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Opinion

A mes sœurs qui ont choisi de porter le niqâb :
Soyez la main de dessus
Iyad-La-Joie


Photo: L'Expression

Mercredi 12 mai 2010

A vous mes sœurs qui ont choisi de porter le niqâb, je tiens d’abord à exprimer toute ma compassion pour ce que vous subissez depuis ce jour mémorable du 22 juin 2009, où le Président de la République en personne, seul devant l’ensemble de nos parlementaires réunis en congrès pour l’écouter discourir - une première depuis 1875- a officiellement annoncé le début des hostilités contre le niqâb, en transformant une question mineure en combat national, en vous livrant ainsi à un lynchage médiatique et politique, en faisant de vous un défouloir populiste subissant les harcèlements et les insultes des haineux et des imbéciles et en montrant la voie à suivre à d’autres pays européens.

Pire encore, car dans ce nouveau climat de chasse au niqâb, des « braves » se croyant chargés d’une mission nationale : effrayer ces voiles pour les faire disparaître du visage de la France, pourraient faire preuve d’excès de zèle, en s’attaquant à d’autres femmes musulmanes avec un simple foulard leur couvrant les cheveux !

Sauf événement majeur qui pourrait obliger nos gouvernants à réorienter leurs efforts vers les vraies priorités du peuple français, ce qu’on ne saurait exclure en ce temps de crise et de tension internationale, une loi d’interdiction générale du niqâb dans l’espace public devra être votée dans quelques mois ; une loi qui fera fi de l’avis du Conseil d’Etat.

Il y a cependant des embûches judiciaires : le projet de loi pourrait encore être attaqué devant le Conseil Constitutionnel s’il est saisi par 60 députés et sénateurs, ce que le gouvernement veut éviter. Une fois votée, la loi risque de nouveau de se retrouver devant le Conseil Constitutionnel, voire même d’aller jusqu’à la Cour Européenne des Droits de l’Homme. Mais c’est une procédure longue, et la période qui s’ouvre devant nous risque d’être très malsaine et pourra même nous réserver des tragédies que nos politiciens rajouterons sans doute à leurs CVs.

Qu’allez-vous faire mes sœurs ?

Quelques unes parmi vous seront tentées de partir vivre dans un pays plus tolérant vis-à-vis du niqâb, mais ce n’est jamais facile de quitter sa patrie, de plus l’installation dans ces pays, même ceux dits musulmans, pourraient vous réserver bien d’autres surprises. D’autres sœurs se montreront plus résignées, limiteront probablement leurs déplacements et laisseront leurs visages découverts à chaque sortie de chez elles. Et enfin, une troisième partie refusera d’obtempérer et jouera, jusqu’à épuisement, au chat et à la souris avec les autorités chargées d’appliquer la loi et de faire du chiffre.

Un autre regard sur la question

Pourquoi êtes vous disposées à supporter tout cela ? Pour vous, la réponse est claire, comme vous avez dû la répéter à plusieurs reprises : vous faites cela pour obéir à Dieu ; vous avez librement choisi de porter le niqâb car c’est une prescription islamique. C’est un avis que je respecte mais que je ne partage pas. Je vais même aller plus loin en vous demandant, en toute fraternité et au nom de l’islam dont vous défendez l’honneur, de voir les choses autrement et de considérer la possibilité de ne pas vous couvrir le visage.

Cependant, je tiens à vous rassurer, je ne cherche absolument ni à avancer des arguments pour vous démontrer que le port du niqâb n’est pas un devoir islamique – ce qui, à mon avis, serait une méthode complètement stérile dans ce contexte qui nous est imposé, ni à vous demander d’abandonner le niqâb car de toute façon vous ne pouvez rien contre la loi. Non, mon propos est tout autre.

La main de dessus

Vous connaissez le fameux « hadith » du Prophète Muhammad (saw) qui dit que « la main de dessus est meilleure que la main de dessous », en expliquant que la main de dessus est la main qui donne, et la main de dessous est la main qui reçoit.

Le Prophète nous incite clairement, chacun selon ses moyens, à participer au développement de la société, à chercher à produire de la richesse pour le bien commun et à ne pas se contenter d’en consommer en évitant, autant que possible, d’être dépendant des autres.

Les devoirs de suffisance

Nous savons qu’en islam il y a des devoirs individuels qui incombent à chaque musulman ou musulmane comme la prière ou la « Zakât » (qu’on traduit mal comme étant une aumône obligatoire). Mais il y a aussi ce qu’on appelle « furûd al-kifâyah », soiot les devoirs de suffisance ou d’autosuffisance qui incombent collectivement à toute la société, ou à la communauté musulmane.

Un devoir de suffisance est un travail (intellectuel ou physique) dont l’accomplissement est nécessaire pour satisfaire un besoin de la communauté, mais qu’il suffit qu’il soit maîtrisé et effectué par un nombre suffisant de musulmans, faute de quoi c’est toute la communauté qui se trouve dans le « péché » et est responsable de faire le nécessaire pour rendre disponible ce nombre suffisant. De plus, si ce travail nécessite un niveau de proximité voire d’intimité entre les deux sexes, ce nombre suffisant doit être formé d’homme et de femmes.

A titre d’exemple, l’acquisition, la maîtrise et  la pratique des sciences médicales est un devoir de suffisance. L’existence d’un nombre suffisant de médecins hommes et médecins femmes est la responsabilité de toute la société ou toute la communauté musulmane afin de satisfaire ce besoin vital. 

Où en êtes-vous alors mes sœurs ?

La société a besoin de médecins, de sages-femmes, d’infirmiers ou de kinésithérapeutes pour prendre quelques exemples parlants parmi bien d’autres. Vous, mes sœurs, comme beaucoup d’autres femmes, vous préférez avoir affaire, pour vous ou pour vos filles, à des professionnels de santé féminins. Ces métiers font partie des devoirs de suffisance. Or avec votre niqâb, en France ou dans bien d’autres pays, vous ne pouvez jamais acquérir l’ensemble des compétences théoriques et pratiques dans ces domaines.

Ayez le courage de le reconnaître, mes sœurs, vous ne pouvez jamais participer à accomplir ces nobles devoirs de suffisance. C’est à d’autres femmes que revient le mérite de servir la société et satisfaire ses besoins. Vous êtes dépendantes d’elles, qu’elles soient des musulmanes sans niqâb ou des non musulmanes. Ce sont elles qui donnent et c’est vous qui recevez. Elles sont la main de dessus et vous êtes la main de dessous.

C’est pour cela je viens vous prier de prendre du recul, de reconsidérer votre choix et de considérer la fierté et l’honneur de l’islam que vous aimez et vous défendez. N’acceptez pas d’être dépendantes, ne vous contentez pas d’être la main qui reçoit, investissez-vous pour être des actrices qui apportent, soyez la main de dessus, la main qui donne à votre communauté et à votre société. Ne nous voilons pas la face.

Fraternellement

Yad-La-Joie  

PS. : Et qu’en est-il des ces femmes à qui on impose le port du niqâb ? C’est triste à dire, mais je pense qu’elles sont en train de subir une sorte de double peine ; contraintes de faire quelque chose dont elles ne sont pas convaincues et subissant cette pression provoquée de rejet. Je ne peux que leur souhaiter qu’elles puissent se libérer et choisir leur voie, et que ceux qui leur forcent la main, se rendent compte de la gravité de leurs actes.

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Source : Yad


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