Opinion
Israël : La
contraception imposée aux femmes
falashas
Gilles
Devers
Mercredi 30 janvier
2013 Suivre l’actu,
c’est pas toujours joyeux, on le sait,
mais parfois, il y a vraiment de quoi
être révulsé. Les femmes falashas, cette
communauté juive d’Ethiopie, se voient
imposer une contraception forcée si
elles s’installent en Israël. C’est la
destruction raciste d’une communauté, et
le gouvernement de Tel-Aviv, devant les
preuves réunies, a enfin reconnu
l’affaire. Dans la
foulée de la proclamation de l’Etat
d’Israël, a été votée en 1950 une loi
garantissant à tout Juif le droit
d'émigrer en Israël. A ce jour, près de
120 000 Juifs d’Ethiopie, les Falachas,
vivent en Israël : 80 000 nés en
Ethiopie et 40 000 en Israël.
L’accueil a été frais, plus que frais,
et cette communauté vit dans un évident
statut social discriminatoire. La cause
: des groupes intégristes influents
contestent la judéité des Falashas, qui
en plus sont noirs et pauvres… Le
gouvernement et la bonne société
israélienne ne vont quand même pas se
fâcher avec les intégristes pour si peu
! C’est une chronique permanente, et
très publique. Ce qui
était moins public, c’est que le
gouvernement israélien a imposé aux
femmes falashas qui voulaient bénéficier
de la loi de 1950 de se soumettre à une
contraception forcée.
Oui, une contraception forcée, pour
détruire cette communauté. Horrible,
insensé et criminel.
Depuis 5 ans, cette question revenait à
espaces réguliers dans le débat, et le
gouvernement apportait des démentis
aussi systématiques qu’indignés : «
Quoi, nous, grands humanistes… Nous
accuser est un scandale »… Bref, le
gouvernement adorait l’arrivée des
Falashas, et il regrettait juste qu’ils
ne soient pas plus nombreux…
Tout le problème est que les faits sont
maintenant établis.
Le premier élément,
c’est une donnée sociale bizarre. Au
cours de la dernière décennie, le taux
de natalité de la communauté éthiopienne
d'Israël a baissé de 50%. Curieux.
On s’intéresse
ensuite à un médicament, le Dépo-Provera,
un contraceptif d'une durée d'action de
trois mois, administré par injections.
Les femmes n’apprécient pas, et on le
comprend, d’autant plus que les effets
secondaires sont redoutables. Mais il
faut que croire que les femmes falashas
adorent : cette communauté, 2% de la
population, assure 57% de ventes…
Alors, il fallait
faire la lumière, et je salue une action
concertée des ministres de la justice et
de la santé israéliens qui ne
supportaient plus ce doute… Tu parles !
Ce sont eux qui organisaient ces actes
criminels, alors ils ont tout fait pour
étouffer l’affaire.
Le militantisme et la
presse ont fait le nécessaire. Une
organisation israélienne féministe,
Achoti, a regroupé les témoignages
et les informations, pour les
transmettre à l’excellent Haaretz,
qui a consacré un article incontestable
sur cette affaire, donnant la parole à
Efrat Yardai, animatrice de groupe pour
des femmes d'origine éthiopienne au sein
d’Achoti.
«
Le
Dépo-Provera
a une histoire infâme. L’injection était
pratiquée sur des femmes entre 1967 et
1978, au titre d’une expérience dans
l’Etat de Géorgie aux Etats-Unis sur 13
000 femmes pauvres, dont la moitié était
des femmes noires. La plupart d’entre
elles n'avaient pas conscience que cette
injection faisait partie d’une
expérience faite sur leur corps.
Certaines sont tombées malades et
quelques-unes sont mêmes mortes au cours
de l’expérience » Plus
généralement,
« les injections infligées aux femmes
éthiopiennes font partie de l’attitude
globale des Israéliens à l’égard de ce
groupe d’immigrants ».
L'Association pour
les droits civiques en Israël (ACRI) a
pris le relais, demandant des
explications au ministère de la Santé,…
qui a lamentablement publié un
communiqué précisant que « des
contraceptifs ne devaient pas être
prescrits sans le consentement explicite
des patientes ». Pas de contestation et
un aveu minimaliste…
Des petits,
tout petits, face à une affaire
horrible. Bien sûr, n’attendez ni
poursuites pénales sérieuses, ni
protestation des gouvernements
occidentaux, car c'est un gouvernement
qui défend nos valeurs...
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