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Le voyage qui ramène la France dans le marigot atlantiste
Hassane Zerrouky


Bernard Kouchner et Hoshyar Zebari. Photo Reuters

Mardi 21 août 2007

Irak . La visite de Bernard Kouchner, qui a été aussitôt saluée par l’administration Bush, intervient alors que le pays s’enfonce dans une crise que l’invasion US a largement provoquée.

« Que peut-on faire pour vous aider en Irak ? » glissait Bernard Kouchner à Condoleezza Rice lors de sa visite en France en juillet. Ces propos, rapportés par le Canard enchaîné du 4 juillet, montrent si besoin est que la visite du chef de la diplomatie française ne constituait nullement une surprise. C’est lors de cette rencontre que la question a été sans doute évoquée, avant que Washington, qui veille au grain en Irak, ne donne son feu vert à cette mission à laquelle, selon le communiqué du Quai d’Orsay, M. Kouchner « réfléchissait depuis sa prise de fonction » !

Celui qui considérait en 2003 que les États-Unis « voulaient donner aux Irakiens les clés de leur maison démocratique » et s’y étaient « mal » pris pour ne s’être pas appuyés sur des « arguments qui seraient populaires auprès de l’opinion internationale », a mal choisi le moment d’une visite qui marque d’abord un tournant dans l’orientation de la diplomatie française. Il n’est plus question de retrait des troupes américaines en Irak comme le demandait Jacques Chirac, car « cette page est derrière nous », déclarait hier le ministre à ses interlocuteurs irakiens, dont le président Talabani. Il a assuré, en dépit de la gravité de la situation que vit l’Irak, que « la France est prête à participer à cette lutte contre la violence » qu’il a qualifiée d’« inacceptable » ! Quoi qu’il en soit, tout porte à croire que le retour souhaité de la France en Irak relève de la gageure, du moins dans les conditions sociopolitiques actuelles. Hormis le gouvernement irakien dont l’autorité ne va pas au-delà de la « ligne verte », tout heureux de voir Paris changer de politique, il est permis de penser que la visite de Kouchner a peu de chance de faire bouger les lignes du front irakien.

Incapacité d’assurer la sécurité

En effet, le pays s’enfonce dans une crise politique sans précédent qui est aussi le reflet du fiasco de l’invasion US. Couplée à la poursuite des violences de toutes sortes et des attaques contre les forces américaines, le champ des possibilités pour une issue politique pacifique apparaît de plus en plus réduit. Le gouvernement du premier ministre, Nouri al-Maliki, boycotté par les partis sunnites et le parti laïc d’Iyad Alaoui, contesté par la plus importante force chiite, celle de l’imam Moqtada Sadr qui exige la fin de l’occupation américaine, prend l’eau de toute part. Il est dans l’incapacité d’assurer la sécurité. Pour preuve, pas plus tard qu’hier, alors que Bernard Kouchner discutait avec les dirigeants irakiens, l’explosion d’un véhicule piégé faisait cinq morts à Bagdad. Un peu plus tôt, le gouverneur chiite de la province d’al-Massouna est tué par un attentat visant son convoi blindé. Tandis que des affrontements généralisés interchiites, opposant le Conseil suprême de la révolution islamique en Irak (CSII) et les partisans de Moqtada Sadr (voir notre édition du jeudi 16 août) menacent le pays chiite.

Quant à l’offensive lancée par les troupes américaines contre les djihadistes et les milices chiites, le commandement US n’a pour l’heure publié aucun bilan, alors que par ailleurs la Grande-Bretagne, qui a déjà réduit ses effectifs militaires, n’exclut plus de retirer la totalité de ses troupes au cours de l’année 2008. Qui plus est, l’autorité du premier ministre irakien est mise à mal en raison de son incapacité à rétablir des services aussi vitaux que la distribution de l’eau et de l’électricité pour une population lassée par la violence, alors que par ailleurs la corruption gagne de plus en plus de terrain et s’installe dans la durée.

L’ONU, une force d’appoint bienvenue

Au regard de ce sombre tableau, quand le chef de la diplomatie française évoque l’idée d’un rôle accru pour l’ONU, il ne fait qu’exprimer toute l’impasse dans laquelle se trouve l’administration Bush, qui ne verrait pas d’un mauvais oeil l’implication de la communauté internationale comme force d’appoint pour sortir du bourbier. Pour le président Bush et les néoconservateurs américains, la visite de Kouchner en Irak est du pain béni : elle permet à la Maison-Blanche, de plus en plus isolée au plan interne sur le dossier irakien, d’exorciser ses démons. Elle donne du crédit aux commanditaires d’une guerre qui restent convaincus, en dépit de l’enlisement US en Irak, qu’il est encore possible de la gagner au nom des valeurs occidentales.

Certes, pour le ministre des Affaires étrangères français, ce « coup d’éclat » permet d’effacer le fait qu’il ait été tenu à l’écart du dossier des infirmières bulgares et de redorer son blason. Mais, plus généralement, il s’inscrit en droite ligne des convictions qu’il a de tout temps mis en avant. En effet, sa vision de l’intervention au nom du droit d’ingérence humanitaire n’est au fond pas si éloignée de celle développée par George W. Bush au nom de la défense de la morale chrétienne conservatrice.

© Journal l'Humanité
Publié le 23 août 2007 avec l'aimable autorisation de l'Humanité.



Source : Le Web de l'Humanité
http://www.humanite.fr/...


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