Manuel Valls : « Je suis lié de
manière éternelle à Israël »
Hicham Hamza
Vendredi 30
septembre 2011
Information
Oumma.com. En campagne pré-électorale,
le socialiste Manuel Valls a récemment
révélé son attachement -qualifié
d’« éternel »- à l’Etat hébreu. L’aveu
est éclairant : le député de l’Essonne
s’est déclaré également hostile à la
demande palestinienne d’adhésion à
l’ONU.
L’élève aurait-il
dépassé le maître ? En matière d’allégeance
d’un élu de la République envers un Etat
étranger, seul
Dominique Strauss-Kahn avait osé se
démarquer de ses confrères. C’était en
1991, à l’occasion d’un
entretien accordé à la revue
Passages : « Dans mes fonctions
et dans ma vie de tous les jours, au
travers de l’ensemble de mes actions,
j’essaie de faire en sorte que ma
modeste pierre soit apportée à la
construction de la terre d’Israël ».
Coming out
Vingt ans plus tard, un
de ses plus fidèles partisans est allé
encore plus loin : maire d’Evry et
député de l’Essonne, Manuel Valls a
récemment prononcé des paroles
singulières pour un représentant de la
Nation. Le 17 juin, le socialiste était
l’invité d’une
conférence-débat organisée
par l’antenne strasbourgeoise de
Radio Judaïca. Interpellé par
un membre du public sur l’attitude de la
gauche contre l’antisémitisme, Manuel
Valls a tenu à se justifier par un biais
inattendu : l’évocation de son « lien
éternel » -à travers son épouse, la
violoniste
Anne Gravoin- avec « la
communauté juive et Israël ». Depuis
trois mois, cette petite phrase était
passée curieusement inaperçue, notamment
de la part des journalistes politiques
du microcosme parisien : Oumma se
devait de donc réparer cette cruelle
injustice en repérant, découpant et
mettant en ligne l’aveu stupéfiant d’un
homme à la conquête de la magistrature
suprême.
Dans l’expression
publique, de telles paroles sont
doublement inédites : le responsable
d’un parti qui s’affiche comme hostile
au communautarisme avoue tout haut son
lien privilégié avec une religion au
détriment des autres. En outre, l’élu
républicain manifeste avec une emphase
quasi-religieuse son dévouement envers
un Etat étranger-en l’occurrence,
Israël.
L’extrait complet de
cette intervention est encore plus
révélateur : laissant éclater sa colère-« Merde,
quand même ! », Manuel Valls veut
rendre hommage à Lionel Jospin, le
Premier ministre qui « s’est pris des
pierres pour avoir traité le
Hezbollah d’organisation terroriste ».
Le député fustige au passage l’ancien
président de la République, Valéry
Giscard d’Estaing, coupable de
« regarder Israël depuis la
Jordanie avec des jumelles », ainsi
que l’ex-ministre des Affaires
étrangères,
Roland Dumas, qualifié de « sale
bonhomme ». A l’inverse, François
Mitterrand aurait eu, d’après lui,
« les gestes nécessaires » vis-à-vis
de l’Etat hébreu. Enfin, Manuel Valls a
tenu à rappeler à l’audience son
opposition à
Tariq Ramadan et à l’UOIF,
organisation avec laquelle -selon le
député- Nicolas Sarkozy se serait
fourvoyé pour « créer les conditions
de l’islam de France ».
La critique du
président de la République par une
figure de l’aile droite du Parti
socialiste est toute relative : en dépit
de leur antagonisme politique plus ou
moins feutré, les deux hommes
s’estiment en privé. Nicolas Sarkozy
avait
sollicité-en vain- Manuel Valls lors
de la constitution en 2007 du
« gouvernement d’ouverture ». Adversaires
sur la scène médiatique, ils continuent
pourtant de partager des opinions
similaires comme c’est le cas à propos
de la question palestinienne.
Contrairement à François Hollande,
Arnaud Montebourg -tous deux
signataires d’un texte en faveur de
la reconnaissance d’un Etat palestinien-
et, dans une moindre mesure,
Martine Aubry et
Ségolène Royal -qui se sont
relativement prononcées en faveur de
la demande d’adhésion à l’ONU, Manuel
Valls s’est déclaré -pour sa part-
hostile à ce qu’il qualifie, à l’instar
du gouvernement israélien, de démarche
« unilatérale ». Le 19 septembre, le
socialiste rédigea une tribune spéciale
parue dans
Libération afin d’étayer son
propos. Dimanche dernier, interrogé sur
Europe 1 par Jean-Pierre
Elkabbach et Michaël Darmon, il affirma
notamment qu’il n’était pas nécessaire,
« dans les conditions actuelles »,
d’« imposer une décision » et
de « braquer Israël » sur le
sujet.
Admirateur de Barack
Obama et « clintonien-blairiste »
déclaré, Manuel Valls, âgé de
49 ans, sait aussi entretenir des
amitiés particulières, vieilles d’une
trentaine d’années -notamment avec
l’influent Alain Bauer, conseiller
discret du chef de l’Etat pour les
questions de sécurité, et Stéphane Fouks,
un des hommes chargés de la
communication de Dominique
Strauss-Kahn.
Avant de connaître ses
déboires judiciaires, l’ex-dirigeant
du FMI pouvait compter sur Manuel Valls
comme l’illustre une
étrange émission de
politique-fiction diffusée en 2009 sur
Canal Jimmy. Le député-maire
d’Evry feint de se réjouir de la
nomination hypothétique de son mentor à
Matignon : une bonne nouvelle, selon
lui, pour « le redressement
national ».
Figure éminente d’un
parti réputé pour sa lutte contre le
communautarisme, Manuel Valls risque de
s’attirer l’opprobre de nombreux
électeurs potentiels par le double
discours que révèle son aveu de
Strasbourg : si un autre élu avait songé
à révéler publiquement son « lien
éternel » avec l’islam et un pays
quelconque du Maghreb, une bronca
politico-médiatique-du Front national à
la frange ultra-laïque du PS, de
L’Express au Point en passant
par Le Figaro et Fdesouche
- aurait déjà éclaté à son endroit.
Qu’en sera-t-il de Manuel Valls ?
Au-delà de la réaction
des élus et des éditorialistes dans les
prochains jours, ce sont surtout les
électeurs qui auront le dernier mot
les 9 et 16 octobre- lors de la
conclusion des primaires socialistes. En
attendant, libre à chacun de découvrir
le
programme au complet du maire d’Evry
et notamment sa vision-présentée comme
impartiale- de ce que doit être la
laïcité. Une présentation éloquente et
sans favoritisme religieux explicite qu’Oumma
se devait de porter à la
connaissance de tout citoyen. Revue et
corrigée.
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