Opinion
La Syrie, au cœur
de la Guerre tiède ?
D'une
désinformation médiatique à une
intervention programmée
Jean
Géronimo
Jean
Géronimo
Grenoble, le 30
août 2012
« Il faut
empêcher de réitérer le scénario libyen
en Syrie »
Vladimir
Poutine, 27/02/2012 (1)
La crise syrienne
est, aujourd’hui, arrivée à un
point critique. Une guerre fratricide massacrant, pour partie, des
innocents, est en cours.
Dans ses grandes
lignes, cette guerre est médiatisée par
les intérêts politico-économiques des
grandes puissances. Mais, très tôt, elle
a été polluée par les nouvelles
idéologies religieuses et nationalistes,
surfant sur les maladresses occidentales
et la soif de libertés de peuples en
perdition – au prix de dérives
politiques
incontrôlables et, sans doute,
irréversibles.
A l’origine, cette
quête identitaire a été précipitée par
la « fin des idéologies » (D. Bell)
issue
de la disparition de l’URSS, en décembre
1991, qui a favorisé le retour du
religieux comme idéologie alternative
et, au moins, réactivé son rôle
politique et identitaire. Dans le même
temps, la disparition du
verrou idéologique de la Guerre froide a suscité l’émergence de
micro-conflits périphériques désormais
porteurs, sur l’Echiquier arabe,
d’aspirations révolutionnaires. En ce
sens, la délégitimation de l’idéologie
communiste aurait agi comme facteur
catalyseur d’une
instabilité systémique à
l’échelle du monde et dont la crise
syrienne ne serait, au final, qu’un
sous-produit – une forme
d’effet émergent.
La (prévisible)
réaction
d’auto-défense du régime syrien face
à la terrible violence
« révolutionnaire » attisée de
l’extérieur a débouché, aujourd’hui, sur
une inquiétante guerre civile – imputée
par les médias occidentaux, de manière
(trop) systématique et erronée, au seul
président Bachar El-Assad. Pourtant,
l’opposition armée anti-Assad est
responsable de davantage de tueries
étrangement passées sous silence et qui,
en d’autres lieux, auraient pu être
qualifiées de « crimes contre
l’humanité », pour reprendre une
expression trop souvent manipulée par la
gouvernance néo-libérale sous leadership
américain, dans l’optique de justifier
ses actions répressives.
Avec une certaine
légitimité,
on peut donc s’interroger sur
l’existence d’une
pensée unique, structurellement favorable aux « rebelles »,
et
verrouillant l’information sur le
déroulement de la « révolution »
syrienne – sous l’impulsion de
l’Organisation syrienne des droits de
l’homme (OSDH), étrange ONG
politiquement (très) orientée et
semblant avoir un monopole « légitime »
sur l’information. Régulièrement émise
par l’OSDH, l’information sur la nature
et l’ampleur des massacres censés
perpétrés par le régime Assad est, en
effet, admise comme vérité scientifique
par le
consensus médiatique – formatant,
par ce biais, une opinion publique
internationale hostile au régime syrien.
Toutefois, ce dernier reste –
heureusement – soutenu par l’axe
sino-russe.
L’issue, tant
désirée par les promoteurs du
Printemps arabe, ne semble désormais
plus faire de doutes. Mais pour Moscou,
c’est plutôt un
Hiver islamiste, réchauffé par
le doux soleil de la Charia, qui se
prépare – avec, naturellement, la
complicité américaine.
Comment et pourquoi
en est-on arrivé là ? Et qui, surtout, y
avait intérêt ?
Vers un point de non retour, pour
réitérer le « scénario libyen »
De manière
indéniable, ce point de non retour a été
favorisé de l’étranger dans le cadre
d’une stratégie de communication
politiquement orientée et
unilatéralement focalisée contre la
« dictature » Assad, désigné par le
consensus médiatique comme
l’ennemi à abattre.
Très clairement,
dès l’origine, la rébellion anti-Assad a
été financée et armée par des membres
clés (riches en pétrodollars) de la Ligue arabe, principalement
l’Arabie saoudite et le Qatar. Très
vite, elle a été encouragée par
l’administration américaine et ses
alliés traditionnels, avides de
s’insérer dans la vague révolutionnaire
portée par l’histoire et, surtout, de
profiter des
opportunités politiques – dont
celles de contenir les ambitions russes,
voire chinoises, dans une région
stratégique sur les plans politique et
énergétique. Ainsi, dans un premier
temps,
la Turquie a
discrètement servi d’appui logistique
pour les « rebelles » et, dans un second
temps, elle s’est ouvertement montrée
désireuse de passer à l’offensive,
c'est-à-dire à l’action armée sur le
territoire syrien. Au nom de la liberté
des peuples et, naturellement, de leur
droit à disposer d’eux-mêmes – la
couleuvre est, tout de même, dure à
avaler. D’autant plus, si on est russe.
Les
infiltrations aux frontières ont été
nombreuses au début de la
« révolution ». Comme par hasard, tous
les points de conflits sont anormalement
et systématiquement proches de la
frontière syrienne – curieux, tout de
même, que nos médias ne se soient pas
interrogés sur cette troublante coïncidence.
Cette situation est illustrée, depuis
fin juillet, par la volonté des
« rebelles » de contrôler certains
postes-frontières dans le but de
faciliter les « passages », autrement
dit, les actions militaires et les
attentats contre les positions
syriennes.
Une telle
configuration confirme l’hypothèse d’une
aide extérieure, très tôt
invoquée par le président syrien
Bachar El-Assad
et qui, sans surprise, n’a jamais été
prise au sérieux par les médias
occidentaux, perdus dans le ciel bleu du
monde de l’ignorance apprise, alimentée
par la seule information diffusée par l’OSDH.
Loin d’être spontanée, cette
« révolution » est donc
orientée et, en ce sens, elle
apparaît davantage comme une
« évolution », impulsée de l’extérieur
et sur laquelle surfent les stratégies
manipulatrices de puissances
ambitieuses. Mais, dans la mesure où il
s’agit d’un retour en arrière sur le
plan politico-social – surtout en ce qui
concerne le statut de la femme et des
libertés individuelles (dont politiques)
–, je parlerai plutôt « d’involution ».
Tout a été fait,
dans le cadre d’un
scénario programmé, pour provoquer
l’armée régulière et les structures de
sécurité de l’Etat syrien de manière à
les contraindre à une réaction violente
et créer, par ce biais, une instabilité
croissante
auto-cumulative, à terme,
potentiellement explosive. En outre, ce
chaos a été aggravé par l’émergence de
milices privées, parfois de nature
religieuse, et échappant à tout contrôle
gouvernemental. Au final, il s’agit
d’atteindre un
seuil critique
(déclencheur de « l’explosion »),
synonyme de guerre civile – quitte à
sacrifier quelques civils,
quotidiennement imputés par l’OSDH au
« sanguinaire » président Assad ou,
alternativement, à d’inévitables
« dégâts collatéraux ». Et quitte,
aussi, à générer une situation
anarchique caractérisée par la
délégitimation des lois et
structures étatiques. Une catastrophe
programmée.
Aujourd’hui, l’Etat
syrien, dont l’autorité est
considérablement érodée, n’a même plus –
au sens de Max Weber – le monopole de la
« violence légitime » sur son
territoire, traditionnellement considéré
comme le socle de la stabilité d’un
Etat-souverain. Désormais, le terreau
est donc propice à la répétition du
« scénario libyen », selon l’expression
usitée de V. Poutine.
Sous prétexte de
défendre les intérêts légitimes du
peuple syrien, l’insidieuse politique
arabo-occidentale a, objectivement et,
sans doute,
consciemment, contribué à ce chaos.
Complicité arabo-occidentale, au nom
d’un troublant messianisme moral
Les « Amis de
la Syrie » ont, très
tôt, instrumentalisé la crise syrienne
pour défendre leurs propres intérêts qui
font du départ d’El-Assad, la
pierre angulaire de leur stratégie.
Les intérêts de
cette coalition hétéroclite se
rejoignent, sur certains points précis –
dont celui de placer un pouvoir « ami »,
apte à gérer l’après-Assad –, et, à la
base, ils sont structurellement opposés
à ceux de l’axe sino-russe. Redoutant
une
déstabilisation régionale, l’axe
sino-russe prône en effet une solution
politique
négociée qui n’implique pas, nécessairement, l’élimination du
président syrien. Nuance politique
essentielle, expliquant la division,
donc l’impuissance du Conseil de
sécurité de l’ONU à travers le blocage
systématique de ses résolutions par les
responsables russes et chinois – mais
c’est aussi, cela, la démocratie. Sur ce
point, on peut d’ailleurs s’interroger
sur la
viabilité d’une résolution prônant
une « transition démocratique » en Syrie
et soutenue par l’étrange tryptique
Arabie Saoudite-Qatar-Turquie. Avec le
blanc-seing occidental…
Des intérêts
économiques (contrôle de l’énergie),
politiques (lutte d’influence) et
stratégiques (inflexion des rapports de
force) sont les
enjeux sous-jacents au conflit syrien exacerbé, en définitive, par
la montée brutale d’Al Qaïda (reconnue
par Washington) et par l’opposition
religieuse sunnites/chiites. Dans son
essence, cette opposition forme une
ligne de fracture
confessionnelle auto-destructrice et à jamais ré-ouverte, parce que
politiquement non neutre – et facilement
manipulable, donc utile aux régimes
hostiles au maintien du président Assad.
Le
leitmotiv humanitaire, a été à la
fois le fil conducteur et l’habillage
légitime de l’ingérence croissante de la
coalition arabo-occidentale dans le
processus politique interne de
la Syrie. Ce
devoir d’ingérence
progressivement institué devrait, à
terme, justifier une intervention (sous
une forme à définir) dans l’optique de
renverser le régime Assad et, s’il le
faut, sans la
légitimité onusienne – pour
contourner le barrage sino-russe.
Désormais, avec le soutien actif des
services secrets allemands, américains,
britanniques et français, tous les
efforts de la coalition
arabo-occidentale sont concentrés vers
cet ultime objectif. Pour l’heure,
l’idée d’imposer une
zone d’exclusion aérienne (définie
comme zone de sécurité) pour créer un
« couloir humanitaire » fait, peu à peu,
son chemin. Le problème est qu’un tel
« couloir » a, déjà, fait l’objet d’une
instrumentalisation
politico-militaire en d’autres lieux et
d’autres temps. Pour Moscou, une telle
leçon ne s’oublie pas et, surtout, ne
doit plus se répéter.
L’essentiel est
d’arriver, après la réélection d’Obama,
au
point de basculement de la
crise (« seuil critique ») provoquant
l’intervention finale et, en cette fin
d’été, nous y sommes proches. Cette
intervention militaire est rejetée par
russes et chinois, psychologiquement
marqués par
les tragédies serbe (1999),
irakienne (2003) et libyenne (2012), où
la
manipulation des règles
internationales et des mécanismes
onusiens a été flagrante, mettant en
cause, selon eux, la légitimité de la
gouvernance mondiale. De façon
troublante, cette transgression des
règles est réalisée au nom de
valeurs morales supérieures, selon
la tradition post-guerre froide
inaugurée par la vertueuse Amérique,
investie de sa « destinée manifeste » et
de son libéralisme triomphant – un
discours, certes, bien rôdé.
Un sous-produit de
cette inconscience politique occidentale
a été la propagation du
syndrome révolutionnaire, via un
Islam radical moralisateur, au-delà de
l’Echiquier arabe : dans le monde
post-soviétique et sur le continent
africain, au Mali pour commencer, avec
l’extension de la Charia. Avec, à la
clé, d’irréversibles dégâts collatéraux.
Pour l’axe
sino-russe, il y a une
ligne rouge à ne pas franchir dans
cette partie stratégique dominée par les
grandes puissances – notamment, en
Syrie. Mais les dés sont, déjà, pipés.
Poursuite du reflux russe sur
l’Echiquier arabe, sous bienveillance
américaine
Dans l’hypothèse
d’un renversement du président Assad, la Russie (avec la Chine et l’Iran)
serait la principale perdante.
Pour rappel,
la Syrie
est un des principaux alliés de l’Iran
dans la région et la disparition d’Assad
isolerait davantage Téhéran – ce que
souhaitent, pour diverses raisons, de
nombreux Etats arabes et occidentaux.
D’autre part, le renversement d’Assad
risquerait de déstabiliser le Liban et
au moins, d’y redéfinir le
jeu politique interne avec,
notamment, l’affaiblissement du
Hezbollah libanais. L’évolution
syrienne est donc politiquement non
neutre pour l’Etat israélien et sa
stratégie au Moyen-Orient et, en ce
sens, pour le
destin géopolitique de la
région.
A cela, il convient
de préciser que l’Azerbaïdjan,
ex-république de l’URSS très sensible
désormais – comme d’autres Etats de la
périphérie post-soviétique – aux
sirènes américaines (et à leurs
dollars), rêve de créer un « Grand
Azerbaïdjan » étendu à une partie de
l’actuelle Iran. Dans cette optique,
l’affaiblissement de l’axe Iran-Syrie
serait une bonne chose pour ses
prétentions territoriales. Moscou
redoute un tel scénario, d’autant plus
qu’il nuirait dangereusement aux
intérêts de son fidèle allié et
partenaire stratégique, l’Arménie – dont
l’existence (et celle de ses bases
militaires) serait, dés lors, menacée.
En outre, par
l’intermédiaire de son ministre des
affaires extérieures, Ahmet Davutoğlu,
la Turquie
– véritable base arrière et levier
de l’influence américaine en Eurasie
– revendique, de manière troublante, le
rôle de « pionnier du
changement démocratique » au
Moyen-Orient. En fait, la défense de ses
intérêts nationaux – qui intègrent le
« problème » kurde – a incité la Turquie à s’ingérer dans la
crise syrienne. Et, surtout,
elle
l’oblige à maintenir une
veille stratégique dans le Nord de
la Syrie convoité,
selon Ankara, par les « extrémistes
kurdes ». Enfin, il faut rappeler que la Turquie rêve toujours d’un
Empire ottoman étendu à l’Asie centrale
ex-soviétique. Tout est donc en place,
pour la partie finale.
Tendanciellement,
on assisterait donc à la poursuite du
roll back (reflux) de la
puissance russe, conduite par
l’administration américaine depuis la
fin de la Guerre froide et qui vise,
aujourd’hui, à affaiblir ses alliances
traditionnelles – donc, son pouvoir
potentiel sur longue période – en zones
arabe et post-soviétique. Car, qu’on le
veuille ou non, l’administration Obama
est objectivement tentée
de
manipuler les « révolutions » pour,
à terme, étendre sa
zone d’influence et sécuriser, par
ce biais, les principales sources
d’approvisionnement et routes
énergétiques – d’où l’intérêt de
« stabiliser », c'est-à-dire de
contrôler politiquement
la Syrie, le Liban et
l’Iran, véritables
nœuds stratégiques de la région.
Une telle extension se réaliserait au
détriment des dernières positions
russes, héroïquement tenues sur
l’Echiquier moyen-oriental et, en
particulier, en Syrie, face à la
pression médiatique et
politico-militaire de la coalition
arabo-occidentale – mais, pour combien
de temps encore ?
Dans cette optique
et de manière officielle,
l’administration américaine vient de
reconnaître la nécessité de
renforcer significativement son
soutien au « processus révolutionnaire
et démocratique » en œuvre en Syrie.
Dans ses grandes lignes, cette action
s’inscrit dans le prolongement de sa
récente ingérence – via de douteuses ONG
– dans le processus électoral russe et,
de façon plus générale, dans le
cheminement politique incertain de la
périphérie post-soviétique en vue d’y
imposer la « démocratie ».
Naturellement, selon les normes
occidentales.
Ce faisant,
Washington officialiserait une stratégie
qui, en réalité, a commencé bien plus
tôt. Tendanciellement, cette stratégie
s’appuie sur la
démocratie comme nouvelle
idéologie implicite et globalisante,
vecteur de sa domination politique dans
le monde. Au regard d’une lecture plus
structurelle de la crise syrienne,
médiatisée par les intérêts des
puissances majeures, cette attitude
américaine n’est pas une surprise et, au
contraire, semble cohérente avec une
ligne de long terme axée sur la
défense de son leadership régional –
contre les intérêts russes.
L’hyper-puissance
américaine avance ses pions,
inéluctablement.
L’Arabie saoudite, nouveau « pivot
géopolitique » de l’hyper-puissance ?
La poursuite du
« Printemps islamiste », à dominante
sunnite, renforce les positions de
l’Arabie saoudite dans la région et
donc, de manière indirecte, les
prérogatives de l’axe USA-OTAN.
Sur ce point, on
remarquera que les monarchies du Golfe,
qui sont (très) loin d’être plus
démocratiques que
la Libye et
la Syrie ont été,
jusque là, étrangement épargnées par la
vague révolutionnaire. Avec une certaine
légitimité, on peut donc se demander
pourquoi ? Et pourquoi passe-t-on sous
silence le sort des 80 000 chrétiens
expulsés de leurs foyers par les
« révolutionnaires » syriens dans la
province d’Homs, en mars 2012 ? Enfin,
pourquoi ne parle-t-on pas des
persécutions quotidiennes de la
population chiite (majoritaire à 70%) au
Bahreïn, associée à un verrouillage
total de l’opposition (et de
l’expression) politique ? Cette
répression est « supervisée » par
l’armée saoudienne encline, à la moindre
occasion, à faire intervenir ses chars –
sorte d’application arabe de la doctrine
Brejnev de « souveraineté limitée » – et
cela, quels qu’en soient les coûts
humains. Terrible et révélateur
silence médiatique.
La réaction
occidentale a été tout autre lorsque la Russie est – justement –
intervenue avec ses chars en Géorgie en
2008, pour protéger ses ressortissants
et ses soldats d’un massacre annoncé,
après l’inquiétante initiative du
président Saakachvili. Comment expliquer
cette lecture des Droits de l’homme (et
des peuples) à
géométrie variable ? Et pourquoi les
chars russes seraient-ils plus
« coupables » que les chars arabes – ou
américains, en d’autres circonstances,
lors des « croisades » morales
punitives ? Pour Moscou, une telle
situation confirme le maintien d’un
esprit de Guerre froide visant à la
marginaliser, de manière définitive, sur
la scène internationale. Un « deux
poids, deux mesures » politiquement
insupportable, et presque blessant.
La principale
conséquence de l’extension de la
domination sunnite au Moyen-Orient gagné
par la contagion « révolutionnaire » est
que, par l’intermédiaire de l’Arabie
saoudite, comme
levier d’ingérence
privilégié, l’administration américaine
renforce son
contrôle de la région. Parce que,
par définition, il sera dorénavant plus
facile pour Washington d’actionner
un
seul levier pour dicter sa politique
régionale et défendre, ainsi, ses
intérêts de grande puissance. Dans ce
schéma, l’Arabie saoudite devient une
pièce maitresse
(« pivot », au sens de Brzezinski)
des Etats-Unis sur l’Echiquier arabe
permettant, désormais, à
l’hyper-puissance d’agir sur les
événements et d’orienter le jeu, sans
véritable opposition. Une contrepartie
possible serait alors, pour Washington,
de tenir compte des
intérêts politiques de l’Arabie
saoudite dans les régions musulmanes de
l’ex-espace soviétique, âprement
convoitées dans le cadre de son
face-à-face avec la Russie. En ce sens, la
crise syrienne cache un enjeu politique
plus global, fondamentalement
géostratégique – et, de manière
indiscutable, lié au déroulement de la
Guerre tiède.
Cette tendance au
renforcement de la
gouvernance unipolaire, légitimée
par l’éclatante victoire américaine de la Guerre froide, est
officiellement et régulièrement dénoncée
par Vladimir Poutine, depuis son fameux
discours de Munich de 2007 sur la
sécurité dans le monde. Les faits, comme
les hommes, sont – parfois – têtus.
Paradoxalement, les
involutions arabes, sous
bienveillance américaine, ne feront
qu’accélérer cette tendance (2).
Et, maintenant, que
faire ?
Jean Géronimo,
spécialiste des questions économiques et
stratégiques russes
(1)
http://fr.rian.ru/discussion/20120227/193517992.html
: « La
Russie
et l’évolution du monde », article de V.
Poutine sur la politique étrangère
russe, 27/02/2012 –
RIA Novosti.
(2) Les crises
arabes et leurs implications
géopolitiques pour la Russie, sont traitées dans
le post-scriptum (50 pages) inséré dans
la nouvelle édition de mon livre : « La
Pensée
stratégique
russe –
Guerre
tiède
sur l’Échiquier eurasien : les révolutions arabes, et après ? ».
Préface
de
Jacques
SAPIR,
mars
2012, éd.
SIGEST,
code ISBN
2917329378
–
en
vente :
Amazon,
Fnac,
Decitre
(15
euros).
Le sommaire de Jean Géronimo
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