Tribune
Ansar Al-Chariâ
est une menace pour Ennahdha
autant que pour la Tunisie
Imed Bahri
Mardi 21 mai 2013
Ennahdha ne peut plus utiliser Ansar Al-Chariâ
comme un instrument de déstabilisation
qu'il peut utiliser à sa guise (contre
les opposants, les journalistes, les
artistes, les universitaires, etc.). Ce
groupe est devenu son plus redoutable
adversaire...
Par
Imed Bahri
Ali Lârayedh, a déclaré, dimanche,
à Doha, où il est en visite depuis
vendredi, que le groupe salafiste
jihadiste Ansar Al-Chariâ «ne
reconnaît pas l'Etat et a des attaches
avec des groupes terroristes».
Sahha Ennoum baba!
Un bouton sur
lequel on appuie
Le chef du gouvernement, qui était
ministre de l'Intérieur, s'était
distingué, il y a quelques mois, par son
laxisme vis-à-vis des partisans d'Ansar
Al-Chariâ et cela lui a été longtemps
reproché par l'opposition et les médias.
Il était, en réalité, sous l'influence
des ultras d'Ennahdha, les Ghannouchi,
Ellouze, Chourou, Harouni et autres, qui
considèrent les salafistes jihadistes
comme une réserve électorale et un moyen
de pression sur la société civile et les
partis progressistes et laïques.
C'est le fameux bouton sur lequel on
appuie pour que les meetings des partis
de l'opposition soient empêchés, les
bureaux de l'Ugtt attaqués, les
journalistes agressés, les artistes
intimidés, les zaouias (mosaulées) des
saints saccagées et brûlées, etc.
Après les récentes déclarations de
ses dirigeants dénonçant la violence d'Ansar
Al-Chariâ, peut-on dire qu'Ennahdha a
durci sa position vis-à-vis des groupes
extrémistes liés à Al-Qaïda après que 16
agents de la garde nationale et de
l'armée aient été blessés, entre fin
avril et début mai, par des mines posées
par des groupes armés liés à Al-Qaïda à
Jebel Châmbi, à la frontière avec
l'Algérie?
Le parti islamiste sait pertinemment
qu'Ansar Al-Chariâ est d'obédience
jihadiste et que ses membres sont des
partisans d'Al-Qaïda et vénèrent Oussama
Ben Laden. Il sait également que ce
groupe, qui ne reconnaît pas l'Etat
tunisien, ni ses institutions, ni son
drapeau, ni ses frontières nationales
(puisqu'il n'accepte de frontières que
celles de la oumma et du califat
islamiques)..., a des connexions
régionales en Afrique du Nord (Libye,
Algérie, Mali...) et internationales au
Moyen-Orient (Syrie, Afghanistan...) et
dispose d'armes venues de l'étranger. Il
sait, enfin, que son chef, Abou Iyadh,
en fuite depuis l'attaque de l'ambassade
des Etats-Unis, le 14 septembre 2012,
est un ancien d'Al-Qaïda en Afghanistan,
et qui ne fait pas mystère de son projet
de lancer le jihad en Tunisie et dans
toute la région.
Un loup dans
la bergerie
Pourquoi donc Ennahdha a-t-il attendu
si longtemps avant de qualifier ce
mouvement de «terroriste», d'«ennemi
de l'Etat» et de «hors-la-loi»,
des mots qui fleurissent aujourd'hui
dans les déclarations des Ghannouchi,
Lârayedh, Bhiri et ses autres
dirigeants?
En fait, Ennahdha a compris qu'Ansar
Al-Chariâ n'accepte plus d'être une
simple réserve électorale, qui a aidé
Ennahdha à gagner les élections dans
plusieurs régions, et un instrument de
déstabilisation que le parti islamiste
peut utiliser à sa guise (contre les
opposants, les journalistes, les
artistes, les universitaires, etc.), car
il a pris conscience de sa force et
cherche désormais à prendre le pouvoir,
tout le pouvoir, pour imposer sa loi, la
seule qui vaille à ses yeux, à savoir la
chariâ. Et qu'à ce titre, il constitue
désormais le principal adversaire du
parti islamiste. Bien plus dangereux
pour lui que Nida Tounes, le Front
populaire, l'Ugtt ou les ex-Rcdistes...
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Publié le 21 mai 2013 avec l'aimable
autorisation de Kapitalis
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