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L'Humanité
Dangereuse escalade au Pays du cèdre
Hassane Zerrouky
Liban . Le Hezbollah, Michel
Aoun et leurs alliés ont appelé les Libanais à manifester
aujourd’hui. L’armée a averti qu’elle ne tolérera aucun débordement.
Beyrouth, envoyé spécial.
Ségolène Royal est arrivée hier à Beyrouth
pour une visite de deux jours, à un moment crucial, celui où le
Liban fait face à une dangereuse escalade. En effet, la tension,
déjà persistante, émaillée de plusieurs incidents, depuis
l’assassinat de Pierre Gemayel, est brusquement montée d’un
cran. Les médiations ayant visiblement échoué pour éviter que
l’opposition ne recoure à la rue pour faire chuter le
gouvernement, le général Michel Aoun, chef du Courant
patriotique libre (CPL, chrétien), a lancé mardi soir un appel
aux Libanais à descendre dans la rue.
Convaincu que le gouvernement et sa majorité ne
peuvent résoudre aucun problème se posant au pays, Michel Aoun a
estimé que ce n’est pas le moyen auquel il aurait « souhaité
avoir recours ». Le lendemain jeudi, sur un ton empreint de
gravité, son allié, le chef du Hezbollah, Hassan Nasrallah, a
estimé, via la télé Al Manar, que le gouvernement ne leur a
laissé aucun autre choix, et a appelé à des rassemblements et
des sit-in « pacifiques ». Amal, l’autre parti
chiite, s’est joint à cet appel. Tandis que le président Emile
Lahoud a invité les fonctionnaires à la désobéissance civile.
La majorité gouvernementale - le parti de Hariri,
les deux partis chrétiens, les Kataëb et les Forces libanaises
ainsi que le Parti socialiste progressiste (PSP, druze) de Walid
Joumblat - a pour sa part demandé aux Libanais « de se
tenir prêt », qualifiant la manifestation de l’opposition
de « putsch fomenté par Damas » pour faire revenir le
pays en arrière et empêcher l’instauration du tribunal
international devant juger les crimes commis depuis février 2005.
Récusant cette accusation de manipulation par la Syrie
l’opposition a réitéré que la formation d’un gouvernement
d’union nationale et une nouvelle loi électorale non basée sur
le confessionnalisme et la fin des ingérences occidentales
constituent leur principale revendication. En effet, si la majorité
accuse ses adversaires d’être instrumentalisés par la Syrie,
l’opposition lui reproche en retour de ne prendre aucune
initiative sans en référer à l’ambassadeur américain,
Jeffrey Feltman. « À l’instar de l’administrateur américain
en Irak, Jeffrey Feltman donne l’image d’un proconsul chargé
d’administrer le Liban », accuse un membre de
l’opposition.
Par la voix de son chef, le général Michel
Sleimanea avertit que l’armée libanaise « ne permettra
pas à une cinquième colonne de perturber la paix civile ».
Et quand on sait que le Hezbollah n’a pas désarmé, on craint
une montée des périls.
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