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IRIN
Israël-Syrie: L'écho des manifestations au Golan
Le village druze de Majdal Shams, sur le
plateau du Golan occupé par les Israéliens,
est séparé de la Syrie par un massif montagneux
GOLAN, 19 mai 2011 (IRIN)
Quand des milliers de réfugiés palestiniens se sont récemment
rassemblés à la frontière syrienne avec Israël près du plateau
du Golan, une zone sous occupation israélienne, les villageois
locaux ont été stupéfaits. C’était la première fois en plus de
20 ans que cette frontière était confrontée à des incidents.
Le 15 mai, date anniversaire de la fondation d’Israël connue
pour les Palestiniens sous le nom de “Nakba”(la catastrophe),
tandis que la foule se pressait en direction du territoire
israélien, l’armée israélienne a abattu huit manifestants.
« Les Forces de défense israéliennes ont ouvert le feu afin
d’empêcher de violents semeurs de trouble de pénétrer
illégalement en Israël ; un certain nombre de semeurs de trouble
se sont infiltrés et ont provoqué une agitation violente dans le
village, » a déclaré l’armée israélienne.
Quelque 200 réfugiés palestiniens vivant en Syrie avaient passé
de force la frontière surveillée par Israël, et étaient parvenus
au village voisin de Majdal Shams où ils s’étaient regroupés
pour manifester sur la place principale, selon des sources.
Mais l’incident du 15 mai n’est que le signe le plus récent
d’une certaine agitation dans les collines habituellement
paisibles du Golan. Depuis le début des manifestations syriennes
en
mars, la communauté druze du Golan est partagée entre les
partisans du régime actuel du président Bashar al-Assad et ceux
qui soutiennent les manifestants.
Les Druzes sont un petit groupe religieux monothéiste qu’on
trouve dans plusieurs pays du Moyen-Orient. Dans le Golan, les
autorités locales soutiennent clairement M. Assad et sont
extrêmement fermes envers toute personne qui décide de soutenir
les manifestants ou de critiquer le gouvernement, et brandissent
la menace de l’exclusion sociale et religieuse. Mais au sein de
la communauté, certains ne sont pas d’accord.
« Ils [ceux qui se font entendre] se battent pour une juste
cause, » a dit l’activiste locale Shefa Abu Jabal, 25 ans, qui
risque de se faire exclure de la communauté druze pour son
soutien aux manifestants de Syrie.
« Il y a [en Syrie] des générations entières qui n’y connaissent
rien à la politique, et n’ont jamais entendu parler de liberté,
ni d’élections, » a t-elle ajouté. « YouTube et tous les sites
Internet israéliens sont bloqués. Ils méritent la liberté. »
Une information difficile à vérifier
Les journalistes étrangers ont du mal à pénétrer en
Syrie, ce qui fait qu’il est difficile de vérifier ce qui se
passe, mais les groupes de défense des droits humains estiment
qu’au moins 850 personnes, dont des femmes et des enfants, ont
été tués au cours de plus de deux mois de manifestations. Plus
de 8 000 personnes ont été arrêtées.
Shefa Abu Jabal, une activiste de
Majdal Shams,
risque l’exclusion sociale et religieuse en soutenant les
manifestations en Syrie.
Photo: Phoebe Greenwood/IRIN
Plus d’un million de Druzes vivent en Syrie. Jabal al-Druze,
située dans une région volcanique montagneuse près de la
frontière de Jordanie, est de loin la plus grosse communauté.
C’est la ville la plus proche de Deraa, le coeur du soulèvement
syrien au sud du pays.
Selon Joshua Landis, directeur du Centre d’Etudes sur le
Moyen-Orient de l’Université d’Oklahoma, Deraa 2, est une région
pauvre, où 32 pour cent de la population vit sous le seuil de
pauvreté, avec un revenu de deux dollars par jour ou moins.
La région du Golan est occupée par Israël depuis juin 1967. En
décembre 1981, Israël a annexé la région de façon unilatérale et
y a introduit ses lois, son appareil judiciaire et son
administration.
Le Comité International de la Croix-Rouge (CICR), se fondant sur
la législation humanitaire internationale, considère le Golan
comme un territoire occupé et, en tant que tel, comme soumis à
la Quatrième Convention de Genève de 1949 ainsi qu’aux règles de
la loi coutumière énoncées dans le Règlement de La Haye de 1907.
Aucun gouvernement n’a reconnu l’annexion du Golan par Israël.
Avec une superficie d’environ 1 200 kilomètres carrés, le Golan
abrite quelque 22 000 Syriens et 19 000 Israéliens, selon le
CICR, mais il est extrêmement difficile, pour ne pas dire
impossible, pour la grande majorité des Syriens du Golan d’avoir
des échanges avec le reste de leur pays.
La crainte des représailles syriennes
Malgré les restrictions, des activistes comme Shefa sont en
contact avec leurs amis, leur famille et leurs camarades
militants de l’autre côté [de la frontière] en Syrie, grâce à
Facebook. Pour Shefa, les reportages de violences sont
ahurissants, mais beaucoup ont trop peur des représailles
gouvernementales pour publier sur Internet les détails de ce
dont ils ont été témoins.
« En Syrie, une personne sur deux fait partie des services de
sécurité, » a affirmé Mme Abu Jabal. « Ils [les manifestants]
ont vu les violences. Et il y a de quoi avoir peur. Même pour
nous, les gens qui soutiennent simplement sur Internet. Nous
avons peur. »
Tout en étant typiquement de nature peu communicative et
autonomes, les Druzes sont aussi célèbres pour leur loyauté
envers la nation dans laquelle ils vivent, mais la communauté du
Golan se considère comme syrienne, malgré plus de 40 ans
d’occupation israélienne.
Un chef religieux local, le Cheikh Hussam, 35 ans, a dit qu’il
fallait comprendre la loyauté de sa communauté envers le
gouvernement syrien comme une expression de loyauté envers la
Syrie, plutôt qu’envers son président.
« La plupart des gens d’ici – 90 pour cent – soutiennent le
gouvernement [syrien] », a t-il expliqué. « Mais c’est plus une
attitude pro-syrienne que pro-Assad. C’est une question de
principe : nous sommes des Arabes syriens sous occupation. »
Mme. Shefa est convaincue que cela n’explique pas tout. Elle
estime que la peur des représailles, sur place et aussi pour les
membres de la famille là-bas, empêche sa communauté de
s’exprimer. « Ils pensent en quelque sorte que pour faire partie
de la Syrie, il faut faire partie du régime, » a t’elle dit. «
Mais la raison principale [de leur soutien à Assad], c’est la
peur, et c’est quelque chose que je peux comprendre. »
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