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IRIN
Israël: Durcissement des mesures envers les « infiltrés »
Des demandeurs d’asile
érythréens manifestent à Tel-Aviv pour obtenir leurs papiers
et leurs permis de travail (photo d’archives)
Photo: Tamar Dressler/IRIN
JÉRUSALEM, 16 novembre 2009 (IRIN)
Des organisations humanitaires ainsi que
plusieurs députés expriment leur indignation face à ce qui
semble être un durcissement de la politique d’Israël envers les
demandeurs d’asile qui pénètrent illégalement dans le pays.
Malgré les efforts des ONG, une loi sur « l’infiltration », dont
l’avant-projet a déjà été voté au Parlement, doit être approuvée
au cours des prochaines semaines. La loi considère toute
personne qui entre illégalement sur le territoire comme un
criminel et autorise des peines d’emprisonnement allant jusqu’à
sept ans pour des demandeurs d’asile provenant de pays « ennemis
».
Les pays « ennemis » sont le Soudan, la Somalie, l’Irak, l’Iran,
le Liban, la Syrie et la Libye. Toutefois, il arrive rarement
que des demandeurs d’asile tentent de pénétrer en Israël à
partir de ces pays – à l’exception des trois premiers. Ils
arrivent presque tous d’Égypte.
La loi permettrait également d’incriminer les ONG ou les
volontaires qui aident ces personnes et de garder en détention
des mineurs en situation irrégulière.
Oded Diner, d’Amnesty International, a exhorté les députés à
agir immédiatement pour empêcher l’approbation de la loi, mais
s’est dit consterné lorsque, le 3 novembre dernier, le comité
législatif du Parlement a rejeté la proposition des députés
Danny Danon (Likoud), Dov Khanin (Hadash) et Nitzan Horowitz (Meretz)
d’exclure de la loi la détention d’enfants et de mineurs en
situation irrégulière.
Amnesty International a
appelé le Parlement à « rejeter le projet de loi et à
s’assurer que toutes les dispositions concernant l’immigration
ou la sécurité nationale introduites dans la loi respectent les
obligations d’Israël en matière de droits humains en s’assurant
que les individus sous sa juridiction sont protégés,
indépendamment de leur statut d’immigration, et que des
individus ne sont pas renvoyés dans un État où ils courent le
risque d’être victimes de graves violations des droits humains
».
Des travailleurs humanitaires, exaspérés, ont
dit à IRIN qu’ils en avaient assez et qu’ils ne savaient pas ce
que leur réservait l’avenir. Sous le couvert de l’anonymat,
l’une d’entre eux a dit qu’elle travaillait avec des demandeurs
d’asile près de la frontière égyptienne. Si la loi est
approuvée, elle sera considérée comme une criminelle.
Camps de travail
Le 4 novembre, Galgalatz, la radio de l’armée israélienne, a
annoncé que le ministère des Finances avait élaboré un plan pour
« dissuader les infiltrés illégaux de pénétrer en Israël ».
En vertu de ce plan, un hébergement de base serait offert aux
demandeurs d’asile dans des camps situés dans le désert du Negev,
dans le sud d’Israël, et dans la région d’Arava. Ils recevraient
de la nourriture, un abri et des soins médicaux de base en
échange de leur travail non rémunéré, généralement dans
l’agriculture.
Les demandeurs d’asile seraient forcés de demeurer dans les
camps jusqu’à ce qu’une décision soit prise concernant leur
statut. On ignore cependant encore ce qui adviendrait de ceux
dont la demande est refusée. Israël n’accorde pas le statut de
réfugiés aux Soudanais du Sud et aux Érythréens (qui forment la
majeure partie des demandeurs d’asile).
« Ces mesures permettraient de dissuader ces soi-disant
demandeurs d’asile de venir ici », a dit à IRIN un membre du
gouvernement israélien sous couvert de l’anonymat. « Ce ne sont
pas des réfugiés, ce sont simplement des travailleurs immigrés
qui utilisent ce prétexte pour obtenir du travail, des soins de
santé et l’éducation gratuite pour leurs enfants. Nous croyons
que 80 pour cent d’entre eux ne sont pas des réfugiés ».
Des enfants des
demandeurs d’asile se divertissent dans une librairie construite
par des volontaires à Tel-Aviv
Photo: Tamar Dressler/IRIN
Selon le
Refugee Rights Forum, un groupement qui rassemble huit
organismes de défense des droits humains en Israël, le pays
compterait quelque 7 500 Erythréens et 6 000 Soudanais
demandeurs d’asile. Le Haut commissariat des Nations Unies pour
les réfugiés (UNHCR) estime le nombre total de demandeurs
d’asile à environ 18 000.
D’après l’Autorité israélienne de l’immigration toutefois, ils
seraient plus de 24 000, principalement des Soudanais et des
Érythréens, à s’être « infiltrés » en Israël depuis cinq ans. Le
pays a fait un « geste humanitaire » et accordé la résidence à
environ 450 personnes venues du Darfour.
D’après des sources de l’armée israélienne, 400 à 600 demandeurs
d’asile africains pénètrent chaque mois en Israël. Bien que
plusieurs d’entre eux parviennent à trouver un emploi, certains
dépendent de l’aide des ONG. Environ 2 000 d’entre eux sont en
permanence retenus captifs dans les centres de détention du
pays.
« Les travailleurs immigrés et les réfugiés apporteront des
maladies et d’autres problèmes à Israël, notamment le sida, la
tuberculose et la toxicomanie », a dit Eli Yishay, le ministre
de l’Intérieur israélien, dans une interview sur la chaîne
israélienne 2TV, le 2 novembre dernier.
Des réactions mitigées
Bien que plusieurs membres du gouvernement se soient prononcés
en faveur du plan de dissuasion, certains députés sont
horrifiés. M. Khanin a dit à IRIN : « La guerre qu’Israël livre
aux réfugiés est indigne de notre pays. Cette loi est contraire
aux valeurs humanitaires et aux valeurs juives. Elle n’a pas sa
place dans un État créé par des réfugiés ».
D’autres députés ont dit à IRIN qu’ils trouvaient le plan
tellement choquant qu’ils ne prendraient même pas la peine de
donner leur avis sur la question.
Les ONG qui travaillent avec les réfugiés en Israël ont
également exprimé leurs inquiétudes. « Ces camps de travail ne
dissuaderont pas des gens qui fuient des horreurs de venir », a
dit un travailleur humanitaire qui a souhaité garder l’anonymat.
« Le plan va simplement les priver du peu qu’ils parvenaient à
gagner pour vivre et fournir des esclaves dans des camps de
travail ».
Interrogé au sujet du plan, le porte-parole du ministère des
Finances a refusé d’aborder les détails du projet.
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