jeter du lest et de composer avec des pays qui, hier
encore, faisaient partie de l’«axe du mal» dénoncé
par George W.Bush, à l’instar de l’Iran, de la Syrie et la
Corée du Nord. L’échec américain, c’est aussi
l’effritement de la coalition internationale -plusieurs pays ont
rappelé, ces deux dernières années, leurs contingents en Irak-
qui a accepté d’accompagner les Etats-Unis dans leur aventure
irakienne. Résumant la situation induite par la guerre contre
l’Irak, un expert du Council on Foreign Relations, Vali Nasr,
souligne dans la dernière livraison de la revue de ce centre de
recherche indépendant, Foreign Policy que «le nouvel Irak était
supposé devenir un modèle pour le Moyen-Orient et une menace
pour la théocratie iranienne. Au lieu de cela, l’Iran est
apparu comme le grand gagnant de la guerre des Etats-Unis».
De déconvenues en revers, les Etats-Unis qui n’ont pas tiré de
leçons de leur échec vietnamien n’ont (toujours) pas encore
compris que la force armée a toujours été impuissante à réduire
les peuples, leçon que leur administre à nouveau l’Irak. Publié avec l'aimable autorisation de l'Expression
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