Al-Ahram Hebdo
Les contradictions
d'Israël
Heba Zaghloul
Photo: Al Ahram
Mercredi 16 décembre 2009
Palestine.
Israël a décidé dimanche d’octroyer des
subventions supplémentaires aux colonies, pourtant censées être
sujettes à une suspension.
Les agressions des colons israéliens contre les Palestiniens ont
repris de plus belle. Mais cette fois, les colons ont opté pour
des actes blasphématoires. Le week-end dernier, c’était au tour
de la principale mosquée du village de Kafr Yassuf, près de
Naplouse en Cisjordanie, d’être la cible de leurs attaques. Le
résultat est déplorable : des livres de prières et des Corans
brûlés, un tapis incendié et des graffitis sur les murs de la
mosquée.
La réaction d’Israël ne s’est pas fait attendre. Dans un
communiqué officiel, Benjamin Netanyahu, premier ministre
israélien, a dénoncé « l’agression contre la mosquée » et a
déclaré avoir « donné l’ordre aux forces de sécurité d’agir avec
détermination pour trouver les coupables et les traduire en
justice ». Mais les Palestiniens le savent bien : ces promesses
restent purement rhétoriques ; les coupables ne risquent ni de
faire l’objet d’une enquête sérieuse et encore moins d’être
condamnés. D’ailleurs, de leur point de vue, c’est bien l’armée
et le gouvernement israéliens qui portent la responsabilité de
ces agressions en laissant les colons extrémistes agir contre
les Palestiniens, depuis des décennies et en toute impunité. Il
y a à peine deux semaines, dans un autre village situé
également près de Naplouse, les colons juifs avaient incendié
une maison et trois véhicules appartenant à des Palestiniens
sans que les autorités israéliennes ne prennent des mesures
contre ces extrémistes.
« Zones de priorité nationales »
Le président palestinien a donc lancé un appel au gouvernement
israélien pour « stopper les attaques des colons » qui risquent
de s’intensifier. Les colons n’ont pas caché leur intention de
multiplier les agressions contre des cibles palestiniennes pour
protester contre la récente décision de Netanyahu de suspendre
temporairement la construction de colonies en Cisjordanie. Et ce
en dépit du fait que la décision en question ne concerne qu’une
suspension temporaire de dix mois. Plus encore, elle ne
concerne pas la majeure partie des colonies à l’intérieur ou à
l’extérieur de la ville sainte qui pourtant englobe une grande
partie de la Cisjordanie, ni même les 3 000 logements en cours
de construction.
Mais les contradictions israéliennes ne s’arrêtent pas là.
Dimanche dernier, l’Etat hébreu a déclaré son intention
d’octroyer des subventions supplémentaires à des colonies en
Cisjordanie en leur accordant le statut de « zones de priorité
nationales ». Quelque 110 000 colons pourront désormais
bénéficier d’une importante aide économique et d’une aide
financière qui s’élève à environ 28 000 dollars.
Cette décision inquiète dans la mesure où le plan concerne des
colonies comme Ariel, Kiryat Arbat à Hébron, ou encore Itamar,
Betar Illit, Elon Moreh, qui sont en fait dispersées en
Cisjordanie. Elles ne font pas partie du très controversé «
Grand Jérusalem » puisqu’elles ne sont pas rattachées au grand
bloc de colonies Maale Adoumim et Goush Etzion que les
Israéliens ont déclaré vouloir annexer. En cas d’un accord de
paix avec les Palestiniens, elles auraient même pu être les
premières démantelées. Mais pour le moment, le processus de paix
ne semble pas faire partie de l’agenda israélien. D’ailleurs,
ces colonies qui sont devenues des « zones de priorité
nationales » sont en fait censées être concernées par la
suspension temporaire décrétée le mois dernier par le
gouvernement israélien. Ainsi, d’un côté, les Israéliens
déclarent geler les activités coloniales dans certaines
implantations et d’un autre, ils décident de développer ces
mêmes colonies ...
Pourquoi une telle contradiction ? Netanyahu en décidant un gel
partiel de certaines colonies voulait apparaître aux yeux de la
communauté internationale comme le parti qui fait des
concessions aux Palestiniens. Mais en aucun cas, le
premier ministre israélien ne comptait mettre fin à sa politique
de fait accompli sur le terrain. Au contraire, la construction
des 3 000 nouveaux logements va permettre à 10 000 colons juifs
supplémentaires de venir y habiter. C’est en tout cas ce que
vient de déclarer Benyamin Begin, ministre israélien sans
portefeuille et fils de l’ancien premier ministre israélien
Menahem Begin. Une provocation envers les Palestiniens, certes.
Mais qui a surtout pour but d’apaiser les colons israéliens qui
ont protesté contre toute suspension d’activité coloniale. Et
pour les Israéliens, l’avis des colons passe avant celui de la
communauté internationale qui, en règle générale, ne fait que
protester verbalement sans prendre de mesure qui pourrait
dissuader les Israéliens de modifier leur politique. Pour les
Palestiniens, le plan israélien ne fait que confirmer ce qu’ils
savaient déjà : le moratoire annoncé par Israël n’était qu’en
fait une « nouvelle comédie » israélienne.
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AL-AHRAM Hebdo
Publié
le 16 décembre 2009 avec l'aimable autorisation de AL-AHRAM Hebdo
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